Chapitre 21

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      Le calme de la nuit me perturbe. Je n'entends aucun bruit alors je tends l'oreille dérangée par ce silence qui devient pesant. J'entends alors un son, un tintement régulier. Des gouttes perlant contre un sol solide. « Ploc », « ploc », « ploc ». Inlassablement ces mêmes « ploc » ne cessent pas de se répéter.

      Alors que j'ouvre les yeux, je me rends compte que je suis plongée dans l'obscurité. Normal après tout puisque je suis allongée sur ma couchette dans la cabine de mes grands-parents. J'ai paniqué pour rien. Je tends la main sur ma gauche, à tâtons, afin de trouver ma lampe de chevet. Où je devrais trouver le parquet chaud du sol de la cabine, ma main découvre un sol dure et froid. Ma main regagne immédiatement sa place sous la couette et je me replis à l'intérieur de mon lit. Interdite, je suis pétrifiée par la peur.

      Je suis là comme une idiote blottie sous ma couette, plongée dans un silence pesant et je me dis finalement que je ne devrais pas avoir peur. Rien dans cette ambiance n'est normal. L'océan-monde n'est pas si silencieux, ils regorgent de bruits. Le vent, les oiseaux, les animaux. Le bruit des vagues contre la coque du Draisineguerre ou les bruyants remorqueurs.

      J'ai affronté des requins noirs et nagé dans le sillage d'une calamité, qui dans ce monde comptent parmi les pires créatures qui soient et moi je suis là à avoir peur du silence. Ragaillardie par ces pensées, c'est décidée. Je me dois d'affronter cette peur qui m'empêche d'avancer.

      Repoussant ma couette, je me lève d'un bon prête à affronter l'univers tout entier. Je ne suis pas sur de ce que j'ai ressenti ou vu en premier. Une vive lumière aveuglante, la douleur qui enflamme mon crâne ou des étoiles envahissant ma vision à cause du choc que je viens de subir. La douleur part du sommet de mon crâne, ma tête tourne dans tous les sens à moins que ce ne soit ce monde qui tourne tout autour de moi.

      Je suis allongée dans un étroit couloir plongé dans une vive lumière blanche si aveuglante qu'elle en est douloureuse. Le boyau parfaitement circulaire serpente dans l'inconnu et c'est en me relevant bien trop rapidement que ma tête a heurté le haut de ce tunnel à peine assez large pour que je puisse m'y mouvoir. Me contorsionnant dans tous les sens j'essaie de me mettre à genoux, mais c'est impossible. Je suis allongée sur le dos, dans l'incapacité de faire le moindre geste.

      Je me calme ou j'essaye de me calmer . Je souffle. Je souffre. Je souffle, mais je souffre encore. Ma tête me lance, peut-être que je saigne. Je ne peux pas porter mes mains à ma tête car mes épaules remplissent toute la largeur de ce tunnel. Essayant de remonter mes jambes le plus près possible de mes fesses, je pousse alors afin de me faire glisser. Je me contente de réitérer cette exercice pour avancer dans ce curieux tuyau.

      Combien de temps ai-je forcé ainsi me poussant dans ce réduit avant d'être à bout de force. Mes jambes sont trop endolories par l'effort, mais je dois continuer d'avancer. Ou alors je peux renoncer. Je finirais bien par me réveiller de toute manière, me disant que tout ceci n'est qu'une espèce de mauvais rêve.

      Il fait ici de plus en plus chaud, ce tunnel est une fournaise. Je suis en sueur, c'est très désagréable. Mes vêtements sont trempés et j'ai de plus en plus de mal à pouvoir continuer de glisser sur le dos. Éreintée, je me décide à tout arrêter. Je me relâche et ferme les yeux en espérant pouvoir me réveiller, mais même après plusieurs heures d'inertie je suis surprise de toujours être la prisonnière de ce bien curieux rêve.

      Décidant plus par dépit que par choix, je me force pour continuer d'avancer et alors que je commence à perdre espoir de trouver une issue à ce cauchemar, je sens subitement ma tête dans le vide. Essayant de me relever pour ne pas chuter, je suis malheureusement presque immédiatement happée par le vide.

      C'est la chute. La chute est vertigineuse, j'essaie de me rattraper quelque part, mais c'est impossible. Et alors que je sombre dans le néant.



                    « Éveil toi ! »

L'Océan-Monde [TERMINE]Όπου ζουν οι ιστορίες. Ανακάλυψε τώρα