Je vois qu'il a du mal à formuler ce qu'il s'apprête à me dire mais malheureusement pour lui je commence à perdre patience.
Il m'a jetée dans une fontaine parce que je l'ai traité de menteur !
Plus ridicule tu meurs.
Je tape du pied et souffle d'agacement pour lui montrer que je ne vais pas me montrer si coopérant après tout.
« — C'est maintenant ou jamais, je suis à deux doigts partir. » Lui dis-je d'une voix froide.
Je n'ai pas envie de lui crier dessus car j'en ai tout simplement marre de gaspiller ma salive pour quelqu'un comme lui.
C'est juste un adolescent perdu en quête d'aventure ou je ne sais quelle connerie, ce n'est juste pas quelqu'un que je peux fréquenter.
La preuve, en une nuit j'ai été impliquée dans un trafic de drogue, de cigarette et j'ai pris une douche dans une fontaine.
Il s'est montré tellement exécrable avec moi que j'ai envie de le foutre dans la fontaine à mon tour.
Son air abattu ne m'atteint plus désormais.
J'en ai marre de jouer la fille compatissante et d'un côté j'espère vraiment que son explication est mauvaise juste pour pouvoir ensuite lui crier dessus et le virer de ma vie.
Mais si jamais il a vraiment une raison valable, même si aucune ne me vient à l'idée, je suis sûre que son attitude de ce soir va s'évaporer pour laisser place à mon bonté plus ou moins naturelle.
« — Est-ce que tu te rends au moins compte du fait que tu viens de me pousser dans une fontaine comme un idiot de première ? » Lui dis-je.
Il soupire puis se tourne complètement vers moi.
« — Ce que je vais te dire, tu ne le dis à personne. Je ne me suis pas conduit comme quelqu'un de bien mais sérieusement ce que je vais te dire, je vais le dire car je te suis redevable. Après ça tu ne me parles plus. » Me précise-t-il.
J'ai presque envie de lui mettre une grosse tarte maintenant histoire qu'il se calme.
« — Matthew ? » Lui dis-je d'une voix calme.
« — Quoi ? » Me demande-t-il.
« — Juste ferme-là et raconte-moi tout. » Soupirais-je.
Il arque un sourcil puis se penche vers moi.
« — Comment veux-tu que je te raconte si je dois la fermer ? » Me provoque-t-il.
Je sers la mâchoire et m'apprête à céder une nouvelle fois pour lui crier dessus.
Il lève la main pour me stopper dans mon élan puis se racle la gorge.
« — Tout a commencé pour ma rentrée scolaire de l'année dernière. J'étais vraiment quelqu'un de sérieux, de gentil, de compréhensif tu vois. Mais finalement ce n'est devenu qu'une simple couverture à la fin. Mon père se tapait sa secrétaire pendant que ma mère allait voir un collègue. Plus cliché tu meurs. Tu vois, j'aimerai qu'il divorce. C'est peut être dur à entendre car pour certain ça a été un vrai calvaire sauf que si tu vivais chez moi tu comprendrais ce que c'est. Il ne se regarde plus mais continue de jouer la comédie pour leur réputation. C'est cette hypocrisie qui m'écœure. J'ai l'impression de vivre avec des inconnus, de ne plus avoir de famille. Et pourtant le jour de noël, ils insistent pour que l'on regarde un de ses films à la con avec une famille formidable. Tout le monde idéalise notre famille et quand mon père me demande comment va ma mère ou quelque chose de ce style je l'ignore c'est tout. Je n'arrive pas à lui dire la vérité en face, à leur dire à quel point ce sont des idiots, qu'ils ne sont pas matures. Je veux simplement que ce mensonge permanent s'arrête pour de bon, qu'ils nous envoient ailleurs ou je ne sais quoi mais je ne veux plus les revoir. Alors je continue de mentir à tout le monde en restant cette personne parfaite mais quand je rentre chez moi je n'en peux plus. Je fume et seulement fume je t'assure. Je n'ai jamais touché à cette connerie de drogue vraiment je ne sais pas pourquoi il m'a donné ça mais je ne l'utiliserai pas. » Me dit-il.
Je m'éclaircis la gorge et tente de ne pas laisser paraître mes émotions, je lui en veux encore.
« — Mais pourquoi tu fûmes, pourquoi tu es comme ça ? » Lui demandais-je.
Il passe une main dans ses cheveux en soupirant.
« — C'est le stress c'est tout. » Me répond-il en baissant le ton de sa voix.
Je sais que ce n'est pas la vérité.
« — Arrête de mentir ! » M'exclamais-je.
« — Hailey, je ne te dois plus rien. » Lui dis-je.
« — Je pensais que tu serais sincère. » Lui murmurais-je.
« — Mais je le suis ! » Commence-t-il à s'énerver.
« — Pardon ! Je ne vais pas croire cette connerie de fumer pour du stress, c'est un putain de cliché ! » Criais-je.
C'est peut être la vérité mais j'ai seulement envie de l'énerver, qu'il souffre autant que moi, qu'il comprenne à quel point c'est énervant d'avoir quelqu'un qui te colle au basque et te traite comme un vulgaire objet, bon j'exagère un peu.
Je me relève pour me mettre face à lui.
« — Et bien tu vas devoir t'y faire, j'ai une putain de famille cliché et je suis un putain de cliché, ça te va ? » Me dit-il d'une voix basse et menaçante.
« — Je ne te crois pas. » Murmurais-je.
« — Tant pis. » Me répond-il en me jaugeant du regard.
Je soupire et me recule un peu.
« — T'es vraiment un sale menteur. » Lui dis-je en croisant les bras sur ma poitrine.
Il se relève.
« — Je ne te permets pas ! » Me répond-il.
Je hausse les épaules et me mets dos à lui.
« — M'en fous. » Lui dis-je avant de m'éloigner.
« — Tu n'as pas intérêt à quitter ce lieu ! » S'énerve-t-il.
Il a vraiment une case en moins, je comprends qu'il est des problèmes familiaux mais de là à me traiter comme une esclave, je ne lui permets pas.
Je m'arrête quelques secondes, brandis mon magnifique doigt d'honneur sans me retourner puis reprends ma route.
Je l'entends qui me rattrape et en moins de deux, il me retourne face à lui.
Je m'apprête à lui répliquer quelque chose de sanglant, quelque chose qui va heurter son égo.
Mais il ne me laisse pas le temps de mettre à exécution ce plan.
« — J'ai peur de devenir comme eux. » Me dit-il.
Je reste abasourdie par ce qu'il vient de dire.
« — Je fume car je ne veux pas être comme eux. » Me répète-t-il.
Je secoue la tête.
Je ne pensais vraiment pas qu'il allait me dire quelque chose comme ça.
« — Mais tu n'es pas comme eux. » Lui dis-je.
Il glousse avant de faire un pas vers moi.
« — Cette fois-ci c'est toi la menteuse. Tu as vu ce que je devenais si je perdais le contrôle ! » Me répond-il.
Il fouille sa poche et me brandit son paquet de clope devant le nez.
« — Ca tu vois, c'est ce qui me permet de garder la situation sous contrôle ! Tu m'as vu vulnérable et je ne te laisserai pas la chance de pouvoir à nouveau me voir en position de faiblesse. C'est cette merde qui me permet de ne pas devenir le mec le plus hypocrite du monde, le plus agressif et le plus détestable. Chaque personne à quelque chose qu'il veut cacher aux yeux de tous, de peur d'avoir leur réaction, ou tout simplement de peur de les blesser. Je ne t'empêche pas de me juger car je sais que c'est ce que tu fais depuis le début de la soirée mais j'espère que tu auras au moins la décence de ne dire à personne ce qu'il s'est passé. »
Il ne me laisse pas le temps de finir et me tourne le dos puis quitte le parc en moins de temps qu'il ne faut pour le dire.
Je reste plantée comme une idiote au beau milieu du parc puis j'entends un « Merci » puis claquement de porte.
Je soupire et secoue ma tête.
Puis je me rends compte d'un truc.
Je ne sais pas où je suis, je n'ai pas de voiture et je n'ai pas d'argent.
Ah oui, et je suis trempée.
A contrecœur je sors mon téléphone et me fige en remarquant qu'il ne reste plus que 2% de batterie.
Je vais dans mes contacts et appuie sur le premier nom sans réfléchir.
La voix éraillée de Jane me vient aux oreilles.