Chapitre 38 : Réel

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Ça fait des jours que je n'ai pas correctement dormir. Ça commence à être plus dur que ce que je pensais. Mais je survis, à ce que je vois. Je suis vivante, apparement ; pas totalement consciente, souvent à moitié somnolente, mais bien vivante.

Même là, courant sous la pluie acharnée, je ne suis pas complètement éveillée.

Prenant enfin ma pause, épuisée, à moitié chancelante et à moitié réveillée, je marche le long des rues, me dirigeant inconsciemment vers celles qui me sont familières, des rues plus populaires, remplies de gens.

Je traîne sans but, portant avec moi mes heures de sommeil manquées et mes jambes qui semblent peser deux tonnes.

Et puis, soudain, je l'aperçois.

Et il est là, plus beau que jamais, plus seule que jamais, plus maigre que jamais, mais il est là : même si j'ai l'impression qu'il risque de s'évaporer à chaque seconde.

Juste devant moi. Et je n'arrive pas à y croire.

Il s'est évaporé si vite, il s'est évaporé quand j'ai voulu l'attraper, mais finalement, je le revois.

Enfin.

Alors je cours comme si ma vie en dépendait : je dois le rattraper.

Il est juste devant moi.

Et j'ai encore l'impression de courir : alors que je ne suis même pas essoufflée, alors que je ne marche même pas. Je cours, je cours mais je n'atteint pas sa main. Je ne le touche même pas. Je suis juste derrière lui : il fait froid, il a sa capuche grise sur lui, ses écouteurs blancs.

Je cours, et je cours encore et encore pour l'atteindre. Le souffle coupé, les cheveux et les habits ruisselants et imbibés d'eau, je ne m'arrête pas. Le froid est ma musique : je courrai encore longtemps peut-être : il me semble.

Je lève la tête dans sa direction, je le regarde droit dans les yeux, je serre un bout de mon pull, et je dis :

''Je t'aime''

C'est un cri silencieux. J'ai l'impression de m'être égosillé, j'ai l'impression d'avoir pleuré, j'ai l'impression de l'avoir retrouvé.

Je voulais juste voir ton visage à nouveau, une dernière fois.

Tu es le seul et l'unique dans mon coeur.

Du violon.

Du piano.

Sa voix.

Puis, le silence.

J'ai l'impression que c'est ce qu'il s'est passé.

Le violon, notre rencontre.

Le piano, mon amour.

Sa voix, sa présence.

Le silence, sa disparition.

Notre histoire.

La fin, c'est ça. Ce que je suis en train de vivre au moment présent.

Ça pourrait être le début de quelque chose d'autre s'il le voulait, mais je ne veux pas risquer y croire : ça ferait trop mal. Ça serait trop dur.

Peut-être que je m'étais trompée. Peut-être qu'il n'y aurait pas d'après.

Pourquoi ?

Il me regarde comme si tout était normal. Pas une once de surprise, pas une once de joie, pas une once de colère.

Ne me regarde pas comme ça.

Don't go - Jeon JungkookWhere stories live. Discover now