Chapitre 47-2

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Nous atterrîmes durement sur le sol en béton, environ trois mètres en contrebas. Le corps musculeux de Kane, se trouvant sous le mien, il encaissa heureusement la plus grande partie du choc, me permettant de me dégager et me redresser presque aussitôt. Ayant perdu mon couteau dans la bagarre, je reculai cherchant des yeux une arme provisoire ou un moyen de rejoindre les autres rapidement.

Nous nous trouvions dans une salle rectangulaire emplie de transformateurs électriques, tellement vaste que je ne parvenais pas à en distinguer le fond, perdu dans la pénombre. Je cherchais désespérément une porte, un panneau, quelque chose me permettant de sortir de là et de rejoindre les autres, mais tout ce qui m'entourait n'était que des murs de bétons lisses et gris. Kane émit soudain un grognement sourd et je tournais vivement la tête dans sa direction. Toujours groggy il n'était pas encore sur ses pattes mais cela ne tarderait plus. Je ne pouvais pas rester là, sans armes je n'avais aucune chance.

— Hannah ! ça va ? Tu n'as rien ? me cria Gabriel depuis la baie vitrée fracassée.

— Non, c'est bon ! Mais j'ai perdu mon arme, lui dis-je en redirigeant toute mon attention sur Kane qui commençait à se relever.

— Monroe et...

— Aaurie, lui répondit cette dernière.

— Ramassez le plus d'armes possible et trouvez un moyen de descendre, l'entendis-je leur dire, tandis que Kane se redressait sur ses pattes chancelantes et secouai la tête, avant de fixer son regard droit sur moi.

Pas le temps d'attendre les renforts, j'allais devoir courir ! compris-je lorsqu'il se ramassa sur ses pattes postérieurs, prêt à bondir, un grognement sourd et menaçant s'échappant de sa gorge.

— Worth ! Qu'est-ce que vous faites ? C'est trop haut ! entendis-je Monroe crier.

Par reflexe je levai la tête et vis Gabriel, deux fusils en bandoulière et mon couteau à la main, se laisser tomber dans le vide. Mon cœur rata un battement et je ne pus qu'observer sa chute, impuissante, certaine qu'il allait se fracasser les deux jambes sur le sol dur. Mais, une demi-seconde plus tard, parvenu à un mètre du sol, un tourbillons d'air l'enveloppa ralentissant sa chute et lui permettant de flotter jusqu'au sol.

— Bordel... tu voles ?! ne pus-je m'empêcher de commenter alors que Kane, momentanément distrait lui aussi, choisit cet instant pour attaquer.

Gabriel ouvrit le feu presque aussitôt, l'atteignant au poitrail et à la tête. Le loup, stoppé en plein bond, s'écroula dans un glapissement pitoyable, son sang éclaboussant le gris terne du sol brut alors que Worth s'approchait de lui.

— Gabriel qu'est-ce que tu fais ? m'écriai-je en le retenant par le bras. Tu ne pourras pas le tuer sous cette forme ! Cours ! lui dis-je en l'entrainant derrière moi.

Il me résista quelques secondes, le temps de tirer encore deux balles dans la carcasse inerte de Kane, puis finit par me suivre à contrecœur. Je l'entraînai dans l'ombre, me faufilant entre les transformateurs et les armoires électriques, avant de revenir sur mes pas, me dissimulant non loin de l'endroit où gisait toujours l'énorme loup gris.

— Tu m'expliques ce que tu fabriques ? me demanda Gabriel à l'oreille.

« C'est un loup-garou, à moins d'avoir des armes ou des munitions en argent, tu ne pourras pas le tuer sous cette forme. Mais tu l'as suffisamment amoché pour qu'il soit obligé de se transformer. », commençai-je à lui expliquer en ouvrant notre lien pour plus de discrétion.

« Pourquoi on se planque, alors ? »

« Pour qu'il soit moins sur ses gardes. Dès que la métamorphoses s'achèvera, on attaque. On aura qu'une seule chance. »

Je le sentis acquiescer, plus que je ne le vis, tandis que ses bras s'enroulaient autour de moi en une étreinte rassurante et réconfortante.

« J'ai eu si peur lorsque je t'ai vu basculer avec ce monstre... »

« Certainement autant que moi, lorsque que tu as sauter dans le vide sans m'avertir ! On est quitte ! »

« Comment fais-tu pour être déjà si à l'aise avec... tout ça ? », me demanda-t-il en pensant à notre manière actuelle de communiquer. « J'ai l'horrible sensation que ça me déchire le cerveau. »

« C'est peut-être parce que je suis une métamorphe... »

Une vague de pouvoir, brulante et suffocante, déferla soudain, coupant ma concentration.

— ça commence ! me contentai-je de dire à voix basse en me dégageant de son étreinte.

— Combien de temps nous avons ?

— Aucune idée, mais je le sentirai. Tiens-toi prêt.

Il me tendit l'un des fusils et une fois armés, nous attendîmes. Dès que je sentis l'intensité des pouvoirs de Kane faiblir, je fis signe à Gabriel et nous commençâmes à avancer en prenant garde de rester dans l'ombre.

« Maintenant ! », lui lançai-je, à la seconde où les vagues de puissance se tarirent brusquement.

Je fis feu dès que j'aperçus la silhouette humaine de Kane, prostré la tête basse et le souffle court, encore groggy de sa transformation. Mes balles le fauchèrent, lui arrachant un cri de rage et l'empêchant de se relever tandis que Worth lui fonçait dessus, couteau à la main. Je compris que quelque chose clochait lorsque Gabriel stoppa soudain son geste, la lame à quelques centimètres du cou de Kane. J'appuyai de nouveau sur la détente, mais le percuteur cliqua dans le vide tandis qu'un rire moqueur et désagréable sortait de la bouche de Kane.

— Tu pensais vraiment que ce serait aussi simple ? me dit-il en se redressant, avant de se retourner lentement vers moi.

— Gabriel, sauve-toi ! lui criai-je, résignée en soutenant le regard victorieux de Kane.

— Il ne peut pas. Pauvre petite, tu croyais qu'en ayant vécu aussi longtemps je n'aurais pas d'autres tours dans mon sac. Je suis quasiment immortel, vous n'aviez aucune chance contre moi, mais vous le faire croire m'a bien diverti, je dois dire !

« Il est blessé... je le sens. Distrais-le et aide-moi à me libérer de son emprise. On peut l'avoir. »

Légèrement sonnée par l'afflux brutale des pensées de Gabriel, j'essayai de masquer mon trouble derrière une mimique effrayée qui n'eut pas l'air de le convaincre.

— Je ne t'effraie plus on dirait ? Laisse-moi remédier à ça, me susurra-t-il en s'approchant encore de moi.

Je sentis son esprit effleurer le mien, sorte de brouillard huileux et opaque qui tentait de s'insinuer dans mes pensées et de les influencer. Des tentacules invisibles s'enroulèrent autours de moi cherchant à m'immobiliser. Ma respiration s'accéléra et durant une longue seconde je sentis la panique m'envahir. L'éclat de triomphe qui traversa le regard de Kane, me sortit de ma transe et au lieu de me laisser conquérir, je ripostai en baissant toute mes barrières. L'exultation de Kane me coupa momentanément le souffle, mais elle fut de courte durée, car lorsque notre lien de couple se stabilisa nous le pulvérisâmes, l'éjectant de nos esprits. Il tituba sous le choc, me jetant un regard haineux.

— Tu vois, nous non plus nous ne sommes pas sans défense ! lui susurra Gabriel alors qu'un vent puissant commençait à s'enrouler autour de lui, s'élevant rapidement vers le plafond.

— Ni sans renfort ! Surprise, Connard ! cria soudain Monroe apparaissant de derrière une armoire électrique et faisant immédiatement feu, tandis qu'Aaurie se laissait tomber sur lui en poussant un cri de guerre terrifiant.

Surpris et attaqué de toute parts Kane ne put, dans un premier temps, que se défendre. Mais lorsqu'il commença à riposter, je sus que les filles ne tiendraient pas longtemps.

— Poussez-le vers les transformateur ! hurla Worth pour se faire entendre par-dessus le rugissement du vent.

Elémental - Transfiguration Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant