Serial Lover [Romance]

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Alix s'était toujours posé la question de savoir pourquoi l'on ne se souvenait pas du moment où l'on plongeait dans les bras de Morphée, et avait toujours tenté de deviner ce que l'on pouvait ressentir au moment d'éteindre l'étincelle qui nous laissait éveillés. Se sentait -on plonger dans un néant, ou alors n'était-ce juste qu'une sensation de partir loin ? Au fond, la sensation de s'endormir ne serait pas pareille que de mourir ? L'on part ailleurs, dans un néant dont personne n'a conscience et où l'on visite des lieux insolites que crée notre imagination. S'endormir, pour Alix, c'est toujours prendre un risque : se laisser emporter par la brise froide de la mort.

Elle ne peut le nier : la mort de sa mère lui a apporté un renouveau, mais aucun bien. Juste un néant dans le cœur, comme celui dans lequel on plonge en dormant. Même enfant, les soucis de sommeil la frappaient : mais maintenant, c'est la peur qui règne et qui bloque son sommeil déjà amaigri.

S'endormir comme l'adolescente l'avait fait la veille au soir se plaçait comme un véritable exploit à ses yeux. La fatigue lui semblait loin, cachée derrière le trop-plein d'énergie que le sommeil lui offrait. Dès que son réveil bourdonnant crissa dans ses oreilles, la jeune fille se redressa tel un robot et observa son ordi encore flou. Elle secoua la tête, soupira en pensant maintenant que le PC ne s'était nullement éteint de la nuit, et fila en vitesse sur la conversation avec Antonin.

Une réponse s'affichait dans un bleu clair, un court message de sa part. Il expliquait qu'il ne lui en voulait pas, qu'il sentait qu'elle s'éloignait et qu'il s'y attendait. Pile la réponse qu'Alix avait prévue. Satisfaite, la travailleuse de fortune se prépara en vitesse, ayant oublié durant longtemps le fait de ne pas avoir le temps pour toute sa toilette. Elle grommelait des "merdres" en enfilant sa veste en quatrième vitesse, alors que son portable émettait le son répétitif de la sonnerie d'appel. Maddie ne daigna répondre qu'au bout de la cinquième, ce qui énerva avec légèreté Alix.

— Ouais Alix ? Il a répondu ?

Sa voix grésillait légèrement dans le haut-parleur.

— Yes, il t'en veut pas et t'attend. Il m'a dit de te souhaiter de sa part une belle vie. Un peu niais mais bon, ça se fait pas de pas te le dire. Bref, t'es libérée !

— Aaah merci Alix, t'es la meilleure, scanda la jeune fille au bout du fil. Je pourrai voir ce que tu lui as envoyé ? Franchement, j'aime pas trop Millie mais pour une fois elle a raison : t'as des supers pouvoirs.

Gênée par ces compliments, l'adolescente préféra saisir sa chance de changer de sujet.

— D'ailleurs, pourquoi t'aimes pas Millie ?

— C'est compliqué... se connaît depuis mon arrivée en 3ᵉ. Mon ancienne meilleure amie était scolarisée dans le collège, et elle était liée d'amitié avec Millie depuis presque 3 ans. Ça ne me dérangeait pas, mais ta pote ne me laissait jamais approcher d'Ambre, alors j'ai juste capitulé. Ambre, elle avait choisi Millie, et moi j'ai juste arrêté, je pouvais plus les blairer. Mais elle est partie étudier dans un lycée pro, la totale, et au final nous a abandonnées toutes les deux.

— Sauf que tu peux pas pardonner Millie, tenta de deviner l'étonnée.

— Ouais. Alors elle a changé, hein, et avec les autres elle est hyper cool et gentille... Mais faut pas toucher à ses amis, sinon elle te tue presque. T'es dead.

— Bon... Je suis désolé de ce qui s'est passé. Ça a dû être grave dur.

— Nan t'inquiète, mais n'en parle à personne s'te plait. C'est pas un truc que je raconte à beaucoup de gens. On se voit en cours ?

— Ouais, à toute !

Maddie coupa l'appel, laissant Alix de marbre. Elle se sentait coupable d'avoir posé une question si personnelle à son interlocutrice. Avait-t-elle réellement bien fait de résister à la tentation ?