Je m'étire et me frotte les yeux mais je ressens une douleur au niveau des pieds.
Je soulève ma couverture et écarquille les yeux en voyant que je suis encore en robe et que je porte toujours mes talons.
Je me gratte la tête pour essayer de comprendre la raison de cette situation puis me rappelle que j'étais tellement fatiguée hier que je me suis affalée sur mon lit sans me déshabiller, rien d'alarmant.
Puis je n'ai aucun mal de tête ni une envie de vomir qui me serre la gorge, je n'ai pas donc pas bu hier soir et je suis plutôt soulagée parce que je crois que je n'aurai pas supporter une autre gueule de bois, surtout lorsque des souvenirs de la soirée me reviennent.
L'appel de You, le masque, notre danse, je me rappelle de tout et un sourire idiot fait surface.
Une soudaine bonne humeur s'installe, je quitte mon lit et retire ma robe qui me compresse pour attacher mes cheveux qui ne doivent pas être en bonne état.
J'attrape des vêtements et regarde deux fois si personne n'est dans le couloir pour me diriger rapidement dans la salle de bain en sous-vêtements.
Après avoir pris une douche, je retourne dans ma chambre et trouve mon portable dans un petit sac posé sur mon bureau.
Je le consulte pour voir quelques messages de Perla qui me demande si je suis bien rentrée chez moi.
Mais je n'en ai aucun de You.
Je ne sais pas s'il regrette cette danse ou alors s'il compte couper tout contact avec moi mais je ne suis pas d'humeur à attendre qu'il fasse le premier pas, je décide donc de lui envoyer un message mais après 5 minutes à attendre j'en déduis qu'il n'est sûrement pas disponible.
Je pose mon téléphone sur ma table de nuit et descends pour aller voir mes parents, j'ai l'impression de les voir de moins en moins en ce moment.
Mais je suis néanmoins reconnaissante qu'il ne me prive pas de sortie ou quelque chose de style, d'un point de vue insociable ça ne me dérangerait mais je sais que ça m'énerverait aussi.
Lorsque j'arrive dans le salon, mon père est en train de travailler, il épluche des dossiers en fronçant les sourcils d'un air concentré alors que ma mère est au téléphone, une main sur la hanche en haussant la voix pour montrer une certaine supériorité.
Ils ne savent donc pas que le samedi n'est pas fait pour travailler ?
Soudain, quelqu'un toque à la porte.
Mes parents se tournent vers moi et c'est mon père qui me fait signe d'aller ouvrir.
Si j'étais assise sur le canapé, je n'aurai même pas essayer de me lever pour aller ouvrir la porte même s'ils me le demandaient mais bon, on dirait bien que ma flemmardise s'évapore chaque jour.
Je me dirige d'un pas rapide jusqu'à la porte et l'ouvre sans réellement regarder qui se tient de l'autre côté.
Je fixe la personne en face de moi sans vraiment percuter, l'analysant pour bien me confirmer que c'est bien l'individu que je pense devant moi.
« — Désolé de te déranger un samedi matin, mais j'ai vraiment besoin de ton aide. » Me dit Tracey d'un air gêné.
Je la dévisage, essayant de trouver la raison de sa présence sans trouver quelque chose de valable.
« — Non pas de problème, tu voulais me demander un truc ? » Lui demandais-je.
Elle hoche la tête puis s'approche de moi.
« — Je ne peux pas vraiment en parler ici. » Me précise-t-elle en désignant mes parents plongés dans leur travail à quelques mètres de nous.
Une certaine inquiétude commence à naitre mais je l'ignore.
Ce n'est pas souvent que Tracey vient me voir pour me demander de l'aide, à vrai dire elle ne vient jamais me parler.
Sans attendre, j'attrape mon manteau et enfile mes baskets puis referme la porte derrière moi pour la suivre.
Elle me demande de monter dans sa voiture et je commence à trouver sa louche.
« — Pourquoi tu ne me dis pas le problème maintenant ? » Lui demandais-je un peu méfiante.
« — Ce n'est pas ici. » Me répond-elle alors que je m'installe à côté d'elle sur le siège passager.
« — Comment tu sais où j'habite ? » La questionnais-je.
« — J'ai demandé à Leith ton adresse. » M'explique-t-elle.
« — On va où ? » Dis-je.
« — Chez Matthew. » Me répond-elle.
Je hoche la tête.
« — Il a un problème ? Je ne comprends pas en quoi cela me concerne. » Déclarais-je perdue.
« — J'ai essayé d'entrer chez lui mais il ne veut pas me laisser entrer, il a l'air bizarre. »
J'essaye de comprendre pourquoi je suis ici mais je ne vois aucun lien.
« — Et pourquoi tu m'as emmenée ? » Lui demandais-je.
« — Il n'arrête pas de dire des choses bizarres, je n'ai pas vraiment compris mais il m'a dit ensuite que tu savais tout et que tu ne devais pas le savoir ou quelque chose de ce style. J'avais envie de l'aider mais je ne savais pas quoi faire donc je me suis dit que j'allais aller te chercher, peut être que tu comprendras mieux que moi. » M'explique-t-elle un peu perdue mais désirant l'aider.
« — C'est très gentille de ta part de vouloir aider ton petit ami mais je suis désolée, moi non plus je ne comprends pas ce qu'il a. » Lui dis-je.
Nous continuons de discuter pour essayer de comprendre ce qu'il arrive à Matthew et nous sortons de la voiture après que Tracey l'ait garée.
Tout est calme, je ne vois rien d'alarmant.
« — Il est peut-être parti. » Lui chuchotais-je, perturbée par le silence troublant.
Elle secoue la tête négativement puis me dit un « tu vas voir » avant de s'avancer vers la porte d'entrée et de frapper contre celle-ci.
Un cri retentit de l'autre côté de la porte.
Je sursaute.
C'est Matthew ?
« — Laisse-moi tranquille Tracey, espèce de bâtard, comment il a pu faire ça, il nous déteste de toute façon et puis pourquoi elle ne dit rien, elle n'a pas le droit de faire un truc pareil c'est juste... Je les déteste tous les deux c'est des... » Crie-t-il mais je n'écoute pas la fin.
« — Je ne suis pas venue seule. » L'avertit Tracey.
J'ai l'impression que cette phrase décuple sa colère et je l'entends frapper contre la porte comme si c'était son pire-ennemi.
Nous reculons de quelques pas, par précaution.
« — Matthew ? » Dis-je.
Il s'arrête, sûrement pour essayer de comprendre qui lui parle.
« — C'est Hailey. » Lui expliquais-je finalement.
« — Mais dégage aussi ! » S'énerve-t-il.
J'ai envie de partir, réellement il n'a pas faux, malgré son temps agressif je n'ai pas envie de le contredire parce que c'est ce que j'ai envie de faire depuis que je suis arrivée.
Je ne comprends pas en quoi ma présence peut changer quelque chose et je ne comprends pas pourquoi il est dans cet état là.
« — Matthew, tu détestes qui ? » Tentais-je.
Pour seule réponse, je vois la porte vibrée suite à un de ces coups.
« — Je pense que je vais y aller. » Dis-je à Tracey.
Elle secoue la tête et me tient le bras.
« — Non s'il te plait, il a besoin de toi. »
Je décide de rester, plus par curiosité qu'autre chose, je ne sais pas ce qu'il lui a dit à propos de moi mais c'est aussi égoïste de ma part si je le quitte dans ces conditions là.
Soudainement des bribes de notre conversation de la semaine dernière, à côté de la fontaine, me reviennent.
Il me parle de sa famille, de ses parents, du fait qu'il est malheureux.
Je me souviens de son comportement, il m'a poussé dans la fontaine, il a perdu le contrôle et de sa peur de devenir comme eux.
Je m'accroupis à côté de la porte et lui dis :
« — Ce sont tes parents qui t'ont énervés, je ne me trompe pas ? »
Un silence s'installe mais il le coupe en ouvrant la porte.
Je me redresse, il n'en a jamais parlé à personne, je me rappelle qu'il m'avait dit qu'il m'en a parlé seulement pour s'excuser à propos de son comportement durant toute la soirée mais je ne pense pas qu'on se livre comme ça seulement pour s'excuser. Il avait besoin d'en parler depuis longtemps et j'étais juste là au bon endroit au bon moment.
Lorsque mes yeux rencontrent son visage, il est tordu par la colère mais aussi par la tristesse.
Ses yeux menacent de sortir de leur orbite.
Je décide de faire un pas dans sa maison et il ne fait aucun geste pour me repousser.
J'entre finalement à l'intérieur, il fait sombre, les volets sont fermés et un silence qui glace le sang lui tient compagnie.
« — Ferme la porte. » Me dit-il.
« — Mais il y a Tra.. »
« — Ferme la porte. » Me dit-il fermement en insistant sur chaque mot.
Je déglutis et lance un regard désolé à Tracey avant de refermer la porte.
Nous sommes plongés dans le noir et seul un filet de lumière provenant d'un volet mal fermé éclaire la pièce.
Il tapote la place à côté de lui, lui étant assis contre la porte d'entrée.
Je fais de même, lui obéissant, étrangement surpris par son attitude calme.
« — Elle est venue avec lui tu sais. » Me dit-il soudainement.
Je ne sais pas si je dois essayer de comprendre ce qu'il dit et donc poser des questions ou si je dois juste l'écouter mais je suis tellement curieuse que j'ai besoin de comprendre.
« — Ta mère ? Elle est venue avec qui ? » Lui demandais-je.
Il se tourne vers moi, les yeux brillants comme deux billes.
« — Oui, elle est venue avec son collège de travail. C'était un soi disant dîner entre ami. » Ricane-t-il amèrement.
Je hoche la tête.
« — Ils se sont fait du pied pendant tout le repas pendant que mon père discutait par message avec sa secrétaire de merde. » Me dit-il en plongeant son regard meurtri dans le mien.
« — Je pensais qu'ils respectaient assez leurs mariages pour ne pas faire ce genre de chose sous le nez de l'autre, sous mon nez. Ils ont tout simplement détruit le peu d'estime que j'avais pour eux. Et j'en pouvais plus donc je me suis cassé. » M'explique-t-il.
Je le regarde attentivement.
« — Et quand je suis revenue j'ai vu ma mère en train d'embrasser son collègue dans l'entrée. Elle a fait semblant de me voir mais je n'ai pas supporté. Je te l'avais promis mais je voulais faire taire ces voix dans ma tête, faire disparaitre le visage souriant de ma mère ou mon père avec sa secrétaire. Je voulais que tout s'arrête. J'ai fumé jusqu'à vouloir m'enfoncer mes clopes dans l'œsophage pour m'étouffer mais je n'arrivais pas. J'ai voulu éviter d'en arriver là et j'ai résisté je t'assure mais ce matin quand je me suis réveillée et que j'ai vu un mot minable de ma mère sur un post it, que j'ai vu le « je t'aime » à la fin du mot j'ai déraillé. » M'avoue-t-il.
J'essaye de suivre le fil de l'histoire.
« — Qu'est ce que tu as fait ? » Lui demandais-je en essayant d'être le moins agressif possible.
« — Je l'ai pris. » Me dit-il.
Je fronce les sourcils.
« — Tu as pris quoi ? » Lui demandais-je.
« — La coke, celle que le gars m'a donné la semaine dernière. Je t'avais dit que je m'en débarrasserai mais chaque jour je me suis dit que je le ferai demain et aujourd'hui je n'ai pas pu non plus. » Me dit-il en baissant le regard.
Je le fixe, il s'est drogué ?
J'essaye de trouver quelque chose à dire, de ne pas le brusqué mais tout naturellement je me rapproche et pose une main sur son épaule.
« — C'est pas grave. » Lui dis-je pour le rassurer en essayant de cacher ma nervosité.