Chapitre 24

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Harmony

L'esprit dans le brouillard, j'ouvre les yeux. Je dois battre plusieurs fois des paupières pour que ma vue devienne nette. Au fil des secondes, mes idées s'éclaircissent et les brumes de l'inconscience se dissipent. Ma mémoire se réveille et mes souvenirs me percutent comme une balle contre un poteau.

Madison qui sonne à la porte. Moi qui ouvre. Un tissu sur ma bouche. Les ténèbres.

Une douleur non identifiée m'oblige à tourner la tête sur le côté. Je constate avec horreur que je suis attachée, les bras et les pieds écartelés. Les liens métalliques qui m'enserrent les poignets et les chevilles me blessent la chair.

La panique déclenche une décharge d'adrénaline dans mon corps et me fait oublier le froid qui me mord la peau. La pierre sur laquelle je suis allongée est glacée.

Ma première réaction instinctive est de me débattre. Je me tortille pour essayer de me libérer, mais en vain. Je ferme les yeux quelques secondes et respire lentement. M'acharner de la sorte ne me mènera à rien. Je dois réfléchir, garder mon sang-froid.

Mais je suis attachée dans une...

Dans une quoi ?

J'inspecte la pièce du regard autant que ma position me le permet. Le plafond, les murs, le sol. Tout est fait en pierre. Je remarque que celle-ci a été autrefois taillée, mais avec le temps, elle s'est émoussée. Des gravures étranges ornent les façades de ce que j'identifie comme être un sous-sol. À gauche de l'espèce d'autel sur lequel je suis étendue se trouve une statue d'une femme couverte de fleurs et de feuilles sculptées dans la pierre. Elle a les bras écartés, prête à accueillir les pauvres âmes comme la mienne. Contrairement au reste du décor, elle semble entretenue. Aucune poussière ou toile d'araignée ne gâche son corps parfaitement lisse.

— Tu es réveillée, lance une voix qui hante maintenant mes cauchemars.

Annie.

Je tourne la tête dans sa direction tandis qu'elle s'approche de moi.

— Libère-moi.

Cette demande est stupide. Si elle, et probablement les autres habitants du quartier, ont pris la peine de m'attacher ici, ce n'est certainement pas pour me délivrer. Toutefois, la situation m'empêche de réfléchir correctement.

— Je ne peux pas. Notre Divine Nature a parlé.

Elle lève les yeux vers la statue. C'est donc la représentation de leur divinité.

Je respire un bon coup. Si je veux espérer qu'elle me libère, je dois rentrer dans son jeu, me montrer conciliante.

— Et qu'a-t-elle dit ?

J'essaye d'aborder une expression aussi émerveillée que celle d'Annie. Elle croit vraiment à ce qu'elle dit.

— Qu'il était temps de te sauver. Elle a entendu ta souffrance et elle veut t'en délivrer.

Je me fais violence pour étirer un sourire béat. À l'intérieur, mon rythme cardiaque s'affole. Misère, je dois vraiment m'échapper d'ici.

Soudain, un flash me traverse l'esprit. L'enregistreur.

Il est toujours dans mon décolleté. Je ne l'ai pas éteint quand j'ai ouvert la porte à Madison, trop affolée. Avec un peu de chance, il fonctionne encore, ce qui veut dire que toute notre conversation est enregistrée.

D'après la directrice, il manquait des preuves concrètes pour relier les habitants du patelin à des activités dangereuses pour la vie d'autrui. Malgré ma position délicate, c'est le moment idéal pour en apprendre plus et obtenir des éléments qui confirment leur culpabilité. Je vais donc réaliser ce que je fais de mieux : interroger des criminels.

UNDERSHADEOpowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz