19 : CAUCHEMAR

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CETTE NUIT-LÀ fut agitée pour Rory et son subconscient attaqué par les tentacules cauchemardesques de Morphée lui fit vivre un véritable enfer

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CETTE NUIT-LÀ fut agitée pour Rory et son subconscient attaqué par les tentacules cauchemardesques de Morphée lui fit vivre un véritable enfer. Une première fois, le jeune homme s'endormit difficilement pour s'éveiller avec des cris quelques heures plus tard, la peau collante de sueur. Il lui semblait que ses oreilles résonnaient toujours des lamentations que le Samuel de son cauchemar hurlait sans discontinuer. Sa gorge brûlante lui réclamait une douceur fraîche.

Les spectres de son rêve dansaient toujours devant ses yeux encore lourds d'un sommeil agité. Rory se revoyait penché au-dessus d'un immense ravin dont le fond n'était qu'un puit de ténèbres d'où s'échappaient les hurlements de Samuel. Ces appels terribles qui lui déchiraient le cœur et auxquels il ne pouvait répondre ; et pour cause, sa bouche était cousue. Rory se revoyait s'effondrer sur le sable rouge et pleurer à en dessécher le bleu de ses yeux.

Et quand Samuel ne hurlait pas, il murmurait des mots qui se répercutaient chaque fois plus puissamment sur les parois du ravin pour finalement venir s'écraser dans la figure de Rory. Et ces mots étaient pires encore qu'une gifle ou qu'une insulte de sa part, car ils gorgeaient son âme d'espoir avant de lui soutirer si violemment que ses sanglots redoublaient. Ces mots lui promettaient de mettre fin à tout ça, comme dans le message qu'il avait eu le culot de lui envoyer dans la soirée.

Et alors que Rory n'était plus sûr de tomber ou de s'éloigner du ravin, son cauchemar s'achevait par un réveil en sursaut et des joues bouillantes de sanglots. Recroquevillé dans un noyau d'épais édredons, il attendit que les brumes de son rêve s'estompent et que sa vue se brouille, que ses pensées s'emmêlent et que le sommeil le rattrape. Sauf que son cœur faisait trembler sa cage thoracique et que ses larmes brillaient toujours en sillons humides sur ses joues.

Sauf qu'il était réveillé comme jamais et que les images troublantes de son cauchemar continuaient de se préciser dans sa tête. Rory soupira et repoussa les couvertures avec virulence. Ce n'était pas un rêve qu'il réussirait à oublier en replongeant dans le sommeil ou en se tordant les doigts jusqu'au rougissement de ses articulations. Ignorant les fourmis qui agitaient ses mains, Rory entreprit d'allumer sa PlayStation et de grignoter les confiseriees abandonnés sur la table basse.

C'est la sonnerie de son téléphone qui le réveilla presque trois heures plus tard. Il s'était endormi devant une série. En jetant en coup d'œil vaseux par la fenêtre en ogive, Rory constata que le ciel plombé était toujours aussi sombre qu'à son premier réveil et sans avoir le courage de lorgner l'heure, il décrocha. Le jeune homme ne prit pas même le temps de regarder l'auteur de cet appel tardif – ils en avaient plus que de raison, ces derniers temps – et porta l'engin contre son oreille.

— Hm ? réussit-il à marmonner.

Rory retint un bâillement contre son poings et souffla par le nez.

Rory ? 

S'il n'était pas certain d'avoir aperçu son numéro de téléphone, Rory pouvait cependant certifier qu'il s'agissait de la voix d'Arthur.

Je crois qu'il se passe un sale truc.

La respiration de son ami devint saccadée et il se redressa dans son lit.

Mais en même temps, continua Arty d'un ton bas et enroué, et si nous étions aussi fautifs que lui ? Si nos actions ou inactions du passé s'étaient répercutées sur un être humain de façon à le briser suffisamment pour qu'il accumule une rancœur destructrice ?

Arthur s'interrompit une seconde, comme surpris par ses propres mots. Rory serra les mâchoires à s'en déchausser les dents. Visiblement, Aristote ne tourbillonnait pas que dans son esprit.

— Et s'il avait saisi l'opportunité de se venger plutôt que d'essayer de remonter la pente ? Et s'il était tout simplement aussi malade que son père ?

Quand enfin Rory saisit enfin le détail qui le tracassait depuis le début de cet appel, les mots s'écoulèrent de sa bouche sans qu'il ne réussisse à les contrôler.

— T'as bu.

Ils sonnèrent comme une accusation et la honte lui fit mordre sa langue. Rory savait qu'en soulignant ce fait aussi brutalement, Arthur risquait de se renfermer, d'écourter la discussion. D'étouffer ses malheurs pour mieux les effacer.

Tu devrais partir un peu, Rory.

Arty lui échappait. Ne résonnait plus que sa confusion, son hésitation et sa tristesse.

— Qu'est-ce que tu racontes putain ? s'exclama Rory, perdu lui aussi. Comment ça, il s'est passé un truc ? Partir ? Arthur !

Il l'entendit renifler puis éloigner le combiné pour l'abandonner au silence quelques secondes. Quand il rapprocha de nouveau l'appareil de ses lèvres, Rory comprit qu'il avait recouvré un peu de son calme.

Pars quelques jours. S'il te plaît. Je ne sais pas quand ça va arriver.

Et c'est sur ces derniers mots que Rory abandonna l'idée de se rendormir pour cette nuit.

DARK KINGWhere stories live. Discover now