26 - Ensemble, tout est possible

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~ Ezilly ~

Cela devait faire un certain temps que j'étais réveillée, mais je restais aussi immobile qu'une statue, les yeux fermés. La peau contre ma joue était tellement douce qu'on aurait dit celle d'un bébé. Je sentais son souffle qui glissait sur mon visage, sa poitrine qui se soulevait à quelques centimètres de moi... Je baignais dans un magnifique rêve. Je priais de toutes mes forces pour ne plus jamais ouvrir les yeux, qu'un heureux maléfice nous pétrifie pour l'éternité pour que je n'aie plus jamais à quitter ces bras que j'aimais tant.

Une voix chuchota alors, me sortant de ma douce torpeur :

- Tu es une bien piètre comédienne. Je sais que tu ne dors pas... Ton sourire te trahit.

- Je souris ? murmurai-je sans bouger d'un cil.

- Comme un enfant des rues devant une pâtisserie.

Je gloussai avec espièglerie, avant de retrouver ma place, blottie contre son épaule. Ses doigts jouaient avec mes cheveux, caressaient ma joue, et un délicieux silence nous enveloppait, comme pour nous couper du monde. Après la tension de la veille, cette tendresse était un miracle. Ni lui ni moi ne voulions briser la beauté de l'instant.

Mais la matinée était bien avancée, et nous n'eûmes que quelques minutes à nous avant que l'on frappe à notre porte. Wyer grogna et j'enfouis ma tête dans son cou.

Non, s'il vous plait...

- Vos Altesses, vous êtes attendus pour le petit déjeuner royal aux côtés des ambassadeurs.

- Rien à faire des ambassadeurs, jura mon charmant mari à voix basse en resserrant son bras autour de moi.

J'étouffai un petit rire contre son épaule, et il me sourit, comme si mon souffle l'avait chatouillé. Plongée dans son beau regard argenté, je ne parvenais pas à m'en sortir. J'avais tellement besoin de le sentir, contre moi, et de me voir dans ses yeux, de nous voir tous les deux, enlacés dans un nid d'amour rien qu'à nous, que nul ne pourrait plus jamais briser.

La veille, j'avais cru mourir.

Les mots que Wyer m'avait crachés m'avaient fait si mal que je m'étais sentie sombrer dans un profond abîme de désespoir, toute ma force disparaissant... J'avais pensé que c'était la fin, la dernière échéance, comme un aliment arrivant à expiration. Tandis qu'il me tournait le dos et m'achevait de son ricanement de haine, j'avais alors vu ce signe, dans une fraction de seconde, cette chose qui m'avait soudain fait réaliser que tout n'était que mensonge.

Que Wyer souffrait autant que moi.

Le vin dans son verre de cristal s'était creusé par ce qui ressemblait à une goutte d'eau : une larme.

Tout s'était apaisé dans mon esprit, comme si le brouillard de douleur qui le recouvrait avait disparu. J'avais fait le lien avec ce que m'avait dit Sho : on menaçait Wyer avec ma vie. Durant tout ce temps, gardant tout pour lui, il m'avait éloignée pour me protéger. Et encore une fois, il tentait de me repousser loin de lui pour la même raison.

J'avais décidé d'essayer une dernière fois, même s'il me faisait souffrir, de ne pas renoncer. S'il ne restait ce serait-ce qu'un ultime espoir, je voulais me battre pour nous, pour moi, pour lui. Alors, silencieusement, je m'étais avancée et l'avais enlacé. Il m'avait aussitôt rejetée et j'avais cru que j'avais tout faux, et que ses propos étaient vrais, puis je l'avais vu.

Ce mur dans ses yeux s'écrouler.

Il s'était abandonné. Wyer avait tout lâché comme on laisse tomber un fardeau trop pesant, et ses résistances avaient fondu. Il m'avait embrassé avec fureur, avec passion, avec désespoir, et je m'étais accrochée à lui pour ne plus jamais le laisser partir. Je ne le laisserai plus jamais partir.

WE ~ Tome IIWhere stories live. Discover now