A ta place

Aussi rouge que le sang

Scorpius apprit que Harry Potter devrait retourner chez son horrible famille moldue une fois dans le Poudlard Express. Il était passé devant le compartiment des Gryffondor au moment où Weasley réconfortait son ami, en lui assurant que les choses allaient probablement mieux se passer. Que Dumbledore aurait mis en garde ses tuteurs pour qu'ils soient un peu plus... conciliants.

Cependant, le Serpentard ne se souvenait que trop bien de ce que son ami Albus lui racontait au sujet de l'enfance catastrophique de son père. Il savait que Harry avait été négligé et même maltraité. Et Dumbledore s'en doutait fortement selon Drago Malefoy.
Apprendre que ce vieux fou continuait d'envoyer là-bas le Sauveur dans de telles conditions le rendait furieux et lui donnait l'envie de tout casser.

Il rumina tout le long du trajet, prenant Blaise à parti sans pour autant dévoiler tout ce qu'il savait sur l'enfance du héros du monde magique. Son meilleur ami s'était confié à lui et lui avait dit que son père avait horreur d'en parler. Il n'allait certainement pas trahir le Gryffondor...

Pour ne rien arranger de son humeur, Blaise lui rappela d'être prudent pendant l'été. Avec Voldemort officiellement de retour, il se retrouvait dans un position inconfortable. Son père après tout était un Mangemort influent, et il était évident qu'il n'aurait aucune voix au chapitre sur ses choix d'avenir.
Découragé, Scorpius se laissa aller en arrière dans son siège, sans quitter Blaise des yeux.
- Je vais être marqué. Malgré tout, je vais...
Une vague de nausée le fit fermer les yeux et il se tut brusquement.

Blaise lui jeta un regard désolé, mais il hocha doucement la tête.
- Je ne vois pas comment tu peux y échapper, Drago. Tu sais que c'est ce que ton père attend de toi, et il ne te laissera pas le choix.
- Mais je refuse ! Ce n'est pas ce que je veux, et je ne veux certainement pas me trouver face à... lui.

Blaise se frotta les yeux.
- Je peux t'inviter chez moi, mais... je suppose que c'est l'endroit où tes parents viendront te chercher en premier.
- Sans compter que je ne veux pas t'impliquer davantage Blaise. Tu prends suffisamment de risques pour moi déjà, en m'aidant comme tu le fait.
- J'aimerais vraiment pouvoir faire plus.
Scorpius gloussa et lui adressa un clin d'œil.
- Je savais qu'il y avait une raison pour que mon père soit encore ami avec toi, des années après Poudlard. Il disait que tu avais toujours été fidèle et honnête avec lui.

Alors que leur destination se rapprochait à grande vitesse, le blond fronça le nez, et laissa son regard se perdre sur le paysage qui défilait, conscient que son destin allait se jouer pendant ces vacances. Conscient que Potter se rapprochait d'un été de misère.
S'il avait été adulte encore, s'il avait eu les moyens d'agir. Mais il n'était qu'un adolescent, et s'il fuyait le Manoir, il se retrouverait à la rue, sans ressources.

Lorsque le Poudlard Express entra en gare de Londres, Scorpius avait l'impression que son cœur s'était changé en pierre, et ses intestins se tordaient d'appréhension.
Il fut probablement l'un des derniers à quitter le wagon, pas vraiment pressé de retourner au Manoir Malefoy. Il y était né, y avait grandi et pourtant le Manoir que son père avait connu adolescent n'était pas le même. Il était plus sombre, plus lugubre. Inquiétant. Si à son époque - à sa véritable époque - il avait considéré le Manoir Malefoy comme un refuge, à cette époque, alors que la guerre grondait, il craignait de s'y retrouver.

Il croisa le regard de Harry, qui semblait aussi réticent que lui à quitter la gare, visiblement résigné à son sort. Ils restèrent un long moment à se fixer, puis le brun lui fit un petit sourire et il partit vers la partie moldue d'un pas lent, tête basse, traînant ses affaires derrière lui, portant tout le poids du monde sur ses épaules.
Un regard circulaire indiqua à Scorpius que ses parents n'étaient pas encore présents, et pris d'une impulsion subite, il suivit le Sauveur, discrètement.

Il voulait voir à quoi ressemblait ses moldus, comme pour s'assurer que les choses iraient bien. Aussi bien que possible.

Il observa avec répugnance un homme de la taille d'un cachalot empoigner le bras de Harry violemment en le secouant avec un air mauvais, le visage violacé. Le brun ne chercha pas à se débattre, se laissant faire mollement, comme s'il en avait l'habitude. Sa passivité n'était pas habituelle chez lui, et était déjà inquiétante.
Scorpius serra les poings, furieux, mais il resta dissimulé, continuant d'observer.

Le moldu sembla poser une question, puisque Harry redressa la tête et répondit. Le moldu s'empourpra encore plus et lança sa main pour gifler violemment l'adolescent de toutes ses forces. Harry resta immobile, aréactif, comme sonné. La marque d'une main se détachait sur sa joue, aussi rouge que le sang.

Ce ne fut pas le coup en lui même qui décida Scorpius. Ni la marque sur le visage du brun. Mais ce fut la résignation dans ses yeux verts, l'absence de toute combativité.
L'apathie du brun, son fatalisme même le choqua au plus au point, et comme dans un état second, il se dirigea à grands pas vers lui.

Il agrippa le bras de Harry et ce dernier sursauta, les yeux écarquillé, inquiet visiblement de la réaction de sa famille moldue. Mais Scorpius leur jeta un regard méprisant, ignora leurs vociférations et entraîna Harry à sa suite à grands pas, avant de le pousser dans un renfoncement de la gare et de leur jeter un sort de désillusion, les faisant disparaître immédiatement aux yeux des moldus.
Il avait encore la trace mais il savait que Lucius avait fourni à son fils une baguette intraçable. De plus, ils étaient dans une foule de sorciers, à l'heure d'arrivée du Poudlard Express, les rendant peu susceptible d'être identifiés. Sans plaintes de moldus, l'incident serait ignoré...

Harry grogna, mais ses yeux montraient son soulagement que quelqu'un soit intervenu.
- Qu'est-ce que tu fous Malefoy ?
Scorpius lui fit signe de se taire, collé à lui, pour qu'ils ne se fassent pas remarquer.
- Reste tranquille Potter. J'ai un plan. Toi, tu ne veux pas aller chez tes moldus. Moi... je ne veux pas être marqué. Il suffit juste de... ne pas aller où nous sommes attendus.

La bouche de Harry se tordit en une grimace de dépit et il haussa les épaules.
- Je ne peux pas. Je... Dumbledore va se lancer à ma recherche et tu risques d'avoir des ennuis.
Scorpius le fusilla du regard.
- Parce que Dumbledore prend souvent de tes nouvelles Potter ? Il ne verra même pas que tu n'es pas où tu devrais être. Il ne s'en rendra compte qu'au moment de te récupérer, et ça t'aura permis de passer des vacances acceptables. Sans compter que je ne pourrais pas avoir plus d'ennuis que d'être marqué de force.

Quelque chose vacilla dans les yeux de Harry, et il sembla capituler. Cependant, il fixa le Serpentard avec intensité et reconnaissance.
- Comment tu as su Malefoy ? Comment as-tu fait pour savoir ?
Scorpius évita le regard trop vert qui lui rappelaient tellement Albus et haussa les épaules.
- Je suis observateur. Il ne faut pas être devin pour deviner que ce... gros lard est un abruti fini avec toi.

Prompt de demain : constellations