⚜️ | CHAPITRE 14 (2) 🥀

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Une fois séchée et habillée, je m'apprête pour me rendre à mon cours de l'après-midi : module de Contexte photographique et critiques durant lequel nous écumons l'histoire de la photographie, de l'engouement soudain et contagieux pour cette nouvelle technologie jusqu'aux réponses et impacts de la société sur cette révolution de l'imagerie. Somme toute un sujet bien vaste mais qui ne m'intéresse guère, surtout et encore moins en ce jour aux relents morbides.

En fait, j'hésite même à m'y rendre. Cet éternel dilemme, constamment conclu par la pensée de ne pas décevoir Stefan. Tout se sait toujours, alors je ne peux pas m'absenter ainsi, sans raison aucune. Parce que la mort d'Ambre n'est certainement pas un motif dont je peux user.

Je tire la bretelle de mon sac sur mon épaule et vérouille mon appartement derrière moi, puis descends les escaliers jusqu'au hall d'entrée. Je pousse la porte principale sans réfléchir, toutefois une résistance m'en empêche durant une brève seconde.

Seigneur. Pas ça. Pas déjà.

Je me recule aussitôt, mon corps figé non loin du sien. Il est là. Et il sait que je suis là. Comme tant de fois où il avait cette coutume de m'attendre dehors, adossé à la surface boisée qui nous sépare présentement. Mais je n'ose pas ouvrir la porte, en franchir le seuil, lui faire face. Pas maintenant. Pas aussi vite. Pas alors que son crime est gravé au fer rouge - celui du sang - dans mon esprit.

Je ne peux pas. Je ne peux pas. Je ne peux pas. Je ne peux...

J'ai mal !

Le retour soudain de cette douleur lancinante rongeant ma poitrine à vif, telle une giclée d'acide, tranche mon souffle et irradie mes voies respiratoires. Je m'attends presque à le voir débarquer, paniqué, semblant perdre tous ses moyens et vouloir m'aider quel qu'en soit le prix. Sauf que ce n'est pas le cas. Les secondes s'écoulent dans un silence sombre et impromptu, sans que jamais il ne me retrouve, laissant au sable le temps d'embourber mon cœur, tout pour l'empêcher de résonner de la sorte.

Aurais-je rêvé ?

Je n'en serai même plus étonnée.

Pitié, tais-toi. Cesse de battre. Arrête toi. Arrête de me faire souffrir.

Il étouffe, mais c'est une sensation préférable à ses déchirures et craquements perpétuels. Chaque grain s'infiltre au creux de ses fêlures, pénètre jusqu'en son noyau à m'en courber de soubresauts.

Non. S'il te plaît... Pas ça. Pas ça !

Serrant mes bras contre ma poitrine, la falveur de cette brûlure parcourant mes blessures me prend délicieusement à la gorge, elle déborde et m'enflamme toute entière, surpasse le néant de mon âme. Cette sensation oubliée, je l'embrase sans craintes dans un soulagement évident de la recouvrer.

Ça m'avait manqué. Cette brûlure. Cette douleur. Effacer celle de mon buste béant. Juste quelques instants. Les plus beaux. Exquisément.

Un crissement aiguë éclate au cœur de mon vide, se répercute dans mon esprit et un soupir d'extase franchit mes lippes lorsque je me détends enfin, mon avant-bras se détachant doucement de mon martyr.

C'est un délice. Il tombe le long de mon corps, ballant, dévasté et encore immolé. J'aime cette flamme, cette agonie savoureuse, unique lueur dans ce chaos qui me compose. Elle anhile tout le reste, ce rien environnant. Quelle satisfaction innommable.

Possédée par cette adrénaline renouvelée, je m'avance, tourne la poignée, plante mon regard au travers du mince entrebaillement, droit dans le sien, sans flancher, pour me tenir devant lui.

Il me dévisage, observe mes traits tandis que je contemple les siens, épuisés et emplis de regrets. Ses iris noisettes au goût de soleil n'ont plus que la saveur d'une nuit dénuée d'étoiles. La petite ridule entre ses sourcils froncés ne m'a jamais parue aussi plissée, sa mâchoire aussi carrée tant il semble comprimer ses molaires.

⚜️ | « Sacrilège » T1 : Résignation [Terminé/En Cours De Réécriture]Where stories live. Discover now