La forêt était dense et touffue, pourtant Magnus ne ralentit pas l'allure. Il connaissait ces bois comme sa poche, il y avait passé le plus clair de son enfance. Cela faisait environ deux heures qu'ils avaient quitté le roi et sa garde, et l'aube n'allait pas tarder à poindre.
Magnus savait qu'à l'ouest se trouvait un château, autrefois magnifique, qui tombait à présent en ruine. S'ils avaient pris cette direction, ils auraient pu y être en début d'après midi.
Mais ce qu'il cherchait ne se trouvait pas par là. Il bifurqua vers le nord et ralentit légèrement sa monture pour ne pas louper la fourche qui le conduirait à la personne qu'il recherchait.
Cavan en profita pour se mettre à sa hauteur. Il savait que son compagnon était né dans le coin, mais il ne connaissait rien d'autre de sa vie. À part qu'il avait passé les deux dernières années avec eux, à s'entraîner et à partir en mission.
Ils chevauchèrent encore une petite heure avant que la forêt s'éclaircisse. Magnus leur fit alors emprunter un petit chemin de terre qui les mena directement vers une minuscule maison de rondins de bois assez rudimentaire.
Magnus s'arrêta à l'orée de la forêt et observa les environs. Il semblait hésitant, presque triste, constata Cavan.
Le soleil commençait à peine à se lever, et diffusait une lueur rosée dans le ciel dégagé.
— Je ne suis pas sûre qu'elle me reconnaisse... ou qu'elle ait envie de me voir, indiqua Magnus. Reste sur tes gardes.
Cavan lui jeta un coup d'œil à la dérobée.
— Ça fait combien de temps que tu ne l'as pas vue ?
Magnus se trémoussa sur sa selle, avant de faire avancer son cheval et de répondre.
— Quinze ans.
La surprise figea Cavan.
Il allait demander de l'aide à une personne qu'il n'avait pas vue depuis une éternité ? !
— J'espère que vous étiez liés... murmura-t-il pour lui-même.
Magnus lui lança un regard énigmatique et se dirigea vers la maison.
La porte s'ouvrit avant même qu'ils ne soient descendus de cheval, comme si la femme qui avançait vers eux avait senti leur présence. Elle paraissait sur ses gardes.
Il le serait aussi, pensa Cavan, si deux inconnus débarquaient au petit matin sans s'être annoncés.
Elle avait de longs et épais cheveux sombres aux reflets cuivrés. Cavan la trouva jolie avec sa peau laiteuse et ses yeux en amande.
Il regarda Magnus, qui fixait la fille sans rien dire. Cette dernière n'avait d'yeux que pour son ami. Il n'existait pas.
Cavan fut fasciné par le courant qui passait entre eux, comme si un fil de soie les reliait depuis toujours. Cette sensation d'intense communion qui existait entre son ami et cette fille l'ébranla plus qu'il ne l'aurait souhaité.
— Neve... finit par murmurer Magnus.
La fille eut un sourire si doux, si intense que Cavan crispa les mains sur les rênes. Il se sentait de trop, comme un intrus qui regardait des choses qu'il ne devrait pas voir.
Neve s'approcha alors du cheval et posa une main sur son encolure, pour le caresser.
— Magnus.
Même sa voix était douce, empreinte de délicatesse et de bienveillance.
— J'ai besoin de toi.
À la grande surprise de Cavan, elle acquiesça sans demander quoi que ce soit.
Il était sidéré. Ils ne s'étaient pas vu pendant quinze années et c'était comme s'ils s'étaient quittés la veille. Il ne savait pas ce qu'ils avaient vécu ensemble, mais il pouvait imaginer à quel point cela avait dû être intense.