Épilogue.

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Épilogue.

RÉSERVE NATURELLE DE ZINGARO, SICILE

Seize mois plus tard

Les cheveux au vent, elle observait silencieusement la falaise abrupte et sauvage qui se dressait face à elle, manifestation ultime de la beauté de l'île qui regorgeait de trésors.

_ Benvenuti a Zingaro. Il prossimo passo è la città di Palermo, sourit Arianna Amoretti non sans appréhension.

Asyat frémit à l'entente de la ville de Palerme. C'était incontestablement ici que tout avait commencé. Cependant, à la surprise générale, elle avait de son propre chef souhaité s'y aventurer avec courage pour une semaine afin de tenter d'expier ses vieux démons. Elle hésitait même à rendre plus souvent visite à sa demi-sœur. 

En l'espace de seize mois, son admiration n'avait cessé de croître envers Arianna Amoretti qui avait été la seule à réellement mesurer l'ampleur du fardeau qu'elle portait sur ses frêles épaules et qui l'étouffait un peu plus sous son poids chaque jour qui passait. Elle lui avait plus que jamais permis d'espérer dans son monde où les sentiments bénéfiques n'étaient plus depuis longtemps. 

Les yeux clos et les bras repliés contre sa poitrine, elle inspira profondément. Il lui arrivait de se questionner entre deux cauchemars à propos de l'authenticité des seize mois qui s'étaient déroulés depuis le suicide violent de Marco Amoretti, finalité en réalité proportionnelle à la terreur qu'il avait semée au cœur de sa vie cinq longues années durant - et particulièrement les derniers mois de son existence. 

Les rayons du soleil redoraient sa peau, éveillant petit à petit les cellules de son corps à l'unisson. Son long combat lui permettant de se réapproprier son existence était conforté par ce type de moments simples et agréables effacés par une routine à la fois infernale et assommante. 

Après un long moment d'hésitation, elle croisa le regard inquiet de sa demi-sœur et esquissa timidement une ébauche de sourire avant de hocher doucement la tête. Était enfin arrivé le moment de répondre à la fameuse question qui l'avait souvent obsédée après la découverte de ses réelles racines : à quel point était-elle capable d'aimer ou de détester l'île de la Sicile, aussi belle qu'inaccessible, empêtrée dans les affres d'un passé douloureux lié à tous types de corruptions et de meurtres commis à ses heures les plus sombres. 

Le fort caractère des monts majestueux qui se dressaient fièrement de part et d'autre de l'île, la douceur du littoral aux mers cristallines se mouvant dans un doux clapotis et l'ambiance de folie qui s'emparait de la ville chef-lieu lors de longues et chaudes nuits estivales comptaient parmi les innombrables attraits de la perle méditerranéenne. Mais une lutte intestine, véritable bombe à retardement, lui avait éclaté au visage et avait réveillé ses vieilles peurs au moment où l'appareil s'était posé sur le tarmac de l'aéroport de Trapani. 

Privée d'une utilisation ponctuelle d'antidépresseurs depuis deux mois, il lui était d'autant plus difficile de ne pas céder à la panique, les Amoretti et les Bellini, dont la présence sur l'île ne faisait aucun doute, plus proches que jamais de l'endroit où elle se trouvait.

* * *

L'air de Palerme était lourd, la chaleur et les hormones humaines se démultipliant dans les rues constamment en ébullition. Les regards qui se baladaient sur la jeune femme de bientôt vingt-quatre ans étaient étrangement agréables. Elle se sentait revivre, désirable et délestée de cette peur panique que lui inspiraient les hommes à Paris. Les sept-cent mille palermitains n'avaient absolument rien à envier aux romains, débordants de vie et d'énergie. 

« Liste noire. »Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin