Je m'affale sur le canapé mais un raclement de gorge me surprend. Je tourne la tête pour voir ma mère qui est assise sur un fauteuil avec un verre de vin.
Je fronce les sourcils.
« — Pourquoi tu bois ? » Lui demandais-je.
« — T'étais où ? » Me demande-t-elle à son tour en passant une main dans ses cheveux.
J'arque un sourcil.
« — On ne répond pas à une question par une question. » Soupirais-je plissant les yeux.
Un petit sourire se dessine sur ses lèvres.
« — Et de quel droit tu me dis ça ? » Ricane-t-elle.
Je sais très bien qu'elle dit ça sur le ton de l'humour.
Je hausse les épaules.
« — J'étais chez une amie, c'est tout. » Lui dis-je.
Elle hoche la tête.
« — Il est repartit. » Me livre-t-elle en baissant la tête.
Je tourne la tête vers elle.
« — Papa ? » Demandais-je.
Elle hoche la tête en soupirant.
« — Tu sais quand il revient ? » Lui demandais-je.
« — Sûrement la semaine prochaine. » Grogne-t-elle.
Un long silence s'en suit et je fixe le sol en essayant de trouver quelque chose à dire. Personnellement je me suis habituée au fait que mon père parte mais apparemment ma mère non. C'est sûr que cela ne doit pas être réjouissant de dormir dans un lit seul pour une femme mariée.
« — Tu sais, franchement je me dis que j'ai la poisse. Nate est parti et maintenant c'est lui. » Couine-t-elle avant de boire une gorgée de son vin.
Je soupire et me lève avant de m'assoir sur l'accoudoir de son fauteuil.
« — Tu sais très bien qu'ils vont revenir. » Lui dis-je en passant un bras sur ses épaules.
Elle relève la tête vers moi et plisse ses lèvres entre elles.
« — T'en es vraiment sûr ? Qui te dis qu'un jour on ne va pas se retrouver toutes les deux à attendre des fantômes, de simple souvenir. » Me répond-elle en calant sa tête contre moi.
Je resserre mon étreinte.
« — Ce n'est pas en parlant comme ça que tu vas positiver. » Lui dis-je.
Elle soupire.
« — Viens on va faire les magasins. » Me dit-elle soudainement.
Je fronce les sourcils alors qu'elle se relève.
« — Les magasins ferment dans à peine une heure. » Rétorquais-je.
Elle me fixe quelques instants avant de dire :
« — Alors en boite. »
J'arque un sourcil et c'est à mon tour de la fixer sans comprendre.
« — Mais je ne peux pas. » Lui dis-je.
Elle se tourne vers moi.
« — Je sais. J'y vais toute seule. » Ricane-t-elle en haussant les épaules.
Elle quitte la pièce pour monter.
Je croise du regard la bouteille de vin.
Je l'attrape et remarque qu'elle est vide.
Mes parents ne sortent jamais de vin en dehors des fêtes, alors cette bouteille n'était pas entamée. Elle a bu une bouteille de vin à elle toute seule.
Je soupire et me précipite pour la chercher.
Elle est en train de fouiller dans son placard une robe. Je pose ma main sur son épaule et elle me fixe quelques instants avant de se vautrer dans mes bras et de soupirer.
Je lui caresse la tête et tout son poids se relâche sur moi. Je grogne et la pousse sur son lit avant de sortir discrètement de la chambre et de fermer la porte doucement.
La voir dans cet état me fait de la peine et je ne veux même pas imaginer ce qu'elle va éprouver en se réveillant et en se rappelant son comportement mais je ne lui en veux pas, elle ne devrait même pas avoir à gérer ce genre de chose.
Je vais dans ma chambre et m'affaisse sur mon lit avant de sortir mon téléphone de ma poche et finalement lire le message de You.
« Seulement de ne pas lui avoir dit que je l'aimais. »
Je fronce les sourcils et mon estomac se contracte en lisant sa réponse.
« A qui ? » M'empressais-je de répondre.
Je fixe l'écran de mon portable quelques instants, attendant impatiemment la réponse mais au bout de deux minutes je comprends qu'il n'est pas prêt de me répondre.
Je lâche donc mon téléphone et décide d'aller prendre ma douche pour passer le temps.
Mon regard croise ensuite l'heure qui est affichée sur le réveil et je frémis. Il est presque minuit et je n'ai pas encore fait mes devoirs. Je grogne et attrape mon agenda avant de me plonger dans mon travail.
Ma main glisse sans réfléchir sur la feuille et je pose enfin le stylo après avoir écrit la dernière ponctuation. Je lâche un soupire et ne prends pas la peine de regarder l'heure de peur de faire un arrêt cardiaque.
Je sors rapidement de ma chambre et entrouvre la porte de la chambre de ma mère. Elle a changé de position et elle sert fortement le coussin sur lequel dort habituellement mon père. Un petit sourire triste se dessine sur mes lèvres et je retourne dans ma chambre pour aller me coucher.
Je consulte une dernière fois mon portable et à mon grand désespoir je n'ai aucun message de You, seulement un de Jane.
Je prends une grande inspiration avant de le lire.
« Désolé, on parle demain matin ? Tu commences à quelle heure ? »
Pour seule réponse je lui envoie un « 8 » et m'apprête à poser mon téléphone sur mon bureau mais il vibre.
C'est sûrement Jane qui me répond, enfin vu l'heure qu'il doit être je me demande si elle ne dort pas.
« C'est une nouvelle question ça ;) A toi, tu regrettes quelque chose ? » Me répond-on.
C'est You.
« Tu ne dors pas » Lui répondais-je.
Oui, j'ai la mauvaise habitude de contourner les questions qui ne me plaisent pas mais il n'a pas l'air d'en être affecté.
« Non pas encore mais tu devrais, tu n'as pas cours demain ? »
« Si, mais toi aussi je te rappelle ! » Rétorquais-je.
Je ne sais pas pourquoi mais j'aime bien lui parler.
« Pas faux ! Sinon j'avais quelque chose à te demander. » Me dit-il.
Mon cœur bat soudainement plus vite et je m'empresse de lui demander ce qu'il veut.
« Je t'ai promis qu'on se verrai pour Noël, et tu sais que le lycée organise une soirée caritative pour les sans-abris et les personnes qui n'ont personne avec qui passer le réveillon. Je pensais y aller alors si tu décides d'y faire un tour ça serait l'occasion de faire mon coming out ! »
Je relis à plusieurs reprises le message.
J'ai vraiment bien compris ou c'est une blague.
Je ferme les yeux pour calmer les battements de mon cœur.
Je m'imagine arrivant devant le lycée et repartir au bras de You.
C'est tellement trop facile.
« Tu n'as rien de prévu pour le réveillon ? » Lui envoyais-je surprise.
« Je peux faire une exception pour toi, une promesse est une promesse. »
D'un côté c'est très tentant mais d'un autre je suis censée le passer avec ma famille. De toute façon si c'est pour une bonne cause il n'y a aucune raison pour que mes parents refusent.
Un petit sourire niais se dessine sur mes lèvres.
« Bien alors, je viendrais à cette soirée. »
« Parfait, j'ai hâte de pouvoir te parler en tête à tête. » Me répond-il.
Je soupire pour évacuer toutes ces sensations qui m'habitent le corps.
« Moi aussi, Bonne nuit You » Lui dis-je.
« Bonne nuit Hailey »