Chapitre 14

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Elisabeth s'en sortait avec quelques éraflures et une bonne paire de sutures faites maisons sur la cuisse droite, plus de peur que de mal mais la blessure avait été assez profonde pour qu'effectivement elle ne puisse pas marcher sur le chemin du retour sans tirer dessus. Une bonne heure à nettoyer correctement toutes les entailles - qui aurait dit que du simple béton aurait pu érafler aussi profondément ? - et surtout des explications obligatoires auprès de Martha qui avait refusé de recoudre quoi que ce soit avant de savoir ce qui se tramait au bout de ce couloir nord.

Celle-ci avait râlé pour la forme tout en s'occupant à recoudre la méchante entaille mais avait cessé quand la pauvre Elisabeth s'était mise à pleurer en silence alors que l'aiguille faisait des va-et-vient lancinants dans sa peau. Il s'avérait que dans une autre vie Martha avait été une infirmière : une infirmière un peu brusque mais visiblement capable.

Les lits, dont l'accès avait été fraîchement dégagés, avaient tout de suite été mis à contribution pour Elisabeth qui était évidemment interdite de tout mouvement inutile durant sa convalescence et avait même une garde-malade en la personne de Julie - qui était ravie d'être mise à contribution.

- Mais elle a raison, c'est étrange que personne ne soit venu pour le moment - ami ou ennemi d'ailleurs.

Mathias faisait référence à sa conversation avec Elisabeth dans les tunnels avant que le ciel ne lui tombe sur la tête, le silence total au dessus de leur colonie commençait à devenir assourdissant. La technologie à laquelle les deux camps avait accès devrait leur permettre en théorie de savoir tout de suite si des êtres humains vivants se trouvaient dans un sous-sol ou non et donc de venir soit les sauver, soit les capturer - ou abattre.

- Qu'est-ce que tu sous-entends ? lui répondit Mitsu.

Les deux hommes étaient assis autour d'un réchaud à gaz qui faisait office de « feu de camp », à leur habitude ils s'étaient éloignés du reste de la foule pour pouvoir parler tranquillement. Un café bien mérité était en préparation sur le feu, ils attendaient patiemment que l'eau ne se mette à bouillir.

- Je pense qu'on est dans une position inconfortable, entre deux camps, et je ne comprends pas pourquoi le camp ennemi ne nous fait tout simplement pas exploser si il sait qu'on est là.

Il mima sa phrase avec les mains, écarquillant les yeux et articulant un « boom » inaudible. Le brun lui répondit par une bourrade dans l'épaule même si il souriait allègrement.

- De toute façon, si c'est les Eugénistes qui viennent nous chercher on est cuit, c'est déjà plié, dit-il.

- Moi, je dis que dans un tunnel avec deux ou trois autres personnes et autant de flingues on peut leur faire passer un mauvais quart d'heure.

Mitsu claqua de la langue en éteignant le réchaud, il fit passer le café à travers le filtre improvisé qu'ils avaient fabriqué avec une passoire et un bout de papier absorbant et fit mine de ne pas répondre.

- Je suis sûre qu'Eli' pourrait très bien tenir le front comme ça, continua le châtain en murmurant. Je ne sais pas dans quoi cette simple étudiante a traîné mais je pense que c'est pas très net, je veux pas me la mettre à dos si tu vois ce que je veux dire.

- M'en parle pas, quelle tête brûlée.

Il tendit une tasse à Mathias en haussant les sourcils pour illustrer ses propos :

- Et donc, si on est en zone grise et qu'on est pas encore morts, qu'est-ce que ça veut dire au juste ?

- Tu sais très bien ce que ça veut dire. - il but une gorgée du liquide noir, se brûlant presque avec plaisir tellement il voulait ce café - Ça veut dire qu'il y a quelque chose ici qu'il ne faut pas faire exploser.

Juste après la Fin du MondeWhere stories live. Discover now