Chap 60 : pdv Mr Herbert (présent)

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   Monsieur Herbert aurait voulu ne jamais la connaître.

Peut-être que s'il ne passait pas sa vie à la fenêtre, il n'aurait jamais croisé son regard aimable, peut-être qu'Hailie n'aurait jamais bouleversé son quotidien.

Elle lui avait donné de l'importance, un peu de bien-être dans sa vieillesse esseulée. L'espace de quelques mois, il avait oublié sa pathétique petite vie.

Mais maintenant qu'elle n'était plus là, il n'y avait pas une journée sans qu'il ne pense à elle. Lui seul savait ce qu'il lui était arrivé et garder ce secret tout au fond de lui le tourmentait.

Il avait voulu en parler avec Loélia, la gentille dame qui venait lui apporter ses courses une fois par semaine, mais il s'était ravisé. Il n'avait confiance en personne alors pourquoi se confier à elle ? Parce qu'elle avait un sourire bienveillant et faisait bien à manger ? Il se sentait toujours perdu lorsqu'il devait prendre une décision importante. Cela le rendait dingue et anxieux.

Se taire était une solution de facilité, celle qu'il avait choisie pour ne pas devoir affronter les autres, ceux qu'il redoutait tant, ceux qui le rejetaient et le méprisaient depuis sa plus tendre enfance.

Ce matin-là, il pensa à Jill et à Gall, les parents de la petite disparue. Son cœur se tordit de douleur à l'idée de leur souffrance.

N'y avait-il pas pire que l'ignorance ?

Il posa un regard songeur sur son assiette de tartines. Celles-ci le dégoutèrent. Il se leva doucement de son fauteuil puis chercha de la main sa canne pour ensuite traverser le salon à pas lents. Il stoppa sa course devant le téléphone. Ce maudit téléphone qui ne servait à rien. Personne ne l'appelait jamais et lui n'avait pas un ami à appeler.

Peut-être était-il temps qu'il serve à quelque chose ?

Il posa une main tremblante sur le combiné. Sa respiration s'accéléra et son cœur se mit à battre violemment dans sa poitrine. Il respira bruyamment.

Lorsqu'il pressa le combiné contre son oreille, la tonalité le bouleversa. C'était un son qu'il n'avait plus entendu depuis longtemps. Il sut à cet instant qu'il venait de faire le bon choix.

Une décision juste et droite.

Il composa lentement un numéro, jetant un coup d'œil fébrile vers un vieux bottin téléphonique poussiéreux.

Enfin, la sonnerie retentit une première fois...

Puis une deuxième fois ...

Il faillit raccrocher, mais résista à la tentation. Il devait y arriver.

Une troisième sonnerie retentit puis une quatrième.

Cela lui donna des frissons. Allait-il avoir un malaise ?

Une cinquième ... une sixième ... une septième sonnerie...

Personne ne répondit à son appel. D'une main flageolante, il reposa le combiné puis fondit en larmes.

Désolée Hailie.

Même lorsqu'il avait quelque chose d'important à dire, personne ne voulait l'écouter. Même lorsqu'il surmontait ses plus grandes frayeurs, cela ne servait à rien.

J'aurai essayé.

Puisque personne ne prenait la peine de lui répondre, peut-être que le meilleur choix était de se taire à jamais ?

Il retourna d'un pas chancelant vers son vieux fauteuil en cuir. Il s'y installa lourdement, les idées brouillées par ce qu'il venait de vivre.

Il leva les yeux vers la rue, avec lassitude. Cette routine le rassura quelque peu.

Cette journée se finirait comme toutes les autres. En tête à tête avec quelques tartines au beurre de cacahouètes.





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J'espère que vous avez aimé ce nouveau chapitre.

À très bientôt pour la suite. 


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