Chapitre 7

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Elisabeth avait convaincu Mitsu de lui-même convaincre Mathias que partir en pleine nuit avec les « ressources du camp » était une mauvaise idée. Il serait bien plus facile, selon elle, de faire passer la pilule auprès des gens avec une fille dans leur groupe et des jolis mots. Elle avait précisé qu'elle n'attendait rien concernant ce sujet de Mathias, Mitsu avait pouffé mais n'avait pas dit non. Ils avaient discutés tous les deux du fameux magasin de matelas et de ce qui pouvait être fait dès le lendemain à ce sujet puis des personnes qu'ils estimaient un peu dangereuses au sein du camp.

Si les deux policiers avaient eu des doutes ou plutôt des intuitions concernant la jeune femme, il s'avérait que ses propres analyses étaient justes et que son désir d'aider était certain. Ils s'étaient séparés pour aller prendre quelques heures de repos comme ils le pouvaient, convenant qu'ils se retrouveraient le lendemain matin. L'Asiatique avait rejoint son collègue toujours en train de râler et Elisabeth avait rejoint Julie pour se trouver une place où dormir. C'était contre toute attente Martha qui avait trouvé de quoi ramollir un peu le sol sous elles pour qu'elles puissent y dormir. Curieusement, personne n'alla se placer dans l'obscurité pour dormir : tout le monde resta aux alentours de la palmeraie, bien dans la lumière comme si ils avaient peur des monstres qui pouvaient se tapir dans l'obscurité.

Le matin était venu, ou tout du moins c'était ce que les montres indiquaient, et la colonie s'était peu à peu éveillée. Ce fut Jean qui le premier ramena le sujet de l'excursion sur le tapis : il se hissa sur un bout de béton et se mit à crier dans le hall alors que certains venaient à peine de sortir du sommeil.

— Après avoir passé une journée et une nuit ici, il faut admettre que nous allons être coincés ici un certain temps !

Elisabeth interrompit ce qu'elle était en train de faire - replier son matelas de fortune - pour se tourner vers lui, elle voyait qu'il avait réussi son coup et avait attiré l'attention de tout un tas de gens, quasiment tous. De l'autre côté de l'oasis, elle aperçut Mathias qui visiblement rongeait son frein et Mitsu qui fidèle à son poste se tenait à côté de lui, les bras croisés. Ce dernier lui fit un signe de tête pendant que Jean continuait à s'égosiller :

— Il faut s'organiser, compter les ressources, peut-être faire des tours de gardes...

— Et chercher une sortie ! Répondit Elisabeth d'une voix forte.

Quelques têtes se tournèrent vers elle et elle vit même quelques hochements de tête, le tas de muscles lui, tira la moue.

— J'croyais qu'on avait déjà réglé ça hier, dit-il.

— On a dit qu'on en reparlerait, cria une nouvelle voix en provenance de la foule.

La rumeur grandit, visiblement la décision ne semblait pas aussi unanime que Jean voulait bien le croire. Tout en restant à une distance raisonnable de lui, elle le rejoint sur son piédestal pour défendre son point de vue :

— On n'a aucune idée de ce qui se passe dehors, ni même de qui occupe la ville en ce moment... Ce qu'on sait c'est qu'on n'entend rien et que notre temps ici est compté. Ces couloirs sont immenses et il y a en forcément un qui donne dehors quelque part ! Il nous suffit de quelques lampes de poches et nous pouvons faire des rondes, marquer les voies sans issue...

— Nous ? Demanda Jean d'une voix acerbe. Parce que tu comptes te joindre à cette excursion en plus ?

Elisabeth décida de sauter à pied joint dans ce piège qu'il s'était tendu tout seul comme un grand, finalement il serait très facile de rallier tout le monde à leur cause :

— C'est quoi le problème, que je sois une femme ou que je ne partage pas ton avis ?

Si les longs cheveux raides et la peau noire d'Elisabeth ne lui avait jamais causé d'ennuis de manière directe à proprement parler, elle ne tombait certainement pas sur le premier abruti un peu obtus qui lui donnait du fil à retordre. Et si c'était une simple maladresse de sa part, la faim justifiait les moyens. Et comme prévu, un murmure agacé et agressif parcourut soudain l'assemblée, elle entendit même quelques claquements de langues réprobateurs dans la foule.

Juste après la Fin du MondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant