UNDERSHADE

Chapitre 25

Harmony

Je suis assise sur la marche devant le seuil de notre porte. Je fixe un point dans le vide sans vraiment voir ce qu'il se passe autour de moi. Après qu'Aedan soit venu me délivrer, tout s'est passé très vite. Il s'est agité dans tous les sens pour attacher tous nos voisins présents dans le sous-sol, bien que certains soient trop blessés pour aller où que ce soit. J'ai d'ailleurs dû le tempérer, car il voulait dans un premier temps leur sectionner un tendon d'Achilles pour être sûr qu'aucun d'eux ne s'échappe.

Finalement, leur ligoter les mains avec tout ce qui pouvait faire office de corde s'est avéré suffisant. La police est intervenue dans la demi-heure et les autorités d'Undershade ont suivi au compte-gouttes. Ce sont d'abord les hélicoptères qui sont arrivés, puis les fourgons.

Ma hiérarchie a pris les choses en main et une ambulancière a proposé de m'examiner à l'extérieur. Mis à part des écorchures aux poignets et aux chevilles, je n'ai rien de grave. Depuis, je regarde tout ce beau monde se mouvoir autour de moi sans réagir, les fesses posées à même la pierre froide. Nos voisins ont été arrêtés, du moins, les policiers les ont tous embarqués, et j'ai remis l'enregistreur à une personne de l'agence.

Aedan revient vers moi, il s'est chargé de tout gérer et tout leur expliquer. J'en suis pour l'instant incapable.

— Rentrons, me propose-t-il. Il commence à se faire tard.

En effet, la nuit domine déjà partiellement le ciel.

Je me lève tel un automate et pénètre dans la maison qui ne sera bientôt plus la nôtre. Je suis contente que cette mission prenne fin, mais une part de moi regrette d'abandonner ce « chez soi ».

J'ai toujours eu conscience qu'il s'agissait d'un jeu de rôle, que ce n'était pas réel. Néanmoins, je ne peux nier l'importance de certains moments que j'ai vécus entre ces murs.

Lorsque le mufle ferme la porte et que nous nous retrouvons isolés du vacarme extérieur, je lâche un soupir éreinté. J'ai traversé suffisamment d'épreuves en une seule journée et j'ai dû affronter un grand nombre d'émotions sur un laps de temps beaucoup trop court. Hier encore, j'étais au septième ciel avec Aedan avant d'être la confidente de son terrible passé.

— J'ai eu un contact avec la directrice. Ses subordonnés vont avoir du boulot, ils vont passer plusieurs jours ici avec les enquêteurs. Ils ont déjà trouvé des corps enterrés dans une autre partie du sous-sol, m'explique-t-il.

— Il doit y avoir celui de Jessica et de son mari.

— Sûrement, la police scientifique est déjà sur le coup.

Il marque une pause et laisse le silence régner dans la pièce quelques secondes. Il finit par reprendre :

— L'ensemble des adultes ont été arrêtés. Les enfants ont été envoyés chez d'autres membres de leur famille. Grâce au journal de Jessica, les cadavres et ton enregistrement, ils sont cuits. La justice va donc prendre le relais.

— C'est fini ? On rentre ?

— Oui, demain matin à la première heure. Un fourgon de l'agence nous suivra.

J'acquiesce d'un signe de tête. Il jette une œillade à mes poignets bandés. Lui, il n'a rien aux poings. Ses phalanges sont éraflées et rougies, mais rien de plus. Il a eu de la chance, pour le même prix, il se cassait les doigts.

— Je vais faire nos bagages. Repose-toi.

Il disparaît ensuite à l'étage. Il est vraiment incapable de s'arrêter de bouger.