Chapitre 31

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La journée d'hier a été éreintante, mais je sais d'avance que celle d'aujourd'hui sera similaire. C'est la dure loi de la rééducation. Si je veux un jour sortir de cet hôpital et surtout reprendre une vie normale sans déambulateur, je suis obligée de serrer les dents. Heureusement, je m'entends bien avec mon équipe de rééducation alors le temps passe plus vite et la motivation bien plus importante.

Alors que je me prépare à partir vers ma deuxième de séance de torture en l'espace de deux jours, David me reprend à l'ordre.

- Tu n'aurais pas oublié quelque chose ?

- Le déambulateur je suppose ? soufflé-je

- Exactement. Je travaille avec tes acquis. Et pour l'instant, ce qui est déjà très bien pour quelqu'un dont le cerveau a été privé d'oxygène aussi longtemps, c'est de marcher avec un déambulateur. Quand le kiné me donnera l'autorisation de marcher sans, on le fera.

Roh, il n'aime vraiment pas le goût du risque... J'aimerais tellement pouvoir marcher sans... Mais je sais que je risque de me croûter en cinq secondes chronos, et me casser une jambe n'est certainement pas une bonne idée pour sortir d'ici rapidement !

Camille est à mes côtés et j'avoue que je lui en suis très reconnaissante. Je ne sais pas comment elle fait pour être si présente, mais je la suspecte de ne plus passer de temps à discuter avec ses élèves à la fin de l'heure. Elle doit certainement prendre sa voiture dès qu'elle a le moindre creux sur son emploi du temps et corriger ses copies très tard le soir. Je vois à quel point elle essaie de se rattraper pour ce temps où j'ai désespérément attendu qu'elle prenne cette foutue décision concernant notre couple. Elle à l'air de penser que mon séjour à l'hôpital et surtout l'état critique dans lequel je suis arrivée est de sa faute, mais elle se trompe. C'était à moi de prévenir tout de suite, je savais que j'avais un risque bien plus grand que la moyenne de faire un pneumothorax et surtout, qu'il serait grave. Comme d'habitude, j'en ai fait qu'à ma tête et me voila maintenant à marcher avec un déambulateur comme si j'avais 95 ans, deux prothèses de hanches et des genoux en vrac.

Nous nous élançons tous les trois pour une petite marche de quinze minutes. Plus je marcherai chaque jour, mieux je récupérerai, c'est logique. Bien entendu, il faut que j'écoute mon corps et que je n'en fasse pas de trop. Je vois du coin de l'oeil que Camille à l'air inquiète et j'aimerai de tout coeur la rassurer, mais je sais que mes jambes tremblent au moindre pas et que la fatigue se lit sur mon visage alors mentir ne servirait à rien. Elle m'encourage et me soutient comme elle le peut puis, nous nous asseyons sur un banc pour faire une petite pause. David, remarquant sans doute que je ne risque pas de chuter, propose à Camille de me ramener seule, et après son accord, nous salue et nous laisse toutes les deux.

- Tout va bien ? me demande-t-elle en passant sa main sur ma joue.

Elle ne se rend pas compte que mes jambes de coton tremblent encore plus à son contact... Heureusement que nous sommes assises.

- Ça va... Mais j'aimerais pouvoir me débarrasser de ce déambulateur de misère. Je ne suis pas libre de mes bras. J'aimerais pouvoir marcher en te tenant la main...

- Ça viendra, laisse-toi du temps, me rassure-t-elle en plaçant sa main dans mon dos, écoute ce qu'a dit David, tu te débrouilles plutôt bien. Il faut que tu restes positive.

Elle embrasse ma joue avec cette tendresse qui la caractérise puis me prend dans ses bras. Ses gestes d'affection, d'amour me touchent beaucoup, mais je sais aussi que nous sommes dans un établissement public où un élève du lycée pourrait nous surprendre. Me faisant violence, je recule un peu pour remettre un espace convenable entre nous.

- C'est facile à dire, ce n'est pas toi qui utilises un déambulateur comme une grand-mère. C'est pourtant plus de ton âge que du mien, bougonné-je

- Eh ! Je suis pas si vieille, s'esclaffe-t-elle en me tapant le bras de son poing. Ton sens de l'humour lui fonctionne toujours aussi bien à ce que je vois ! Bon, on y retourne ?

L'amour a ses raisons que la raison ignoreWo Geschichten leben. Entdecke jetzt