Chapitre 13

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Des litres d'eau tombèrent violemment sur la jeune femme alors qu'elle venait de donner un coup de pelle dans une poche qui attendait sagement jusque là. Elle couvrit sa tête et son visage par réflexe, le cri de surprise qu'elle laissa échapper fut instantanément noyé dans un débit d'eau aussi imprévu qu'impressionnant, sans réfléchir plus longtemps Mathias et Mitsu saisirent ses jambes pour la tirer hors du tunnel. Malgré l'eau qui ne cessait de s'écouler et transformait le remblai en boue aqueuse, ils parvinrent à l'extirper en quelques secondes à peine, assez longtemps tour de même pour qu'elle ait à cracher l'eau qui cherchait à s'insinuer dans ses poumons.

— Mais tu es cinglée ! lui asséna Mitsu alors qu'elle tentait de reprendre son souffle. Et trempée !

Il retira sa veste et lui jeta sur les épaules dans un geste qui se voulait détaché. Mathias, lui, regardait avec dépit le semblant de tunnel qu'ils avaient creusé se faire complètement détruire par une rivière d'eau qui cessait de couler. Toujours en train de cracher ses poumons à quatre pattes sur le sol, Elisabeth tourna la tête pour constater les dégâts et laissa même échapper quelques jurons avant de se remettre à tousser.

— Bon, commenta la châtain. On est sur une base de « repartir de zéro » c'est ça ?

L'eau continuait d'emporter des morceaux de bétons et du sable, remplissant petit à petit l'espace qui diminuait à vue d'oeil. Le flot évolua d'un bruit explosif vers le chatoiement régulier d'un fleuve, un bruit presque naturel qui rappelait l'extérieur mais n'arrangeait pas leurs affaires.

— Ça ne s'arrête pas, constata Elisabeth.

Sa voix était enrouée : elle avait été pas loin de s'étouffer dans ce tunnel. Elle parvint à s'asseoir, resserrant les pans de la veste de Mitsu sur ses épaules et tentant de cacher les blessures qu'elle sentait saigner sur tout le devant de son corps. Lorsqu'ils l'avaient tirés en arrière, son ventre, ses bras et l'avant de ses cuisses avaient frotté avec violence les aspérités du sol.

— Si tu as trouvé une canalisation du réseau et que personne ne coupe les vannes...

Mitsu s'assit à côté d'elle soupirant comme un beau diable, trois jours de travail réduits à néant.

— Je suis désolée, murmura Elisabeth penaude. Si je n'avais pas...

— Ne le sois pas, la coupa aussitôt Mathias, elle aurait forcément pété un jour ou l'autre, à la limite je préfère que tu sois prêt de la sortie et qu'on puisse te tirer avant que tu ne te noies dedans.

Ils restèrent un long moment en silence à regarder sans la voir cette fontaine toute neuve qui irriguait leur pieds et éloignait à chaque goutte un peu plus la possibilité de revoir le soleil. Comme prévu, le débit ne se calma pas et continua de déverser sa flotte grisâtre sur le sol.

— Bon, - Mathias se leva et épousseta son jean, peine perdue l'humidité ne faisait qu'empirer les choses - on rentre ?

Mitsu le suivit aussitôt, tendant la main à Elisabeth après s'être relevé.

— Rentrons, t'as bien besoin de te changer et de te débarbouiller.

De la tête aux pieds, elle n'était qu'eau et terre mélangée et elle devait bien avouer qu'elle boirait bien une boisson chaude pour se réchauffer les os en passant. Elle ressuya une coulée de boue qui menaçait de lui tomber dans les yeux avant de se saisir de la main tendue et se relever dans une grimace de douleur.

— T'es blessée ? demanda Mitsu.

Avant même qu'elle ne puisse répondre, Mathias balaya rapidement ses jambes avec sa lampe torche et y découvrit les déchirures dans le tissu ainsi que les marques rouges et brunes qui ne laissaient pas place au doute. Malgré l'envie de lui passer un savon, il lui demanda simplement :

Juste après la Fin du MondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant