Chapitre 8 - Mars - Insauvable

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Au travail, Alice se donnait à mille pour cent et elle avait réussi à se faire bien voir de l'amie de la dragonne. Elle bavardait maintenant avec elle chaque midi et faisait un bout de chemin à ses côtés pour aller à sa voiture. Sans vouloir se projeter, elle se disait que cette nouvelle amitié s'annonçait bien pour son boulot. Elle allait peut-être enfin cesser d'être le bouche trou du magazine.

Quand le soir de la grande première arriva, Benjamin sentait la pression l'étouffer. Il n'avait pas pu voir Alice du weekend et cette semaine était bien partie pour être très stressante. Heureusement, les danseuses étaient jolies à regarder et permettaient de se changer les idées. Mais même elles semblaient au bord de la crise de nerf quand les lumières dans la salle baissèrent peu à peu. Dans son costard, Benjamin rajusta sa cravate, vérifia que son pense bête était bien dans sa main, attrapa le micro que lui tendait l'ingénieur du son et monta sur scène sous la musique de Star Wars, thème de la revue. Son discours piquant et énergique fit rire le public même si au début sa voix était tendue par le stress. Il termina en remerciant le recteur, le doyen, les membres du personnel académique, les anciens, les étudiants présents et les membres des autres cercles. Lorsqu'il revint en coulisse, il souffla enfin et se mit en quête d'une bière. Plus que trois représentations.

Le lendemain soir, Antonin était frigorifié. Il attendait Margaux en bas de son bâtiment parce qu'il n'avait pas envie de se taper les cinq étages. Mais elle traînait visiblement puisqu'elle lui avait envoyé un sms pour le prévenir qu'elle descendait immédiatement, il y avait de cela 10 minutes. Menteuse. Elle finit par arriver, son gobelet réutilisable dans la main, sa veste de comité à moitié mise, son ticket dans la bouche, un bras dans son polo et sa calotte pendant à son cou. En un mot, elle était débraillée. Alice qui la suivait s'excusa auprès d'Antonin.

— Si je te dis que moi j'étais prête mais que j'ai dû l'attendre, tu me crois ?

— Bizarrement, oui, grogna-t-il.

Ils descendirent chacun à leur manière vers l'Aula Magna, salle où se déroulait le spectacle, Antonin râlant qu'ils arrivent juste avant la fermeture des portes, Margaux en vérifiant qu'elle n'avait rien oublié et Alice silencieusement.

Dans la salle, Margaux prit place près d'Alice et Antonin et fut rejointe par deux autres filles des décors. Les lumières s'éteignirent et la musique commença. En tant que Président, Ben faisait le discours de bienvenue. En costard. Alice sentit tout à coup son cœur s'emballer. Il était vraiment magnifique. Elle s'éventa avec le programme que le cercle des ingénieurs avait imprimé en papier glacé (Antonin râlait devant tant de moyen) et se tassa dans son siège en velours. Ce sourire... Ce petit rire gêné... Même ses larges épaules et son buste taillé en « v » lui donnaient chaud.

Le spectacle fit beaucoup rire Margaux et Justine qui commentaient tout. A la pause, le petit groupe descendit dans le hall d'entrée et Antonin et Justine s'éclipsèrent pour fumer. Alice resta avec Margaux et les deux copines des décors, guettant l'arrivée de Ben. Un jeune homme au sourire énorme et aux sourcils foncés vint faire la bise à Margaux. Il ne portait pas de polo de comité, pas de band ni de calotte, juste une chemise, du coup, Alice se demanda d'où il pouvait connaître Margaux, la plus grande fêtarde du monde. Il était mignon mais il n'avait pas un visage inoubliable. Margaux échangea deux mots avec lui puis son attention fut détournée par Benjamin qui arrivait. Il salua Margaux par une bise puis embrassa le front d'Alice.

— Je te rejoints après la pièce, murmura-t-il. J'ai pas le temps, là.

Elle hocha la tête, un peu perplexe et le regarda s'éloigner, son parfum embaumant encore ses narines. Mais Margaux comprit rapidement pourquoi Ben ne s'était pas attardé. Plus loin dans la foule, un regard brun brûlait dans leur direction. Carole et son visage renfrogné les fixaient. Elle n'avait s'en doute rien raté de la scène.

— Alice, viens, on remonte..., décida Margaux en la prenant par la main.

— Mais ça va, ne t'inquiète pas, j'ai bientôt fini mon verre, la rassura la brune.

— Je sais, j'ai envie de voir s'ils font un changement de décors.

— Et c'était qui le beau jeune homme a qui tu as dit bonjour ? demanda innocemment Alice, le regard bourré de sous-entendu.

— Un pote de mon cokoteur, je ne me souviens plus de son nom. Allez, viens !

Malgré la soirée à l'œil, Alice n'avait pas envie de tenter le diable une seconde fois. Le spectacle et sa chasse aux fûts se termina vers une heure du matin. Cette chasse consistait à faire participer les parents, les amis, les cercles, régionales et membres du personnel de la faculté aux frais de la revue de l'année suivante sous forme de fûts payés. Un fût de bière représentant une centaine d'euros, certains en mettait un demi, d'autres plusieurs. Ce folklore était amusant pour ceux de la faculté concernée mais un peu moins pour ceux qui ne connaissaient pas ce folklore. Épuisée, Alice rentra directement après. Margaux, Justine, Antonin et les deux filles des décors, eux, sortirent au CI pour profiter des fûts et des bières gratuites. Carole avait fait le même choix.

Les étudiants et les anciens fêtaient la fin de ce spectacle tous ensemble dans une joyeuse ambiance. Un fond musical permettait à certains à danser et les bières coulaient à flots, de cruches à verres, sans interruption. Justine et Margaux s'étaient lancées dans un concours d'affonds ravissant Antonin qui se moquait de leur technique. Après quelques minutes, il y eut moins de gens dans le cercle et l'atmosphère devint plus respirable. Margaux ne vit pas tout de suite Carole se diriger vers Ben pour « lui parler » entre deux portes. La blonde arborait un décolleté peu fournit mais le poussait bien en avant. Elle avait cette tête un peu fâchée qu'elle gardait tout le temps et qui semblait démontrer qu'elle faisait la gueule en permanence. En ce moment même, elle avait l'air de péter un câble sur Ben en voulant rester séductrice tout de même. Margaux voulu aller le sauver mais il posa une main sur son épaule en secouant la tête comme pour dire « ne t'en mêle pas ». Pourtant il n'avait pas l'air serein, tentant même de garder ses distances avec la jeune fille en se tenant très droit. Elle prit le bas de son polo de comité avec une mine joueuse. « Totalement schizo », pensa Margaux.

Les chansons se succédaient et Margaux ne pouvait pas décoller son regard de Carole qui se comportait clairement comme une chaudasse. Et Benjamin ne semblait finalement pas être contre. Quand elle finit par l'embrasser, Margaux fondit sur elle et la poussa violemment, la faisant trébucher.

— Mais t'es malade ?! s'indigna Benjamin.

— Et Alice ?! Tu penses à Alice ?!

— On n'est pas ensemble, je te rappelle. Tu sais mieux que moi comment fonctionne un plan cul.

Sur ces paroles blessantes, il se retourna et aida Carole à se redresser pendant qu'elle jetait un regard noir à Margaux. La jeune fille, vexée, se détourna de ce spectacle écœurant et quitta le cercle.

Histoire de la calmer, Antonin lui tendit une Kasteel rouge et l'attira vers un coin de la salle par le coude. Les filles des décors reprirent leur discussion pendant que Margaux fustigeait mentalement son meilleur ami. Qu'elle se fasse traiter comme de la merde par des mecs ok, mais il n'était pas question que LUI ose traiter Alice de cette manière. Elle méritait tout l'amour du monde. Et à présent qu'elle était certaine qu'il déconnait, comment devait-elle agir ? Devrait-elle tout balancer à Alice ? Ou bien rester loyale à Ben ? 

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Court chapitre car la suite arrive :) Hésitez pas à me montrer que vous êtes encore là :) 


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