Je suis là

#48 Va-ten

Deux heures du matin.

Et j'étais dehors. 

Oui. Moi, Park Sun Hee, j'étais dehors.

Fallait croire que j'étais dans ma période de rébellion depuis que j'avais connu Yoongi. J'étais bien évidemment sorti sans que mon père ne le sache.

Rébellion mon cul ouais.

Je marchais dans les rues de Séoul, longeant les quartiers, cherchant mon chemin.

Le message de madame Min m'avait quelque peu alerté. De là à ce qu'elle me demande de venir en pleine nuit, c'est qu'il devait vraiment y avoir un problème.

Hier, j'avais collé Yoongi comme jamais je ne l'avais fait. Je lui avais pansé ses blessures, soigné son visage, préparé à manger. 

Je ne savais pas comment communiquer avec les autres. On ne me l'avait jamais appris. Je ne savais comment réconforter. J'avais toujours été seule à pleurer dans ma chambre. Je ne savais pas comment donner de l'amour. Je ne savais même pas ce que c'était.

Comment pouvais je aider Yoongi, alors que je n'arrivais pas à me sauver moi même?

Je voulais tellement qu'il aille mieux. Qu'il oublie cette fille. Qu'il se pardonne et qu'il recommence à vivre.

Et devant la petite supérette non loin de chez lui, j'hésitais.

Je ne savais pas si je devais y aller. Je ne savais pas si je devais lui parler. Je ne savais même pas comment faire.

Dormait il? Allait m'ouvrir? Allait il même m'écouter?

J'allais le voir... Mais pour lui dire quoi?

Que tout allait rentrer dans l'ordre? Qu'il allait finir par surpasser ses problèmes? 

Est ce que j'allais vraiment lui dire ce genre de chose alors que je n'y croyais pas moi même? Yoongi n'était pas idiot. Il savait parfaitement cerner les gens. Il savait quand ils mentaient. Il savait quand ils hésitaient. Et je ne faisais pas exception à la règle.

J'allais le voir... Mais pourquoi?

Pour le regarder se détruire? Pour le voir se saouler? Pour le regarder pleurer?

Non. Je ne pouvais pas y aller. Qui étais je?

Personne. Je n'étais qu'une camarade de classe. Même pas une amie. Je n'étais qu'une étrangère à ses yeux. Et il devait probablement se dire que je n'étais qu'une gamine qui mettait son nez dans les affaires des autres.

Et hésitante, je rebroussais chemin. Je tournais le dos au bâtiment qui se tenait à présent devant moi. Et tout comme Yoongi faisait demi-tour devant cette gigantesque muraille, je fis demi-tour devant son immeuble.

Au même titre que Yoongi fuyait ses problèmes, je fuyais son regard.

Au final j'étais comme lui. Je ne regardais pas la réalité en face.

Mais j'avais si peur.

Parce que je comprenais parfaitement Yoongi. Parce que j'avais l'impression de me revoir en lui. Moi, quelques années auparavant. Parce que je savais que des paroles ne suffiraient pas à le résonner. Ça n'avait pas marcher avec moi. J'avais été voir une psy, j'avais fait parti de plusieurs groupe afin de parler de mes problèmes, mais la parole ne résolvait rien. Parce que ce je dirai à mon camarade, il n'avait pas besoin de l'entendre. Tout ce qui sortirait de ma bouche, il le savait déjà.

Et mes pieds se mirent en marche, cherchant à s'éloigner le plus possible de cet immeuble.

Espèce de lâche.