Chapitre 16

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Alors que nous devions nous embrasser, parce que oui, je suis maintenant certaine que c’est ce qui allait arriver étant donné ses yeux fermés et sa main sur ma joue, elle court vers les toilettes. Qu’est ce qu’il se passe. Je la suis et la retrouve au-dessus de la cuvette, en train de vomir toutes ses tripes. Eh merde, si nous n’avions pas bu ce verre en trop, nous aurions peut-être franchi le pas… Je n’ai pas vraiment le temps d'y penser ni de regretter quoi que ce soit et essaie tant bien que mal de savoir si tout va bien.

- Madame ça va ?

Aucune réponse, elle n'est pas sortie des toilettes mais j'entends des sanglots. Elle n'est quand même pas en train de pleurer à cause de moi ?...

- C… Camille vous allez bien ?

L'appeler par son prénom me procure encore une fois des picotements dans le bas ventre. J'aimerai pouvoir l'appeler comme ça tout le temps, je ne veux plus l'appeler Madame, je ne veux plus l'appeler par son nom de famille ni la vouvoyer. Camille…. C'est un si joli prénom… A l’entente de son prénom, je vois qu’elle redresse la tête, visiblement surprise de mon audace et que ses pleurs se font plus importants. Pourquoi pleure-t-elle ? Ce n’est quand même pas parce que je l’appelle par son prénom… Je me décide à appeler le Dr Martin. Après tout, c'est sa meilleure amie et elle viendra sûrement l'aider. Heureusement j'ai son numéro de téléphone inscrit sur ma fiche de rendez-vous à l'hôpital pour mon père. Après quelques instants, elle décroche et je lui explique la situation. Elle me dit qu'elle arrive au plus vite  mais qu'il lui faudra une cinquantaine de minutes.

Venturini finit quant à elle par sortir des toilettes et me saute dans les bras tout en pleurant. La proximité qu’il y a entre nous depuis plus d’une heure maintenant me déstabilise complètement. J'aimerai apprécier simplement le moment, mais savoir qu'elle agit comme cela à cause de l'alcool et de sa peine gâche clairement la fête qui se prépare dans mon ventre.

- Elle m'a trompé Alix, avec une dizaine de personne  ce n'est qu'une salope.

Ouch, je ne m'attendais pas à ça. L’entendre utiliser ces mots vulgaires me surprend. Elle qui d’habitude fait toujours attention à la moindre phrase… ça me fait mal de la voir dans une telle détresse. Parler de sa femme avec elle n'est pas vraiment le sujet de conversation que j'ai envie d'aborder non plus, mais d'un autre côté, c'est aussi à cause d'elle que Venturini est dans cet état depuis une semaine, je ne peux pas faire la fille vexée.

Je resserre mes bras autour d'elle et lui propose de s'asseoir.

Comment peut on faire autant de mal à une femme comme ça ? Elle est gentille, à l'écoute, drôle, bienveillante, toujours souriante et en plus c'est sûrement la plus belle femme qu’il m’ait été donné de voir. Je continue à caresser son dos en guise de réconfort et ses yeux bleus se posent à nouveau sur moi. Son regard est intense, ses pupilles dilatées et je n’ai aucun doute sur le fait qu’elle désire autant que moi ce qui a failli se produire avant qu’elle ne court au toilettes.

Si je nous écoutais, je lui sauterais certainement dessus pour l’embrasser, mais il est hors de question que notre premier baiser ait lieu dans ces toilettes miteuses, qui plus est avec tout cet alcool dans le sang. De toute façon Venturini ne se rappellera sûrement pas de toute sa soirée et il m'est impossible de l'embrasser sans son consentement. Je veux que le jour où ça arrive, parce que maintenant j'y crois, ce sera parce qu'elle l'aura décidé.

Je me lève pour aller lui chercher un verre d'eau et elle m'attrappe le bras.

- Ne me laisse pas, ne m'abandonne pas, sanglote-t-elle les yeux apeurés.

Eh bien, elle a vraiment l'alcool triste, j'espère qu'elle ne boit pas trop souvent. Mais avec ce qui vient de lui arriver, je pense qu'elle a le droit à une bonne cuite.

L'amour a ses raisons que la raison ignoreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant