Chapitre 16.2c : Operation Vanishing Sun

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(Ce chapitre est dédié à Kentarô Miura. Puisse le Ciel l'accueillir dans Son Royaume et qu'il y trouve le repos éternel.)

« Et si on échoue ? J'ai... peur.
- C'est normal d'avoir peur. Je veux dire, il faudrait être complètement cinglé pour ne pas avoir peur. Mais c'est justement parce qu'on a peur que faire preuve de courage et de dompter cette peur est grandiose. Tu n'as pas été formé à être pilote, pas vrai ? »

Mari avait rapidement compris que, contrairement à elle, Kensuke était un gamin relativement ordinaire. Elle avait toutes les difficultés du monde à imaginer sa vie. Vous voulez dire qu'il a eu une enfance à peu près ordinaire ? Qu'il est allé à l'école ? Qu'il a eu des amis, qu'il a été entouré d'enfants de son âge ? Qu'on ne lui a pas voulu inculquer au plus profond de son crâne qu'il n'est pas destiné à piloter une machine de guerre et probablement mourir ?

« Pas du tout » répondit-il, « Mes parents travaillent pour la NERV mais c'est à peu près tout. Je fais un peu de sport mais le mois dernier, la seule façon dont je pouvais piloter un robot géant était ma PlayStation.
- Tu t'y feras vite. Le LCL ?
« Il se trouve que c'est pas la première fois que j'me retrouve immergé dedans. » lui répondit alors le binoclard, « Longue histoire. C'est quand même marrant de savoir que j'étais plus proche de l'Ange la dernière fois.
- Comment ça, plus proche ? », se posant de plus en plus de question sur la nature de son camarade.
« Longue histoire, il pourra te raconter mieux que moi.
- Qui ? Donne des noms !
- Le Troisième... »

Leur discussion fut cependant interrompu par une communication. Apparaît le portrait d'un homme ayant à peu près deux fois leur âge, approchant donc de la trentaine.

« J'aurais aimé faire les présentations en personne mais on devra se contenter de ça pour le moment. Kensuke Aida, tu dois déjà avoir fait connaissance de Mari donc c'est à moi. Lieutenant-Colonel Ethan Huxley, responsable de la branche Opérations Tactiques. Mon rôle sera de coordonner les différentes opérations de défense contre les Anges. Voyez-moi comme étant la petite voix dans votre tête qui essaye de faire en sorte que la mission soit un succès. Attend rassure-moi, tu comprends l'anglais ?
- はい. Je déconne, oui.
- Bien. Comme vous avez dû le remarqué, la cible ne se trouve pas au Royaume-Unis. En fait, la cible se trouve techniquement nul-part, vu qu'elle est dans l'espace. C'est même pour ça qu'on vous a dépêché ici. Les Evangelions engagent rarement des cibles situées à plusieurs centaines de kilomètres, ce que nous nous apprêtons à faire relèvent donc de l'expérimentation.
- T'es en train de me dire qu'on va se servir d'une arme expérimentale ? »

Mari semblait drôlement excitée à l'idée d'utiliser une arme expérimentale. Kensuke lui, récitait les différentes lois de Murphy et commençait à comprendre pourquoi ses parents avaient besoin de repos quand ils rentraient à la maison. La NERV était une bande de scientifiques fous à qui on avait confié la défense de l'Humanité et dont la seule raison derrière le fait que son personnel n'a pas encore était arrêté est parce que leurs crimes ne sont pas couverts par les lois.

« Les lances sont prêtes. »

L'idée folle derrière ces lances ? Reproduire la terrifiante Lance de Longin. Nommée d'après la légendaire biblique qui aurait percé le flanc de Jésus Christ lors de son supplice, créant une plaie qui ne cicatrisera jamais. Il en existe une, quelque-part dans les entrailles du Terminal Dogma de NERV-0, le QG de la NERV situé à Tokyo-3. Un exemplaire unique, jusqu'à preuve du contraire et l'une des rares armes qui peut traverser un A.T Field comme si c'était un couteau chauffé à blanc dans du beurre. Ce qui en faisait autant une arme parfaite contre les Anges mais aussi contre les Evangelions. L'existence de cette lance est un secret, ses propriétés le sont encore plus et son importance dans les plans de la NERV et plus encore, de la SEELE est la préoccupation de la moitié des agences de renseignement encore existantes. Derrière ces prototypes, l'espoir de milliards d'individus de produire en masse des armes qui délivreront l'humanité de cette menace. Pour d'autre, c'est un moyen de contrer les Evangelions et donc l'avènement d'une nouvelle ère où ces géants prendront la place des armes nucléaires.

« Tous ce que vous avez à faire est de lancer ces lances, en suivant les instructions. C'est l'ordinateur de l'EVA qui fera le gros du travail de toute façon. Oh, on teste aussi un certain degré d'autopilotage, d'automatisation de certains mouvements...
- Comme des macros ?
-... Exactement comme des macros. Tu seras peut-être capable de transmettre un peu de bon sens dans la tête de Mari.
- Je vous entend !
- Bref, dans tous les cas, il n'y aucune raison d'avoir peur. »


La peur, c'est ce qui nous limite bien souvent. Généralement pour de bonnes raisons, une question d'instinct de survie.

« EVA-04 et EVA-08 en position. Lances prêtes. »

Il est normal d'avoir peur, d'hésiter, de se demander si cela n'est pas un terrible malentendu et une très mauvaise idée. Cependant, il y a des moments où le doute n'est pas, ou plutôt, n'est plus permis. Quand la seule chose que vous avez pour vous est un mélange d'espoir, de foi et une rasade de bravoure, c'est plus qu'une simple preuve de courage que de continuer.

« Calcul en cour. Normalement, c'est juste un exercice de routine. »

La chose qui fait le plus peur, au plus grand nombre de personne, reste cependant la mort. La peur de mourir, une obsession presque universelle. Plus ou moins forte mais toujours présente. Et si elle ne se montre pas, c'est qu'elle se cache dans un recoin sombre, plus ou moins inaccessible.

« J'ai l'impression que... que le cœur de l'EVA bat. Entre ça et l'odeur du sang, c'est vraiment une sensation particulière.
- Je t'assure, tu t'y feras un jour. C'est un truc de pilote ça, de trouver l'odeur du fer agréable.
- T'es sûr que t'es pas juste étrange ? »

Phobos et Thanatos marchent main dans la main, alors que la Faucheuse se déchaîne, que le Styx déborde de passeurs et autres Charons conduisant les pécheurs et les saints vers Saint-Pierre.

« Et... lancez ! Sainte mère de Dieu, c'est censé être aussi rapide ? »

C'est un exercice répété maintes fois.

« Impact dans cinq... quatre... trois... deux... un... »

Et pourtant, il reste toujours un soupçon de peur.

« Impact ! Alors, alors ? »

Une chance infime que rien ne fonctionne et que la pire des hypothèses s'avère vraie.

« C'est un échec. Les lances elles... et bien, vous voyez bien l'écran ? C'est pas bon, pas bon du tout. Bien, contactez-les. Base de Béthanie, le Plan A est un échec. »

Il avait de la peine pour le pilote qu'il fait venir du Japon pour tester l'EVA-04. Ce qui devait être une formalité... n'avait été, depuis le début, qu'un plan stupide. Même la SEELE ne pouvait se vanter de pouvoir facilement reproduire une telle arme, encore moins la NERV. Alors, une faction de la NERV ? N'y pensait même pas. C'est bien de croire en soi, mais personne ne peut se prétendre être prophète ou fils de Dieu et écarter les mers, les montagnes et délivrer l'humanité du Mal.

« Ouvrez les communications avec les deux pilotes »

Un ordre simple, simpliste même au vu de la situation.

« Mari, Ken... Aida, j'ai oublié que c'est comme ça qu'on t'appelle. J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle.
- La nouvelle, on la connaît déjà ! » s'exclamait une voix de femme pas tout à fait adulte, « Garde tes excuses pour toi, si j'avais su...
- Tu serais pas aller dans l'espace, arrête un peu de te la jouer.
- Où est-ce que t'as appris à répondre comme ça aux gens ? C'est donc ça le système éduca...
- Je n'ai pas le temps pour vos gamineries donc je vais être bref. Il y a encore deux issues de secours. Le plan B, c'est de rentrer en communication avec l'Ange, au risque de compromettre les EVA. Évidemment, cela tombe sous la juridiction du commandement de NERV-0 et jusqu'à preuve du contraire, ils refusent ce plan. Et donc... nous devons nous en remettre à Tokyo-3.
- Attend, tu te fous de ma gueule Ethan ?
- Mari, j'ai deux fois ton âge, essaye au moins de m'appeler Monsieur quand je te parle et surtout, ne me coupe pas la parole.
- ... yes sir. »

Kensuke, de son côté, était occupé à accepter ce qu'il venait d'entendre. C'est donc ça qu'ils ressentent ?

« Le plan B est, en prenant en compte ce que l'on sait de ce genre de phénomène, la seule chose qui ferait passer une attaque kamikaze pour une décision sage et avisée. Je ne dis pas ça pour vous faire réagir. Si je voulais vous faire réagir, sachez que le plan suivant a été suffisant pour provoquer un malaise chez notre représentant de l'ONU. Mari, tu as dit que tu étais prête à mourir en héroïne ?
- Affirmatif Monsieur.
- Et toi, Aida, tu as dit que tu serais prêt à faire ce qu'il faut ?
- O...oui !
- Bien. Le problème avec le plan B est qu'il semble être une nécessité. Le plan C m'est, personnellement inconnu.»

Il redressa ses lunettes sur son nez et fit craquer les articulations de ses doigts. Il pensait que le plan B était une idée suicidaire, au mieux. Si le plan B était une idée catastrophique, à quoi pouvait donc ressembler le plan C ?

Le plan C, dont les détails sont tenus secrets y compris au sein de la majorité de la NERV, est d'utiliser la Lance de Longin, actuellement située quelque-part à NERV-0, Tokyo-3. Évidemment, cela tombe aussi sous la juridiction du commandement de NERV-0 et jusqu'à preuve du contraire, ils ne veulent pas l'utiliser. Le commandant en personne, Gendô Ikari, avait placé son veto. Pour des raisons qui n'étaient clairs que pour un groupe particulièrement restreint de personnes, il se refuser à utiliser cette arme miraculeuse.

À peu près au même moment, Tokyo-3 était en train d'être évacué. En réalité, l'alarme avait été sonné absolument partout sur Terre car la menace semblait globale. Les gens s'affolaient alors que semblait s'approcher... quelque-chose de terrifiant. Une abomination venue des étoiles pour détruire toute vie sur Terre.

« C'est parce qu'il est dans l'espace n'est-ce pas ? Il est pas si dangereux ? Je veux pas mourir, je veux pas mourir, je veux pas mourir, je veux pas mourir, pas tout de suite, pas maintenant, pas ici, pas comme ça !
-
Makoto, va me chercher la vodka.
- ... Aoba, t'es sûr que c'est une bonne idée ?
- Je t'ai déjà dit qu'on était pote maintenant. Et si tu ne peux pas chercher de l'alcool, va chercher le doc, elle saura réconforter la petite. »

Le technicien s'approcha de sa collègue ayant cédé à la panique. Il ne lui reprochait pas de perdre son calme. Non, la seule personne étrange ici, c'était Shigeru Aoba lui-même. Cette scène d'apocalypse imminent lui était que trop familière malheureusement. Des souvenirs de pluies torrentielles et d'inondations, de bulletins d'informations qui faisaient passer des films catastrophes pour des soirées en maison de retraite.
Il regarda sa montre, avant de remarquer qu'elle n'était probablement pas à l'heure. On devait approcher des douze coups de minuit sur l'horloge de la fin du monde et les aiguilles n'indiquaient nullement cela. Mais il était peut-être trop tard pour se soucier de ce genre de question. Par chance, le personnel et les pilotes étaient déjà sur place pour des tests de routines.
Une dernière prière avant le lancement, on supplie alors à Dieu que cette fin qui semble alors imminente ne soit pas trop atroce. Il était d'un naturel pessimiste, alors mourir aujourd'hui l'embêtait, mais autant qu'un embouteillage. Si sa vie devait se finir maintenant, il était prêt... non, disons plutôt qu'il savait qu'il ne pourrait faire grand-chose, si ce n'est son travail. Depuis que la NERV avait forcé son personnel à apprendre à se défendre, il s'amusait à démonter et remonter régulièrement son « arme de service ». Peut-être qu'elle pourra servir à faire en sorte que ses derniers instants soient moins pénibles ?
Son regard se porta sur ses deux collègues, rejoints par le docteur Akagi. Plus ou moins sa supérieure, il n'avait pas vraiment un avis très élaboré sur sa personne, si ce n'est qu'elle doit faire un travail correct vu qu'ils ne sont pas encore mort. Mais désormais, c'était une question de temps et même le docteur avec tout le café du monde ne pourrait soudainement renversé la situation.

« Évidemment que ça ne pouvait pas fonctionner, c'est des anglais, ça serait si...
- Asuka, tu sais que l'Empire du Japon et le Troisième Reich ont perdu face à...
- Shinji, est-ce que tu penses sérieusement que j'en ai quelque-chose à foutre ? J'ai juste envie de hurler.
- Vous pouvez pas imiter Ayanami et fermez vos gueules ?
- Dès que je sors de l'EVA, je vais te broyer tes couilles et...
- Silence ! »

La voix de Misato avait fait taire les chamailleries des pilotes en un instant.

« Tôji, c'est la première fois pour toi je suppose. Dites, personne n'a pensé que ça serait une bonne idée de parler de Leliel ?
- Tu m'empêches de boire pour oublier cette saloperie ! » répondit Asuka.
« Mademoiselle a quatorze ans et n'a rien à faire avec de la liqueur, surtout si c'est pour éviter d'aller chez le psy. » répliqua Misato. « Trêve de plaisanterie, je vais vous demander d'ouvrir vos oreilles et d'écouter attentivement chacun de mes mots car c'est peut-être la dernière fois que vous allez entendre ma douce voix. Rei va sortir avec... attendez, qu'est-ce que vous me racontez ? C'est une blague ? Bon, changement de programme. »

Elle se racla la gorge et prit une lente aspiration. Ainsi soit-il.

« L'Ange risque apparemment d'attaquer. Je viens de recevoir l'ordre express de lancer les EVA. Le reste des instructions vous sauront communiquées. »

Elle coupa brusquement les communications avec les pilotes. De la frustration, de l'incompréhension. Pourquoi, pourquoi refusait-il d'utiliser la Lance ? Aujourd'hui comme toutes les fois d'avant. Pour préserver son secret ? Ou préserver un autre secret de la Lance ? Des dizaines de questions et de théories fusaient dans la tête de Misato qui avait toutes les peines du monde à comprendre la logique derrière cette décision.

Aucun doute, Gendô Ikari veut notre mort et la mort de toute cette foutue planète.

Lancement, sortie avec un équipement ordinaire, une véritable farce qui avait l'allure d'une tragédie. Une incompréhension totale, un vent de panique alors qu'au-dessus de nos têtes, le Mal lui-même semblait triomphait, resplendissant parmi les étoiles. Le véritable maître du ciel était ici non pas le Soleil ou la Lune mais l'Ange. Apôtre de la fin des temps, n'aillant nullement attendu les trompettes de Jéricho ou la venue des Quatre Cavaliers pour commencer le jugement dernier. Quoique, il y avait bien quatre pilotes de déployer ? Est-ce que tout ceci n'était qu'une simple blague du destin ou les machinations malades d'un homme qui, sentant sa fin arrivée, a décidé de se produire une dernière fois en spectacle avant que le rideau ne retombe une dernière fois ?

« Est-ce que vous entendez quelque-chose ? » demanda la Seconde
« Un murmure. » répondit la Première
« Des cris. » répondit le Quatrième
« ... les battements d'un cœur ? » répondit le Troisième
« Je vois. J'entend la voix de ma mère. C'est... terrifiant. Peut-être que c'est ce qui devait arriver, peut-être est-ce que c'est comme ça que tout cela devait se terminer. Merde, je suis peut-être déjà morte ? »

La voix se faisait de plus en plus sorte mais ressemblait de moins en moins à la défunte mère de la jeune allemande.

« Non. Elle a toujours été avec moi. Même si tu es si proche de moi, tu sembles si distante, sans que je puisse te ramener. C'est vrai que je t'ai détesté, que j'ai maudit ton nom. Les autres ne m'entendent déjà plus ? Bah, c'est une conversation d'une mère à sa fille. Je me souviens pourtant encore de toi, de ton visage, de ta voix. C'est terrifiant à quel point on se ressemble. Et donc, tu as donc tout gardé pour toi ? Tu aurais pu en laisser un peu pour l'autre, ne serait-ce que parce qu'elle ne serait pas partie en me laissant retrouver son cadavre. Je... ne sais pas quel était ton rêve. Au-delà d'aider la science, évidemment. Je me demande pourquoi tu as fait ça, si c'était intentionnel ou pas. Mais maintenant, ce n'est plus vraiment important n'est-ce pas ? »

Elle ferma les yeux. Elle avait vraiment l'impression d'être dans le ventre de sa mère. Elle avait l'impression qu'elle n'avait jamais été aussi proche d'elle.


« Je sens que ça va bientôt commencer. Je sais que c'est agaçant de te demander ça mais, s'il-te-plaît, est-ce tu pourrais... m'aider ? »

Pour Asuka, c'était ce qui se rapprochait le plus d'une prière. Elle ne croyait pas en Dieu. Ni en quelconque entité supérieur dépassant l'univers et la compréhension humaine.

« J'ai fait beaucoup de bêtises. Des bêtises de gamines. Pas pour faire du mal aux autres, mais simplement par curiosité, pour voir comment c'est, à quoi ça ressemble, quel goût ça a. Mais, ne serait-ce que pour cette fois, pourrais-tu faire abstraction de tout cela et me prêter main-forte ? Une fois de plus je sais, encore une fois même. Mais c'est bien ce que ferait une mère pour sa fille adorée non ? »
La voix de sa mère lui paraissait toujours aussi incompréhensible mais elle avait la certitude qu'elle lui avait répondu. Alors, elle sourit car elle n'était plus seule.  

Vous deux, dansez comme si vous vouliez triompherWhere stories live. Discover now