.Le retour à la maison fut étrange. Le salon, désormais réparé des dégâts causés par l'affrontement, respirait le propre et la lessive. Pourtant, un vide tenace flottait dans l'air, le manque d'un petit cri, le manque d'Haneul.
La neige avait fondu, emportant avec elle la brutalité de cette nuit d'urgence, mais l'atmosphère restait lourde.
Minho et Jiwon s'étaient efforcés de reprendre une routine. Sur l'insistance de Jennie et Taehyung, Minho avait annulé ses cours pour la semaine. Ils passaient leur temps à des tâches insignifiantes : plier de minuscules bodys, réorganiser la chambre d'enfant, et surtout, appeler la néonatologie toutes les deux heures.
« Son poids est stable, » disait Jiwon, les yeux rivés sur son téléphone après chaque appel. « Elle a pris deux grammes aujourd'hui. C'est bien, non ? »
« C'est excellent, » répondait Minho, même si son cœur se serrait à chaque gramme compté.
L'anxiété n'était pas seulement centrée sur Haneul. La mère de Jiwon, Dian, restait avec eux, et leur père adoptif, Taehyung, avait installé un système de sécurité sophistiqué autour de la maison. La police était passée, prenant des notes sur le père fugitif. L'homme était introuvable, et cette absence créait une tension sourde, le sentiment d'être constamment surveillés.
Un après-midi, pendant que Dian faisait la sieste, Minho trouva Jiwon assise dans la chambre d'Haneul, fixant le berceau vide.
« Tu penses encore à ce qu'elle t'a dit ? » demanda-t-il doucement, se glissant derrière elle pour l'entourer de ses bras.
Jiwon hocha la tête. « Ça change tout, Minho. Le monstre qui m'a terrorisée n'était même pas mon sang. J'ai l'impression d'être en colère, mais aussi soulagée. Ce n’est pas mon héritage. »
« Non. Ton héritage, c'est ta force, » répondit Minho, embrassant son cou. « Et l’héritage d'Haneul, c'est nous. Ce que nous allons lui donner. »
Ils passaient leurs journées entre ces moments de tendresse fragile et les visites à l'hôpital. La néonatologie était un monde à part : silencieux, rempli du bourdonnement des machines et du souffle léger des bébés prématurés. Voir Haneul, si petite dans sa couveuse, était à la fois un réconfort et un supplice.
Minho tentait de la toucher, de lui parler, de lui donner l'amour qu'elle ne pouvait pas encore recevoir entièrement.
Pendant l'une de ces visites, ils croisèrent Jennie, qui venait voir Jisoo. Elle avait l'air fatiguée, mais déterminée.
« Jisoo a traversé sa première vraie crise de nausée. Elle est forte, mais ça va être difficile, » expliqua Jennie, les yeux embués. « Jin est un saint. Il est là, jour et nuit. »
Minho et Jiwon se regardèrent. Leur propre drame, centré sur la vie naissante, contrastait avec celui de Jisoo, centré sur la lutte pour la maintenir. Ils se sentirent égoïstes d'être si absorbés par leur attente.
« On va aller la voir. Juste cinq minutes, à travers la porte, » dit Jiwon. « On doit lui montrer qu’on pense à elle. »
Ils firent le détour vers le service d'oncologie. À travers la petite fenêtre vitrée de la porte de la chambre de Jisoo, ils aperçurent Jin, dormant assis sur une chaise, la main serrée autour de celle de sa femme. Jisoo, pâle et amaigrie, souriait faiblement en regardant son mari. C'était une image de résilience tranquille.
Minho et Jiwon ne dérangèrent pas. Ils se contentèrent d'échanger un regard avec Jennie, puis repartirent. Ils n'étaient pas seuls dans leur lutte, et cette vérité était le seul antidote contre le temps suspendu de l'attente.
La maison était plongée dans le silence. Les enfants, après avoir été rassurés par la présence de tous dormaientpaisiblement dans leur chambres, Diane égalementavait rejoins les bras de morphée, dormant profondément après avoir pris un calmant qui l'aida. Minho et Jiwon étaient enfin couchés, épuisés par leur visite à l'hôpital.
Jennie et Taehyung étaient restés dans le salon. Une fois de plus, Taehyung s'attelait à vérifier le système de sécurité. Le simple clignotement des lumières de la caméra extérieure était devenu un bruit de fond angoissant.
Jennie était assise sur le canapé, une tasse de thé froid entre ses mains. Elle n'avait pas pleuré depuis l'accouchement, s'étant concentrée sur le fait d'être forte pour Minho, pour Jiwon, et surtout pour Jisoo.
Mais maintenant, le silence lui pesait.
« Tu ne t'arrêtes jamais, » murmura Jennie, observant Taehyung.
Taehyung se retourna, son visage grave.
« Je ne peux pas. Pas tant que ce type est en liberté. La police fait ce qu'elle peut, mais… notre famille a été attaquée, Jen. Je ne veux pas que ça se reproduise. » Il posa son téléphone et vint s'asseoir à côté d'elle.
« Et toi ? Tu as l’air d'être à bout. »
Jennie posa la tasse. « Je suis fatiguée d'être forte, Tae. J'en ai assez. »
Elle prit une grande inspiration, mais la digue céda. Les larmes, refoulées depuis la nuit de l'urgence, jaillirent.
Elle se couvrit le visage de ses mains, sanglotant bruyamment, une décharge émotionnelle brute et incontrôlée.
« C'est trop, » parvint-elle à étouffer. « Minho et Jiwon sont si jeunes.
Haneul se bat pour respirer dans cette couveuse, et je n'arrive pas à me réjouir. Et Jisoo… elle commence son calvaire, et je suis ici ! »
Taehyung l'attira contre lui, la serrant fermement. Il comprenait. Jennie était le pilier de leur cercle, la "Grande Sœur" du groupe, et elle ne s'était pas permis de faiblir.
« Je devrais être là-bas, avec elle, la tenir quand elle vomit, » continua Jennie, sa voix pleine de culpabilité. « Mais Jiwon a besoin de moi, Dian a besoin de moi, les petits sont traumatisés… Je suis coupée en morceaux, Tae. Je ne peux aider personne correctement. Je ne suis pas une assez bonne amie, ni une assez bonne mère encore moins une belle-mère. »
Taehyung attendit qu'elle se calme, caressant doucement ses cheveux. « Écoute-moi. Tu as fait le plus dur. Sans toi, Minho et Jiwon auraient perdu la tête. Sans toi, Jisoo n'aurait pas eu le courage de commencer la chimio. Tu as géré deux catastrophes en même temps, Jen. Tu n'es pas coupée en morceaux ; tu te multiplies. »
Il souleva son menton, forçant ses yeux à rencontrer les siens. « Et ce que tu fais, c'est choisir où tu peux faire le plus de bien. Tu as mis ta mère avec Jin. Tu nous as demandé de nous reposer. Tu as orchestré tout ce soutien. Tu es le roc, et même le roc a le droit de craquer de temps en temps. Pleure, ma chérie. Je m'occupe du reste. »
Le réconfort de Taehyung, simple et total, permit à Jennie de libérer le reste de sa tension. Elle pleura pendant de longues minutes, la fatigue accumulée s'échappant enfin.
« Je veux juste que tout redevienne normal, » murmura-t-elle, essuyant ses larmes.
« On va y arriver, » répondit Taehyung, l'embrassant sur le front. « Pas normal. Mais nouveau. On va reconstruire. Et on commence demain. »
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P È R E P A R A C C I D E N T //2
FanfictionTout ne peut pas être si rose dans la vie, faudrait bien qu'il est encore des gens pour tout gâcher.
