Mai - 5.

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Avec toute la lenteur du monde, il émergea des ténèbres si douces qui l'entouraient. Les ombres devant ses yeux se dissipèrent, le laissant face à un voile flou. Le rideau de sommeil qui occultait encore sa vision finit également par s'effacer. Il put alors contempler ce plafond d'un blanc crème qu'il connaissait si bien.

La première chose qu'il constata alors, c'était son manque de fatigue. Il n'était pas du genre à se réveiller facilement. Sa mère lui demandait parfois plusieurs fois de se lever avant qu'il ne daigne enlever sa couverture. Et ce simple fait lui coûtait une énergie monumentale. Aujourd'hui, il aurait pu bondir du lit dès son réveil. Pourtant, il demeura immobile, le regard dans le vague. Incapable de bouger, il laissa ses pensées vagabonder.

Il faisait plutôt frais ; une brise légère faisait danser les légers rideaux de velours suspendus, chatouillant son petit nez retroussé. Machinalement, la première chose qu'il voulut faire était de remonter sa couverture pour se blottir dans un cocon de chaleur. Mais quand il referma sa main sur du vide à l'endroit où devait se trouver sa couverture, il comprit que quelque chose clochait.

Il cligna des yeux, toujours agacé par ce brouillard permanent qui l'empêchait de voir correctement. Puis une évidence s'imposa à lui : il n'avait tout simplement pas mis ses lunettes. Il les chercha donc d'une main hésitante sur sa table de nuit, et les mit sur son nez.

Y voyant tout de suite plus clair, et cette fois parfaitement réveillé, l'adolescent observa sa chambre. Une grande pièce lumineuse. Les volets à moitié ouverts laissaient filtrer quelques rayons matinaux. Un léger sourire flotta sur son visage alors qu'il plissait ses yeux émeraude.

Cela faisait longtemps qu'il ne s'était pas senti aussi reposé. Son corps ne lui envoyait plus d'ondes douloureuses et son cerveau semblait avoir fait de l'ordre dans ses idées. Ce n'était pourtant pas facile tous les jours. Hors de question de le montrer à qui que ce soit... surtout pas à lui. Mais il souffrait constamment. Chaque pas s'avérait beaucoup plus difficile que le précédent.

Ce matin, une question demeurait quand même au creux de son esprit.

Combien de temps tiendrait-il encore ?

Ce matin, précisément, il se sentait capable de soulever des montagnes, de traverser les océans à la nage, de... La liste pouvait s'étirer encore sur des kilomètres. Il se sentait prêt à réaliser tous les exploits possibles, à inscrire son nom partout sur le livre des records. Mais il savait bien que ça ne durerait pas.

Il secoua nerveusement la tête de droite à gauche tout en se redressant sur ses coudes, pressé à l'idée de chasser ses pensées parasites et de commencer une nouvelle journée...

Nouvelle journée qui ne pouvait que bien commencer, puisque Victor se trouvait juste là.

Il était reposé, tout semblait marcher comme sur des roulettes, et son petit ami ne se trouvait pas loin...

Son petit ami.

Yann se redressa d'un bond alors que Victor s'approchait du lit. Il le regardait d'un petit air narquois dont lui seul avait le secret. Un coup d'oeil rapide lui fit comprendre qu'il n'était pas l'heure d'aller en cours. Plus l'heure.

— Victor ? s'exclama-t-il. Mais, que...

— Tu me fais une petite place ?

Le blond ne percuta pas, aussi, il fallut que Victor désigne la place libre à côté de lui pour que l'idée se fraye un chemin jusqu'à son cerveau.

— Mais... On a cours !

— Oh, tout doux, le rassura Victor. Reste allongé.

— Mais ça va pas ! Qu'est-ce que tu fais là ?

Lie tes raturesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant