Miö (En Réécriture)

Chapitre 12 ✅

Quand j'ouvris les yeux, tout était flou. Il me fallut quelques secondes pour remarquer les premiers détails, comme Jeremy penché près de moi. Il n'avait plus son masque et je voyais ses lèvres remuer ; il parlait, mais qu'est-ce qu'il disait, au juste ? Je ne réussis qu'à capter la toute dernière partie : « Je suis désolé ».

Puis une douleur aigüe jaillit au centre de mon visage, me faisant monter les larmes aux yeux alors que je me retournais pour lui échapper.

— Tu m'as cassé le nez ! m'exclamai-je d'une voix pâteuse.

— Télio t'a cassé le nez, et je l'ai remis en place. J'espérais que tu demeurerais inconscient assez longtemps... Tu guéris trop vite, et si j'avais attendu, il aurait réellement fallu que je le casse à nouveau.

Jeremy me donna des mouchoirs que je plaquai sous mon nez qui pissait le sang. J'avais encore la grippe, je le ressentais par tous les moyens possibles, mais Jeremy restait toujours près de moi, sans craindre que je le contamine. Sans trop comprendre, je regardais autour de moi, et fus surpris de me rendre compte que nous étions tous les deux dans ma salle de bain personnelle, assis à même le sol. Jeremy était adossé à la baignoire.

— Qu'est-ce qu'on fait ici ?

— Télio nous a enfermés. Et là, il est probablement parti profiter du monde avec ton visage.

La colère me prit d'un coup et je me levai dans l'idée de défoncer la porte d'un coup d'épaule, mais aussitôt sur pied, ma tête se mit à me tourner, tout devint flou devant mes yeux. Jeremy m'attrapa fermement par le bras.

— Reste calme, Miö !

Je m'assis à nouveau, limite que je me laissai tomber. Ce simple geste avait réussi à empirer ma migraine.

— T'es pas en état de tenter quoi que ce soit. Et si tu sors, tu propageras la maladie dans la cité.

— Et toi, alors ? dis-je les dents serrées.

Jeremy secoua la tête en soupirant.

— Tu m'as contaminé depuis un petit moment, déjà. Depuis tout à l'heure, j'ai une migraine qui devient pire à chaque seconde qui passe. C'est probablement un coup de Télio, ça aussi... il a pris mon masque, dit-il en pointant son visage - il n'avait également plus ses gants. Et puis...

Jeremy frissonna en faisant la grimace ; ce qu'il m'apprêtait à dire devait certainement être très dégueu. Il en fallait beaucoup pour dégouter un docteur.

— Je me suis réveillé avec une boule de papier toilette dans la bouche, dit-il enfin.

Un haut-le-cœur me prit en réalisant qu'il parlait de cette même boule de papier sur laquelle j'avais bavé pendant toute la nuit.

— Télio devient pire à chaque fois que je le vois, marmonnai-je. À la prochaine étape, il va violer l'un des chiens du roi.

— On a le choix, dit Jeremy en se redressant légèrement. Premièrement (il leva un doigt en l'air), je peux toujours essayer de le retrouver, tant que la maladie ne m'affaiblit par encore. Mais si je ne fais que contaminer une seule personne sur mon chemin, c'est la pandémie, et tous les bébés et les ainés vont mourir à coup sûr, sans parler d'un bon nombre d'adultes également. Ou bien (il leva un deuxième doigt), on ne fait rien et on laisse Télio s'amuser. Et dans sept jours, maximum, tu seras rétabli, et tu pourras l'attraper.

— Je veux pas attendre tout ce temps !

— Miö, ça se joue entre ton bien-être, ou celui de tous les habitants de la cité.

Je croisai les bras sur ma poitrine, me recroquevillant dans mon coin en broyant du noir. J'avais envie de dire « j'emmerde tous les autres » et sortir pour mes propres plans de vengeance, mais il était fort possible que je me fasse regarder de travers.