Chapitre 17-2

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*Modifié le 06.05.22*


— La voie des airs ? Il veut dire qu'ils... vont se transformer en oies ? demanda Allistaire au bout d'une minutes ou deux, brisant le silence oppressant de l'habitacle.

Malgré moi j'éclatai d'un rire bref et sonore alors qu'un sourire narquois étirait les lèvres de Worth, malgré tout très concentré sur la route et surtout sur le rétroviseur.

— Je lui raconterai que tu as dit ça, il va adorer, ne pus-je m'empêcher de lui sortir avec un rictus sardonique, mon regard également rivé sur l'extérieur.

Une lueur blafarde apparaissait à l'horizon, signe que l'aube approchait. Derrière nous, le ruban d'asphalte luisant de rosé était, pour le moment, toujours désert. Allistaire partit d'un petit rire nerveux mais s'abstint de poser plus de question, même si visiblement il en mourrait d'envie. Durant quelques minutes, le trajet se poursuivit dans un silence tendu, nos yeux scrutant âprement la nuit à la recherche de la moindre lueur de phares ou ombres suspectes.

— On y sera dans combien de temps ? demanda soudain Monroe.

— Je te le dirais quand je saurais où nous allons, lui répondit Worth d'un ton sec, la fatigue durcissant ses traits dans la pénombre nimbée de la lueur rouge des voyants luminescents de l'habitacle.

— Comment ça ? Je pensais que nous retournions au commissariat !

— Ce sera certainement le premier endroit où ils vont nous attendre ! Réfléchissez un peu ! lui sortis-je.

— Devant un bâtiment bourré de flics ?! Il faudrait vraiment qu'ils soient idiots !

— C'est toi qui es idiote ! lui balança Allistaire, coupant la réplique cinglante qui me brulait les lèvres. Tu as vu de quoi ils sont capables ? Tu crois vraiment que la perspective de se confronter à un groupe de mecs armés de flingues, va les arrêter ? Ils n'ont pas peur de nous et ils ne sont pas humains. Les dommages collatéraux, ils s'en foutent pas mal. On est passé de l'autre côté du miroir là, ma vieille, il faut te faire une raison !

— Tu as raison dans le fond, mais fait quand même attention à ce que tu dis ! commenta Worth d'une voix tendue. Ils sont inhumains car ce sont des criminels et non parce qu'ils font partie d'une autre espèce que la tienne... n'oublie jamais ça ! Nous aussi nous avons notre lot de dégénérés et de sociopathes dangereux.

— Vous avez raison, chef, désolé.

— Oui il a raison, à une exception près ! Vous êtes quoi au juste ? lui demanda Monroe de sa voix agressive qui commençait à me taper sur les nerfs.

À cet instant, des phares apparurent dans les rétroviseurs. La lueur grossissait vite, très vite. Worth commença à accélérer. La tension grimpait dans l'habitacle au même rythme que l'aiguille du compteur. L'écart entre nos deux véhicules s'était stabilisé lorsque Gabriel commença à ralentir.

— Vous êtes fou ! Pourquoi vous ralentissez ?

— Pour économiser la batterie. Leurs phares sont allumés, ils ne cherchent pas à nous rattraper... je ne pense pas que ce soit eux.

— Et si vous vous trompez ?

— Il sera toujours temps d'appuyer sur le champignon.

A l'instant de sa réponse l'autre véhicule nous rattrapa et nous doubla sans effort. La tension chuta subitement d'un cran, tandis que nous continuions à rouler, les premiers rayons d'un soleil pâle affleurant derrière la ligne d'horizon. Durant de longues minutes, je m'abimai dans la contemplation du paysage morne qui défilait derrière la vitre légèrement teintée. J'avais la désagréable impression de passer mon temps dans des voitures inconnues sans savoir où j'allais, ces derniers temps et ce constat triste et alarmant ne me plaisait pas du tout. Alors que je me forçais à détacher mon regard du paysage hypnotique, je surpris Worth en train de se passer une main sur les yeux. Maintenant que la luminosité augmentait, son visage hâve et ses cernes violacées montraient toute l'étendue de sa fatigue.

Elémental - Transfiguration Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant