Serial Lover [Romance]

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Laëticia Dubois, élève de première au lycée de la Little City ; elle aime ses potes, la danse et la musique, a des parents fraichement divorcés et un cœur bien accroché vu les antécédents qu'était son passé. Le mec, c'est Paul Bertrand, le petit Bourge du quartier chic – selon les faits de Millie, donc à moitié fiable – qui est in love de Laetitia depuis ses 11 ans. Ils sont tous les deux en première 3, mais jamais à côté en cours pour éviter de trop s'incruster dans la vie de l'autre.

— Franchement, leur histoire, c'est un délire pas possible, soupira Louis, qui s'était infiltré en tant qu'espion dans cette mission de recherche d'information.

— Tu ferais mieux de pas t'en mêler, ajouta Millie en se jetant presque sur sa chaise. Paul est intouchable : si tu oses juste le frôler, t'auras toute sa famille et tous les vieux sur le dos pour genre... toute ta vie.

— Mais la pauvre, quand même..., répondit d'un ton las Alix. Elle me demande de l'aide, je peux pas la laisser en plan.

— On t'aura prévenu ! lancèrent de vive voix ses deux amis.

Elle vit leurs silhouettes rieuses disparaitre dans la pénombre du couloir, et s'enfonça dans son siège de plus belle. La sonnerie grésilla bruyamment dans le haut-parleur, et Alix eut un mouvement de recul avant de quitter la pièce, son sac et sa veste commençant déjà à glisser sur son épaule.

***

Alix griffonnait distraitement quelques mots sur son cahier en tentant de retenir ses innombrables bâillements. Elle avait passé la journée à tenter de trouver la formulation parfaite pour son message, et ne savait pas où elle pourrait bien trouver le temps de stalker la pauvre fille. À moins que...

— Monsieur ? lança Alix en glissant discrètement son portable dans sa poche. Je peux aller aux toilettes ?

Le vieil homme bougonna un instant, puis accepta d'un hochement de tête fatigué. La jeune fille fit grincer sa chaise en se redressant, puis traversa rapidement le couloir. Les lumières automatiques s'allumaient sur son passage, et laissaient échapper un sursaut de surprise à chaque fois. Le silence régnait au sein de cette pièce pourtant souvent bondée : seuls quelques bavardages lointains – probablement des sécheurs – parvenaient à ses tympans. Elle bifurqua une dernière fois avant de pousser la porte qui avait visiblement mal vieilli, bloquant un instant contre les charnières rouillées. D'un pas peu assuré sur ce sol mouillé et boueux, elle s'avança jusqu'à une cabine et sortit son téléphone. Son code, Insta, le compte... Yes ! Qu'est-ce qu'elle était bête... Laetitia avait envoyé le message avec son compte perso, elle avait donc accès à sa bio, ses postes... et au compte de Paul ! Un cri de joie faillit presque lui échapper. Avant de toucher à qui que ce soit, pourquoi ne pas juste demander l'avis de l'autre personne ? Mais avant tout, il fallait demander à la première concernée. Question de respect.

***

Ses doigts tapotaient son jean alors que son bus arriverait enfin devant le lycée. Elle salua le chauffeur et gagna une des places les plus au fond pour faire ses recherches tranquilles durant les 45 minutes de trajet. Il aurait peut-être été plus judicieux de réviser... Mais non, les cours passaient après. Et puis, elle n'avait que 2 évals la semaine d'après...

Elle eut beau fouiller, aucune info sur les soucis de la relation entre les deux tourtereaux n'avait été délivrée : que du beau, du fake, des photos de restos chic ou de belles lumières. Parfois, Laetitia postait des playback de chansons de rupture, mais c'était bien tout. Quel casse-tête, cette affaire ! Alix bloqua un instant, puis commença à taper le long message qu'elle avait rédigé avec patience dans sa tête toute la journée. Les mots s'alignaient avec aisance, la ponctuation aérait ce long pavé qui ressemblait à une dissertation d'histoire. Un début, un milieu, une fin : et voilà, son message partait dans les datacenters pour y rester à tout jamais ; alors que le téléphone de Laetitia venait de discrètement vibrer dans sa poche arrière. Le SMS, pourtant long, était clair et précis : des questions, des conseils, des signes, une main tendue pour une possible aide à quitter la personne. Au final, une autorisation pour parler à Paul, et des renseignements complémentaires disponibles sur certains sites. La jeune fille échappa un sourire, pensant à son cerveau qui agissait comme ChatGPT. AlixGPT, ça sonne bien, nan ? Elle prit le temps de retoucher quelques détails insignifiants de son compte, et quitta le bus d'un pas pressé. Le trajet retour était le même que l'aller, et son casque n'avait pas supporté que l'adolescente ait oublié de le faire charger. Visiblement revanchard, il s'était donc éteint en clignotant de sa LED rouge, comme pour rappeler à Alix : "Eh ouais ! Tu me traites mal, je te laisse en plan !"