Chapitre 23 ✅

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En un peu plus de deux longues heures de marche - le plus dur avait été d'endurer Samy qui ne s'arrêtait jamais de parler pour des sujets particulièrement stupides -, nous étions enfin arrivés à la fameuse grange.

C'était exactement comme je l'avais imaginé : mort.

Le grand champ servant certainement à la récolte de légumes n'était que de la terre, quelques timides pousses de plante sauvage pointaient çà et là. Les arbres autour de la propriété semblaient tous morts - la plupart étaient déjà tombés d'eux-mêmes, détruisant un coin de clôture qui délimitait le terrain. La petite maison à deux étages, à environ deux-cents mètres de la grange, avait subi un incendie, à ce que je voyais des murs tachés de suie.

La grange en elle-même semblait sur le point de s'effondrer. Le toit était concave, s'enfonçant par en dedans. Les murs étaient pliés comme une boite de carton qui aurait pris un coup. Les planches de bois qui la constituait n'avaient plus la moindre trace de peinture, laissant visible une couleur gris-noir, imbibée d'humidité.

— Je n'entre pas là-dedans, dit Samy en secouant vigoureusement la tête. Ça va nous tomber dessus.

— Je ne t'ai jamais demandé de me suivre, de toute façon. Reste ici avec Bernadette, moi, j'y vais...

Je sortis Bernadette de ma poche, qui dormait toujours à poings fermés, et la tendis à Samy, qui recula aussitôt de plusieurs pas en grimaçant.

— Je veux pas la toucher !

Je soupirai en levant les yeux au ciel, puis réveillai Bernadette en la flattant sur la tête. Elle s'étira en se suspendant à mon index, les ailes grandes ouvertes, puis s'envola pour aller explorer les lieux, pourchassant une libellule qui passait par là.

Je pris une grande inspiration pour un peu de courage, puis m'avançai vers la grange.

— Attends, Miö, dit Samy derrière moi. Tu devrais peut-être prendre ça...

Elle fit basculer son sac à dos sur son épaule, ouvrit la fermeture éclair et fouilla dedans quelques secondes.

— J'ai pas besoin de lampe torche, je sais me repérer avec mon ouïe.

— Je n'en doute pas, mais c'est pas ce que je voulais te donner. De toute façon, les piles sont trop rares pour les gaspiller en lampe torche ! Tiens, je l'ai trouvé.

Samy sortit de son sac un long vêtement noir, et il ne me fallut pas plus d'une seconde pour le reconnaitre ; ma combinaison. Ma mâchoire se décrocha en l'apercevant, aussi heureux que si je retrouvais un vieil ami, avant que la colère reprenne le dessus alors que je l'arrachai des mains de Samy.

— Qu'est-ce que tu fous avec ça ? Je croyais qu'elle était à la poubelle ! Ah, elle est comme neuve ; Télio disait qu'elle était déchirée de partout !

Samy eut un petit rire méprisant avant de s'expliquer :

— Tu devrais vraiment arrêter d'écouter tout ce que Télio raconte. Il l'avait caché dans ma chambre et je l'ai trouvé ce matin.

— Tu ne pouvais pas me la donner plus tôt ?

— J'avais peur que tu décides de partir sans moi.

Je pris sur moi pour m'empêcher de crier toute sorte de noms, essayant de me ressaisir. De toute façon, elle avait raison ; si j'avais pu me débarrasser de Samy sans la condition de me mettre à nue devant elle, je me serais envolé depuis longtemps.

J'allai vers la grange et me cachai dans un coin pour éviter le regard de Samy et enfilai ma combie adorée. Je gardai mes souliers au pied et, enfin, j'entrai à l'intérieur, prêt à toute éventualité.

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