2

298 36 43
                                    

LUKE (aka bae)

Il me semblait qu'elle avait dit "vermillon", mais je ne pense pas qu'elle ait voulu parler de la couleur.

- Vaïyon ? demanda Léo. Le monde parallèle où tu as mené une guerre contre les démons et que tu as fui ?

- Je n'ai pas fui ! se défendit-elle. Je me suis exilée pour sauver la vie d'une amie. Et, au final, Susan n'a jamais tenu sa promesse et aujourd'hui, mon amie est morte. C'est une des raisons pour lesquelles je n'ai pas la moindre envie  de retourner au Château.

- Je suis désolé, déclarai-je.

Elle s'est retournée, le regard étincelant de haine. Je ne savais pas envers qui elle était dirigée. Envers cette Susan, Cronos, le monde entier, moi ou elle-même ?

- Je n'ai pas besoin de ta pitié, Luke.

Elle s'est concentrée, et a fait de grands gestes qu'elle a accompagnées de paroles incompréhensibles. J'ai cru qu'elle parlait "d'Espelette", mais je doutais qu'elle nous envoyait dans le monde du piment.

Elle a fait le geste de repousser, et un éclair doré a tourbillonné. S'en ai rajouté un deuxième, un troisième, et ainsi de suite.

- Dépêchez-vous d'entrer, tous ! Léo, t'es partant ?

- De nouveaux risques de mourir dans d'atroces souffrances ? Évidemment que je suis partant. Calypso ?

La blonde a souri.

- Ça peut être cool, comme première aventure.

Main dans la main, ils ont sauté dans le portail. Annabella a fait passer la trentaine d'enfants devant elle. Ils ont tous disparu, alors qu'elle gémissait sous l'effort que ça semblait lui demander.

- Je doute que les Chasseresses acceptent de te reprendre, haleta-t-elle en me jaugeant du regard. Passe, on avisera.

J'ai hoché la tête et senti qu'elle passait à ma suite, refermant le portail derrière elle.


ANNABELLA

Je n'avais aucune envie de retourner au Château, de revoir les couloirs où avait joué Julian, où j'avais ri et pleuré, que j'avais arpentés en long en large, tout en m'émerveillant de la beauté de l'endroit. Je l'avais quitté reine, je revenais en renégate. J'étais devenue une ennemie de Vaïyon, moi qui avait été leur représentante.

Mais un détail me taraudait : j'avais du rouvrir le Portail. Pourquoi avait-il été fermé ? Je ne comprenais pas. Que s'était-il passé pendant mon absence ? Sur Vaïyon, selon mes calculs, il était passé près de soixante-seize ans, et dix-neuf mois pour moi. Comment allait-on me voir ? Revenir après tant de temps pour sauver des gens qui n'étaient pas mon peuple ?

La salle du Portail commençait à se dessiner. Je sentais le pouvoir qui commençait à irradier autour de moi, et la fatigue qui m'avait habitée à cause de mes actes magiques commençait à me quitter.

Je distinguais des voix familières. Je me suis alors dit que même si j'étais une traîtresse, je ne pouvais pas apparaître en jean. Malgré tout, je restais le vestige d'une Suprême, et si je pouvais influencer le Conseil en me montrant telle que je l'avais été, alors j'étais prête.

La salle et les visages se sont affinés et nous sommes apparus. J'ai regardé l'homme qui lui-même me regardait d'un air ahuri. C'était un garde, mais aussi une vieille connaissance.

- Bonjour, Fritz, souris-je. Un plaisir de te revoir.

- Ma dame, balbutia-t-il en se multipliant en révérence. C'est à moi que revient tout le plaisir.

[TOME 4]L'Amour du TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant