Mon téléphone vibre et je relève la tête pour voir qu'il n'y a pratiquement plus personne devant le lycée.
Je lis le message de You.
« C'est toi qui vois ! » Me dit-il.
« Puis il y a quelque chose que je ne comprends pas » Répondais-je.
« C'est quoi ? »
« Tu veux qu'on joue à notre jeu mais en même temps tu m'encourages à aller voir ailleurs, je ne comprends pas » Lui dis-je perdue.
« Je te l'ai déjà dit, je ne vais pas t'empêcher de vivre ta vie. C'est peut être l'amour de ta vie, je ne veux pas culpabiliser après de t'avoir coupé de la vie réel en voulant jouer l'égoïste. » M'explique-t-il.
« Je ne comprends vraiment pas, soit tu es vraiment une personne gentille et adorable ou alors tu ne me dis pas la vérité. » Me méfiais-je.
« Vraiment Hailey ? Tu veux jouer la carte du menteur qui mène une double-vie après tout ce temps ! Tu dis que je suis illogique et étrange mais tu n'es pas mieux, tu parles avec un inconnu depuis quelques mois maintenant et tu veux soudainement agir en fille prudente et méfiante. Tu n'es pas mieux que moi au final. Désolé de ne pas avoir envie d'être égoïste, pour une fois que je ne pense pas à moi on me le reproche ! C'est du jamais vu » S'énerve-t-il.
J'écarquille les yeux en lisant son message, j'ai peut être exagéré, je l'admets mais je ne voulais vraiment pas l'énerver.
Je suis juste perdue, je ne sais pas comment gérer ma pseudo relation étrange avec une personne que je ne connais pas réellement et un baiser d'une nuit qui me tourmentent plus qu'autre chose.
« Ecoute je suis désolée, j'ai dû mal à gérer ce qui m'arrive en ce moment mais je ne sais pas, ça m'a semblé naturel de te faire confiance au début et maintenant que je réfléchis pour tout et n'importe quoi je commence à tout remettre en question » Lui répondais-je.
« Hailey je veux bien être compatissant, pouvoir t'aider et faire plein d'autres choses mais tu dois me laisser la liberté de le faire et pas de braquer à chaque fois que tu me trouves étrange. Tu n'as peut être pas l'habitude que quelqu'un qui tient à toi fait passer tes besoins devant les siens » Me rassure-t-il.
« Mon Dieu, je me sens ridicule de tout remettre en question mais je ne sais pas comment j'ai pu remettre en cause ton honnêteté. Je veux dire que je n'ai jamais rencontré quelqu'un comme toi, tu as appelé un taxi pour m'aider quand je me suis perdue après une dispute avec Leith, tu m'as toujours donnée de bon conseils et je suis toujours sur la défensive » Admettais-je.
« Je ne contredirai aucune de ces choses mais tu dois vraiment arrêter de me repousser sans cesse. Je t'ai vu dans des situations pires que ça et tu n'en es même pas consciente »
« Ok, là tu redeviens bizarre, développe s'il te plait » Lui conseillais-je.
« Avant de mettre les mots dans ton casier je t'ai observé pour savoir si tu avais le profil attendu pour ce genre de jeu et je t'ai vu pleurer alors que tu allais te réfugier dans les toilettes, je t'ai vu te renverser ton plateau dessus en début d'année, je pourrai te déballer une tonne de choses mais c'est simplement pour te dire que tu n'as pas besoin de te cacher, je sais exactement qui tu es et tu n'as pas à avoir honte de cela » M'explique-t-il.
« Non, s'il te plait dis-moi que tout cela est faux ! Quand est ce que j'ai pleuré ? Bon pour le plateau c'est très probable vu que j'ai été dotée de deux mains gauches à ma naissance même si celle de droite ressemble beaucoup à une main droite. »
« Ne t'en fais pas, c'est un secret que j'emporterai dans ma tombe »
« C'est vraiment bizarre de dire ça, mais je suis contente que tu ne le divulgues pas. J'ai déjà assez de honte à porter sur mes épaules » Lui dis-je.
« Dis-moi, tu es toujours sur le parking du lycée depuis tout ce temps ? » Me demande-t-il.
« Comment tu sais ? » Lui répondais-je curieuse et surprise.
« Je t'ai vu à la sortie du lycée mais je n'ai pas vu ta voiture bougée, je me demandais juste si tu étais toujours là bas »
« Ne rigole pas mais oui je suis toujours sur le parking, je devrais d'ailleurs bouger avant que quelqu'un ne pense que j'attends pour une transaction de drogue ou je ne sais quoi » Lui dis-je.
« Tu es aussi bizarre que moi, tu le sais ? » Me demande-t-il.
« Rectification, tu m'influences c'est tout, bon je vais rentrer chez moi. On se parle peut être tout à l'heure ? » Lui dis-je.
« Tout dépend à quel heure tu rentres, si à 22 heures tu es encore enracinée sur ce parking je doute que tu sois en état de me parler »
« Quel drôle d'humour, tu feras moins le malin à noël ! » Lui dis-je.
« Je n'attends que ça ;) »
Je souris en lisant son dernier message et pose mon portable sur le siège passager pour rentrer chez moi le plus vite possible.
J'ai souvent hâte de rentrer chez moi et de quitter cet endroit maudit que l'on appelle lycée alors je devrais hésiter de rester planter devant comme une idiote dans sa voiture.
Quand j'arrive chez moi, la première chose que je vois c'est ma mère qui boit une bière.
Boit une bière ?
J'écarquille les yeux alors qu'elle me fait un clin d'œil.
Bien dans la famille je me bourre la gueule avant que le soleil se couche, je demande la mère.
« — Tu vas bien ? » Lui demandais-je alors qu'elle pose ses pieds ornaient des chaussons en forme de tête de Homer Simpsons et hoche la tête d'un regard niais.
Non, elle ne va définitivement pas bien.
La dernière fois que je l'ai vu porté ses chaussons c'est lorsque le frère de mon père, mon oncle est venue nous rendre visite alors que mon père n'était pas là. Ma mère a toujours pensé que mon oncle lui faisait des avances et depuis elle a élaboré tout un plan pour être la moins séduisante possible devant lui, les chaussons jaunes en font parties.
Je ne sais pas si elle a raison mais ça ne me dérange pas, enfin, je trouve ça moins embarrassant que lorsqu'elle a avoué à toutes mes amies pour mon 10ème anniversaire que j'avais de l'exéma sur le fessier jusqu'à mes 2 ans. J'aurais dû me douter qu'un discours de sa part pour mon anniversaire était bizarre.
Au moins j'ai retenu la leçon.
Je m'assois à côté d'elle sur le canapé et tends ma main vers elle pour qu'elle me passe la bière mais la seule chose que j'obtiens c'est un rire ironique et un regard de travers. Ok, c'est noté.
« — S'il te plait, juste une gorgée. » La suppliais-je.
Elle tourne sa tête mollement vers moi et me plante son regard dans le mien.
« — Je ne veux pas te retrouver sur le toit d'une maison en train de crier pour ensuite te faire arrêter et qu'on m'accuse de t'avoir fait boire de l'alcool illégalement. » Me dit-elle.
Je lève les yeux au ciel.
« — C'est la pire excuse que j'ai entendu et réellement, moi en train de crier sur un toit ? Tu devrais savoir qu'avec mes capacités physique je suis déjà à deux doigts de te supplier de m'acheter les sièges de vieux stana ou je ne sais quoi pour monter les escaliers sans me fatiguer, alors que je monte sur un toit, il me faut plus d'une bière croit moi. » Me justifiais-je.
Elle repose son regard sur l'écran de la télévision éteinte.
« — Tu peux toujours rêver pour avoir ne serait-ce qu'une goutte de ce délicieux breuvage, quel mère serait sinon ? » Me répond-elle de manière théâtrale.
« — Le genre qui oublie son enfant sur une aire d'autoroute ? » Lui rappelais-je en souriant.
Elle soupire.
« — Ecoute, on ne va pas rabâcher cette histoire tout le temps, je suis désolée, j'ai eu un trou de mémoire et je ne savais plus pourquoi je m'étais arrêtée sur cette aire. » Essaye-t-elle de se justifier.
« — Et tu es repartie alors que j'étais au toilette. J'avais 2 ans et c'était la première fois que j'y allais toute seule sans que tu m'aides. C'était traumatisant. » Soupirais-je.
« — C'est sûrement pour ça que tu as mis des couches jusqu'à tes 5 ans ! » Murmure-t-elle.
Je la dévisage et la frappe amicalement.
« — C'est pas drôle ! Le docteur avait dit que j'avais le syndrome de la couche, c'est hyper sérieux. » M'énervais-je.
Ma mère se tourne à nouveau vers moi.
« — Hailey, le docteur rigolait. Il ne voulait juste pas t'effrayer en te disant que tu étais en retard par rapport aux autres enfants. » M'explique-t-elle.
« — Est-ce que tu penses que c'est pour ça que je n'avais pas d'amis en maternelle ? Toute l'école le savait. » Lui dis-je.
« — C'est probablement ça. » Me répond-elle.
Je fronce les sourcils et secoue la tête.
« — Attend, je ne suis pas venue pour te parler de mes problèmes de vessie. Explique-moi ce qui se passe ! » Lui dis-je.
« — De quoi tu parles ? » Me demande-t-elle.
« — Je te parle de ça. » Dis-je en désignant ses chaussons.
« — Oh, j'avais froid au pied c'est tout. L'hiver approche. » Me dit-elle en souriant.
Je plisse les yeux.
« — Et la bière c'est pourquoi ? » Lui demandais-je.
« — J'ai oublié de faire des courses cette semaine et j'ai retrouvé ses bières au fond du placard c'est tout. »
Je lève les yeux au ciel, puis me relève.
« — Dis-moi, j'ai vu pas mal de garçons venir ici. Il y a des choses que je devrais savoir ? » Me demande-t-elle, un sourire en coin.
« — Non rien à déclarer pour le moment. » Lui répondais-je en me dirigeant d'un pas rapide vers les escaliers.
Quand ma mère a une idée en tête, c'est dur d'y échapper, alors je fuis le plus rapidement possible. La lâcheté est une des clés de survie dans cette maison.
« — Hailey ! » M'appelle-t-elle alors que je m'apprête à monter les marches de l'escalier.
« — Oui ? » Répondais-je en grimaçant à l'idée de savoir ce qu'elle va me demander.
« — Tu veux vraiment ce siège de vieux pour monter les escaliers ? Si c'est un oui ça m'arrange parce que je n'ai pas vraiment d'idée de cadeaux de Noël. » Me dit-elle.
Je soupire et secoue la tête.
« — Non c'est bon, au moins ça permet de rassurer mon corps de lâche que j'ai monté les escaliers et donc fait un peu d'exercice physique. » Lui expliquais-je.
Je grimpe les marches le plus rapidement possible et m'enferme dans ma chambre pour ensuite m'effondrer sur mon lit.
Alors que j'ai envie de frapper ma tête contre mon crâne tant ma dissertation d'histoire m'horripile, mon portable vibre, me libérant de ce fardeau pour quelques instants.
Je remercie qui que ce soit d'avoir envoyé un message, à quelques secondes près on m'aurait retrouvée une balle dans le crâne.
C'est Perla qui m'a envoyé un message, j'avais oublié qu'elle était allée avec les autres boire un truc après les cours.
J'espère que Leith a tenu sa langue parce que je n'ai pas envie de gérer une Perla hystérique et énervée.
Tout à l'heure, lorsqu'il m'a chuchoté à l'oreille ce qu'il a dit, j'ai eu l'impression de me liquéfier directement sur le sol. Je pensais qu'il allait passer l'éponge ou tout simplement ne pas assumer mais il a l'air de vraiment prendre goût à remuer le couteau dans la plaie.
Je ne sais pas ce qu'il attend de moi mais j'espère vraiment qu'il ne va pas semer la zizanie.
« Le couple Jane et Travis est officiel » M'a-t-elle envoyée.
« Je suis contente pour eux ! Elle le mérite » Lui répondais-je.
« Il ne manque plus que toi à caser. C'est dommage, Matthew était vraiment quelqu'un de bien » Me dit-elle.
« Ca va Madame Irma calme tes pulsions d'entremetteuse, voyante » Lui répondais-je.
« Non sérieusement, on pourrait se faire des sorties entre couple à 6 ? » Me propose-t-elle.
« Arrête tu m'écœures »
« Aller, je suis sûre que ça peut être amusant. On pourrait aller au cinéma, parc d'attraction ou je ne sais quoi et puis on pourra peut être avoir des réductions en prenant un forfait groupe vu qu'on sera beaucoup ? » Me dit-elle.
« 6, c'est pas assez pour prendre le forfait groupe et avant d'organiser un mariage à 6 ou je ne sais quelle connerie, tu oublies que je suis toujours célibataire » Lui dis-je.
« Je comprends pourquoi, grincheuse, addicte aux bières et solitaire »
« Venant de toi, je suis touchée ! » Lui répondais-je.
Je peux déjà deviner que Perla n'a pas bu qu'un café durant leur sortie.
« Puis dois-je te rappeler que ton Blake d'amour est un Cro-Magnon solitaire aussi » Lui dis-je.
« Non rectification, c'est une personne qui choisit son entourage avec précision et ne traine qu'avec des personnes qu'il qualifie digne et honnête »
« Tout ce que tu n'es pas, et c'est un snob c'est tout » Lui dis-je pour la taquiner.
« Et voilà la célibataire en toi qui grogne. Ne t'en fais pas, je t'enverrai une carte postale de notre lune de miel » Me répond-elle.
Je lève les yeux au ciel.
« Très amusant, sinon j'ai loupé autre chose durant votre sortie ? » Lui demandais-je.
« Je ne crois pas, Leith et Travis ne sont pas restés longtemps et Fred s'est engueulé avec la serveuse parce qu'il trouvait inadmissible qu'il n'y ait qu'un morceau de sucre servi avec son café et pas deux. Selon lui, le morceau de sucre devait se sentir seul et ne méritait pas d'être séparé de sa bien aimé pour finir dissoudre dans un café seul. » M'explique-t-elle.
Je ne comprendrais jamais ce qu'il se passe dans la tête de Fred.
« Bien, bon je dois finir le truc d'histoire, à demain ? »
« A demain, dors bien dans ton célibat » Me taquine-t-elle.
Je jure de lui faire bouffer de l'herbe lorsqu'elle sera célibataire.