Son entrée furibonde ne manqua pas d'attirer à elle l'attention des personnes présentes, à la surprise des bandits et la consternation indéniable de Mme Dahily. Les yeux meurtriers de cette dernière se tournèrent immédiatement vers Martius, qui avait suivi la fille sans que, dans son empressement, cette dernière ne l'ai réalisé.
" Tiens, tiens, tiens!" S'exprima Samuel à sa vue, se délectant de la tournure que prenaient les évènements." Tu as bien trainé à sortir de ton trou, petite souris, je me demandais combien de temps nous aurions encore à perdre sur place.
- Je suis là," confirma-t-elle, incertaine de comment s'adresser au colosse qui se tenait devant elle. Elle n'était encore parvenue à son niveau qu'elle sentait déjà son aura meurtrière l'intimider. Ce monstre était d'une toute autre stature que Meredy. " Laissez les partir.
- Pardon?" S'amusa son interlocuteur." A qui ai-je l'honneur pour recevoir de telles directives? Tu sais combien de temps et d'effort nous avons du mettre dans ta recherche parce que tu as décidé d'en faire à ta tête? J'ai aussi perdu des hommes dans cette histoire. Les choses auraient été beaucoup plus simples si tu nous avais gentiment suivi dès le début.
- Pour quelle raison?" L'interrogea-t-elle froidement." Qui êtes-vous, vous même? Vous dois-je quoi que ce soit? Jusqu'à présent vous ne m'avez donnez aucune raison de vous suivre, je ne sais même pas ce que vous avez après moi. Oui, j'ai fuis et je le regrette, mais je n'avais aucune idée de ce genre de conséquences. Aurais-je du deviner que vous suivriez une fille quelconque et sans défense au fin fond de la forêt?
- Oh, je vois de quoi il s'agit!" Jubila l'autre." Je pense qu'il va nous falloir t'enseigner deux trois trucs, en toute amicalité bien sûr. " Son sourire se tordit alors, gagnant une teinte déplaisante qui mis dès lors la fille en alerte. " Ajit, occupe toi d'elle" Ordonna-t-il à son camarade tout en pointant Mme Dahily du doigt." Ca lui apprendra à se moquer de nous et ce sera une bonne première leçon pour la petite souris.
Aussitôt, Ajit agrippa d'une main les cheveux de la femme, tout en saisissant de l'autre la lame aiguisée qui pendait à ses côtés. Une arme à première vu capable de trancher même le cuir le plus épais comme s'il s'agissait de beurre.
- NON!" S'épouvanta la rouquine à cette vue." Vous allez la laissez partir.
- Sinon quoi?" Questionna Samuel, d'un ton on ne peut plus détaché, tandis que la femme lui jetait des coups d'œil éplorés, ignorant l'homme qui agrippait impitoyablement sa chevelure.
- Sa suffit Laela!" Commanda-t-elle à la fille, sa voix tremblant de désespoir.
S'il y avait une chose que la fille avait retenu de sa dernière rencontre avec Meredy, c'était cette leçon: Pour marchander, il faut faire une proposition convaincante, voire incontestable. Et elle savait désormais très bien ce pour quoi les bandits seraient prêt à payer cher, très cher.
- Vous aurez fait tout ça pour rien." Affirma-t-elle, plaçant ostensiblement, sous sa propre gorge, un morceau de verre aussi grand que sa paume, qu'elle l'avait ramassé sur son acheminement, ironiquement dans l'idée de s'en servir pour se défendre en cas de besoin.
Jamais en temps normal n'aurait-elle osé utiliser de cette façon un objet si tranchant. Toutefois, à ce moment, la rouquine n'avait plus notion de peur ou de douleur, et à peine apposa-t-elle son arme improvisée, aussi affutée qu'un rasoir, sur sa peau fine, qu'elle sentit un liquide tiède s'écouler du point de contact. A n'en pas douter, elle n'aurait à faire de grands efforts si son intention était de trancher ce qui se trouvait en dessous.
De plus, puisqu'elle elle avait gardé un écart de sécurité raisonnable, aucun bandit n'aurait l'occasion de se saisir d'elle sans qu'elle ait le temps de commettre l'irréparable. Le moindre geste malheureux de leur part signifiait donc qu'ils perdraient la raison de leurs semaines de recherche.
L'effet ne se fit pas attendre. Samuel ne pouvant dissimuler à son trouble face à cette scène inopinée, il avait aussitôt baissé les bras, en signe de paix.
- Très bien gamine, très bien." Prétendit-il céder, dépité." Tu vas te faire mal, lâche ça avant de faire une grosse bêtise d'accord? C'était juste une petite blagounette inoffensive.
- Laissez là. Partir." Menaça-t-elle en retour, appuyant inconscient un peu plus sur sa plaie, qui s'élargissait au fur et à mesure qu'elle s'exprimait." Je ne plaisante pas.
- Et qu'est-ce que tu vas gagner à faire ça?" Se moqua cyniquement son interlocuteur." Est-ce que ça m'empêchera de brûler ce village en entier? Au contraire, c'est plutôt satisfaisant quand on est contrarié.
- Je ne serais plus là pour y penser." Répliqua encore la rouquine." En tout cas, pas là ou vous serez en mesure de venir me chercher.
Tous deux se jaugèrent du regard, évaluant de qui avait la résolution la plus forte, refusant de céder à la pression de l'autre. La fille se savait avoir l'avantage, accentuant encore la pression qu'elle appliquait sur sa gorge, presque malgré elle. En définitive, Il sembla que le sang qui se mit à goutter sur le torse de sa robe eut plus forte raison.
- D'accord, d'accord!" S'écria alors son interlocuteur, perdant brusquement son masque de retenue." Lâchez là, laissez la partir!" Brailla-t-il ensuite à ses semblables.
Ces derniers obéirent sans attendre, tout aussi contrariés que leur chef. Néanmoins, Mme Dahily, désormais libre, demeura sur place, immobile, les joues inondées de larmes. Une vision qui meurtrit la rouquine bien plus profondément que le verre lui incisant la peau.
" Quelle histoire!" S'exaspéra une nouvelle fois Samuel." Peu m'importe, tant qu'on en arrive enfin à bout. Allez, lâche ça! C'est fini, d'accord?
Et c'est ce qu'aurait désiré accomplir la rouquine. Seulement, ses muscles ne répondirent plus, paralysés par les émotions frénétiques dont elle n'avait plus le moindre contrôle. En revanche, elle sentie ses lèvres trembler et sa vision se troubler, tandis qu'une douleur flamboyante se réveilla au niveau de son cou.
Un bras la contourna, se saisissant sans prévenir de son morceau de verre, ce dernier se retrouvant projeté au loin, bien hors de sa portée.
- Ca suffit, gamine." Gronda une voix familière. Tu en a déjà assez fait.
Martius l'agrippa alors par les épaules, la sentant tanguer, geste auquel se rattrapa la fille pour reprendre pied, dans tous les sens du terme. Elle n'était pas seule.
- Merci." Lui souffla-t-elle, attristée. " Pour tout. Et aux autres aussi, dis leurs que je ne serais jamais reconnaissante pour ce que vous avez fait. Adieu."
S'arrachant à son contact rassurant, elle procéda à réduire la distance qui la séparait de Samuel. Le village était sauf, pour le moment et c'est tout ce qui importait.
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Les préparations se firent dans l'efficacité la plus appliquée, rien n'étant laissé au hasard. Les bandits, après avoir fait cesser les feux qui sévissaient encore, procédèrent à réapprovisionner leur réserve de vivres, se servant du nécessaire parmi les récoltes du village.
Aucun autre adieux ne furent permis à la rouquine, qu'on emmena directement à l'endroit où avait été laissés paître les chevaux. Là, on lui bandit sa blessure, avant de lui lier solidement les mains d'une corde épaisse, de façon à ce qu'elle ne s'en libère d'aucune façon. Nuls mots ne furent échangés et la rouquine se sentit presque reconnaissante de cela, fuyant de son mieux les regards méprisants de ses geôliers.
Elle patienta ce qui lui parut des heures sur place, en présence d'un veilleur chargé de surveiller ses moindres faits et gestes. Combien même se serait-elle essayée à partir en courant, elle n'était en condition pour s'échapper bien loin. Il n'était de toute façon pas question de renouveler une course dans les bois avec les bandits.
Au lieu de cela, elle profita du temps ainsi accordé pour contempler aussi longuement que possible le village, imprimant dans sa mémoire ce lieu qui lui avait offert de si précieux souvenirs. C'est à ce moment qu'elle prit réellement conscience des conséquences de son choix et de tout ce qu'elle laissait derrière elle, une fois de plus.
Etrangement, elle n'en fût pas si secouée qu'elle l'aurait cru, ou bien ne le ressentait-elle pas. Voilà trop longtemps qu'elle s'apitoyait sur elle même, et c'était la raison même qui l'avait perdu, encore et encore. Il était temps à présent d'affronter la dure réalité qui en découlait.
Les bandits revinrent finalement, chargés des biens confisqués, prêts à reprendre la route. On plaça la fille sur cheval accompagné d'un de leur semblable, sans se préoccuper du confort ou non de sa position.
" Voilà une chose de faite" Déclara Samuel en passant à ses côtés, un sourire satisfait illuminant son visage." Ne soit donc pas si triste, tu pourrais être en bien pire compagnie tu sais? Une fois de retour aux véhicules, nous aurons l'occasion d'en reparler bien sûr."
Il s'éloigna alors pour prendre la tête de la cavalerie, pressant ses semblables à prendre le départ. Et à son signal, tous reprirent la route de la forêt, une forêt murée dans le silence, endeuillée. Une forêt qui pleurait la disparition de son souverain.
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Au loin, loin de leur vue, plusieurs silhouettes se détachèrent des bois, chevauchant avec fougue en direction du village. Fatigués mais portés par l'espoir, ces individus ne laissaient aucun obstacle freiner leur course.
Une femme, un jeune homme et un chevreau. Priant d'arriver à temps.
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FIN DE 2EME PARTIE
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