Chapitre 99

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Ça devait bien faire une heure qu'on vironnait au-dessus de la ville quand Télio se posa dans la cour arrière d'un immeuble. Je le suivis, un peu à regret. J'avais hâte d'aller chez Debbie.

- Pourquoi tu te poses ? demandai-je une fois les deux pieds au sol.

- J'ai eu une soudaine envie de marcher. Tu vois, marcher dans une ville morte, comme ça, c'est quand même un peu excitant, tu trouves pas ? Tout est mort, on croirait une ville fantôme.

- Je vois rien dans le noir... Je suis mieux de repartir. Je vais aller voir Debbie.

- Oh, c'est comme tu veux.

Je lui tournai le dos, prêt à m'envoler. Mais juste avant, une lueur attira mon attention. Fronçant les sourcils, je marchai quelques pas dans sa direction, curieux. Télio me suivit.

- Y'as pas que les animaux qui sont nocturnes, dit Télio en me prenant le bras. Viens, y'a rien à voir là. Ce ne sont que quelques amis autour d'une bougie.

Je levai un doigt pour qu'il se taise. Malgré la noirceur presque totale, Télio le remarqua et s'arrêta de parler. J'entendis son souffle se saccader à mon oreille pendant une seconde ; il avait entendu ce que j'avais entendu. Ses quelques amis autour d'une bougie n'était pas si innocents que ce qu'ils auraient pu être.

- Je vois pas comment ou pourrait faire autrement, dit l'un. Ces foutus gamins sont invincibles. J'en ai tiré un dans le ventre et trois jours plus tard, il était déjà debout, tu imagines ?

- C'est moi, chuchota Télio à mon oreille. C'est le type qui m'avait tiré dessus à l'hôpital, quand on t'a fait sortir.

- Non, je te jure, continua un autre. On peut les tuer ! Tu te rappelles, cette nuit-là, quand ils se sont tous attaqués à Mikaël ? L'un d'entre eux est mort.

- Ouais, un seul. Ils étaient une dizaine, tu te souviens ? Un seul est mort, contre des dizaines d'entre nous. Nous étions tous armés, et eux, seulement quelques-uns.

- Faudrait utiliser l'effet de surprise, dit un troisième type. Au milieu de la nuit, on débarque chez eux, on entre dans leurs chambres...

- Les gardes nous laisseront entrer, dit le premier. Tom nous a peut-être renvoyés, mais les autres sont toujours nos amis. On n'aura qu'à dire que nous avions oublié quelques effets personnels.

- Faudrait qu'on soit au moins aussi nombreux qu'eux, pour qu'on puisse tous les tuer en même temps. Ils n'auraient pas le temps de répliquer.

- Ils sont combien, en tout ? Quinze, vingt ?!

- Si on est vingt, les autres ne nous laisseront pas entrer, ils se douteront de quelque chose. Faudrait qu'un seul d'entre nous entre par la grande porte, et qu'il aille ensuite ouvrir un autre passage...

- Quel autre passage ? Y'a une clôture tout autour de la maison. Le seul moyen d'entrer, c'est par la porte principale.

- On se construit une échelle, c'est pas plus compliqué que ça ! On pourrait tous passer au-dessus, même pas besoin que quelqu'un passe devant.

Il y eut un silence entre les trois hommes, alors qu'ils réfléchissaient tous à de possibles failles dans le plan. Je me risquai à passer la tête par le coin du mur pour les voir, et je sentis mon cœur se comprimer en les reconnaissant. Il y avait d'abord Peter, le garde qui m'avait dit que, si je ne reprenais pas les opérations, ce serait Debbie qui les subirait. Je ne connaissais pas le deuxième, mais je le reconnaissais son visage ; il était avec Peter à ce moment-là. Le dernier, c'était le père de Debbie. Je savais qu'il était un garde, ou au moins qu'il faisait partie de la ligue, mais à y repenser, je ne l'avais jamais vu en uniforme. Maintenant, au moins, je savais qu'il avait été renvoyé.

Miö (En Réécriture)Where stories live. Discover now