Chapitre 38

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La dragonne apparaît soudain dans la clairière. Jamais la peur ne m'avait autant glacé les os, et pourtant le champ de bataille avait déjà bien joué son rôle en peuplant mes nuits de cauchemars. C'est alors que nous l'entendons hurler toute sa rage, Saphira se met à lui répondre sans que je ne puisse la contrôler. Un hurlement tout aussi sauvage que les précédents que j'ai déjà eu, et encore une fois un miracle s'ensuit, la dragonne d'or en devient comme muette, son hurlement meurt au fond de sa gorge. Je vois ensuite Louna, transformé en louve, se jeter sur la dragonne, accompagnée par une marée de griffes et de crocs, profitant que la dragonne soit déstabilisée.

Avec horreur je vois la dragonne d'or se secouer dans tous les sens pour décrocher les loups qui s'accrochent à elle pour lui déchirer les ailes, je la vois envoyer valser notre frère d'un coup de queue monumentale, lui qui s'était téléporté juste à côté d'elle. Le temps semble se ralentir, je vois son corps voler au dessus des loups et percuter avec force le tronc de l'Arbre-vie en dessous de moi. Je me met à hurler à l'unisson avec Saphira et s'est avec rage que nous sautons des branches de l'Arbre-vie pour tomber sur le dos de la dragonne d'or. Saphira est bien moins épaisse mais toute aussi longue, avec une forme bien plus serpentine qui permet de mieux esquiver les coups de la dragonne. Comme les loups, je me met à mordre à pleine dents dans les ailes si fragiles de la dragonne. Ma vision enragé ne remarque pas que tout autour de nous s'écarte, les loups quittent le combat, les arbres de la Forêt-mère nous font de la place. Je dois me souvenir du plan, mais les crocs de la dragonne planté fermement quelques part le long de mon corps m'empêchent de penser clairement. Nous devions l'affaiblir pour l'emprisonner, mais maintenant je dois en réalité survivre. Même sur le champs de bataille je n'avais pas autant été frappée par ce besoin. La mâchoire se referme de plus en plus, comme un piège dont je ne peux plus m'échapper. En retour, mes crocs se referment encore plus sur la base de son aile tandis que mes griffes continuent de lui entailler l'épaule.

Soudain plus de résistance, mes griffes rencontrent le vide et ma tête par en arrière, l'aile entre les crocs. Une clameur sourde s'élève autour de nous, les loups m'encouragent, et avec bonheur j'entends le cri de douleur de la dragonne d'or, qui relâche la pression de sa mâchoire sur mon corps. J'en profite pour me décoller d'elle et reculer un peu, je jette son aile par terre. Tous ses cris me vrillent le crâne, et les pulsions de vengeance de Saphira au fond de moi se font de plus en plus violentes. Les blessures de crocs sont gigantesques et c'est quand ma vision se trouble que je comprends à quel point je m'affaiblis trop vite. Je n'ai que le temps de voir une tache blanche se jeter sur la tête de la dragonne, accompagnée d'une exclamation que j'arrive à comprendre.

«-Eléa !! La chaîne !! »

Je peine à reprendre mes esprits pendant que ma sœur m'offre un peu de répis en essayant d'aveugler la dragonne d'or avec ses griffes. Ce qui est extrêmement difficile car la dragonne se déchaîne, ayant perdu une aile elle ne peux plus s'enfuir et dans ses rugissements je reconnais enfin la vraie peur. Mais écouter ses hurlements ne m'aide pas, et Saphira ne m'aide pas non plus. Je me concentre sur le fait de protéger Louna, et pour cela nous devons enchaîner la dragonne. L'Arbre-vie me semble si loin désormais, mais la chaîne magique des nains est encore dans ses branches. Je me traîne jusqu'à l'Arbre-vie tandis que les loups vont dans le sens inverse pour aller suivre et aider leur chef. Qu'est ce que j'aimerais avoir une petite armée de dragon là... Cela nous sauverait bien la mise...

En avançant je vois de plus en plus de loups qui fusent en l'air dans tous les sens, certains venant s'écraser contre l'Arbre-vie, comme l'avait fait Emerick plus tôt. Penser à lui me fait accélérer, je dois aussi me dépêcher de terminer ce combat pour aller voir s'il est encore en vie. J'arrive enfin à l'Arbre-vie, ma vision totalement trouble et une gigantesque trace de sang derrière moi. Je trouve difficilement la chaîne magique, mais la sève de l'Arbre-vie semble éclairé ma vision comme elle peux. Je prend la chaîne dans mes griffes et me retourne vers le combat qui fait encore rage un peu plus loin. Avec bonheur je vois les arbres de la Forêt-mère qui forment une barrière solide pour empêcher le combat de s'éloigner encore plus, je crois même qu'ils ramènent la dragonne d'or vers moi. Je retombe au pied de l'Arbre-vie, presque à bout de force. J'aurais donné tellement pour être un dragon colossal, ou que l'un des colossaux nous viennent en aide... Soudain un son de cor se fait entendre, un appel puissant, une annonce inattendu. Je n'arrive même plus à voir qui arrive, je distingue simplement que la Forêt-mère s'écarte non loin à côté de l'Arbre-vie. Je peine à comprendre le langage utilisé par la marée immense qui recouvre rapidement le sol de la clairière, mais le son de puissantes machines qui se mettent en mouvement et qui tire des projectiles me permettent de comprendre que les nains nous ont rejoins.

Les secrets  de l'autre mondeWhere stories live. Discover now