Fin d'une parenthèse

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Il prend son temps. Me jauge et m'oblige à supporter son silence. Mais je tiens bon. Droite devant lui. Je lui offre sur un plateau ce qu'il est venu chercher en échange d'un léger détail. La vie de Nicolas.

Il comprend certainement ce qu'il doit représenter pour moi. Sa façon de le regarder avec méprît et haine en dit long sur ce qu'il voudrait lui faire. Et ça m'effraie encore plus.

- Hors de question! Laisse le me tuer. Je partirai pas sans toi Morgane.

Mes yeux se ferment. Je refuse de le regarder. Sa voix est remplie de douleur. Mais pas seulement physique. Nous savons tous les deux ce qui est en train de se passer. Mais l'un de nous doit vivre. Il n'a rien à voir avec mon histoire. Ni avec les merdes que je traîne. Il mérite tellement mieux qu'une femme cassée comme moi.

Alors voyant qu'il n'en fera rien, que sa décision de le tuer est de toute façon prise, je tente un dernier coup. Celui qu'il redoute tant.

Aussi rapidement qu'un battement d'aile, d'une main agile et d'un geste précis, je sors ma deuxième arme bien caché sous mon blouson. Et avant qu'il n'ai réagit, je bloque l'arme contre ma tempe. Sans trembler. En ayant prit soin de la charger. Prête à mettre fin à mes souffrances. Cette arme peut me sauver de lui.

Il ouvre alors de grands yeux. Sa main s'élève en l'air. Ne bouge pas. Et fait signe à ses gardes que personne ne bouge. Le temps se suspend à nouveau. Mon regard bien encré aux siens. Seuls les gémissements de Nicolas s'entendent. Les hommes essaient de le garder en place. Mais son état ne lui permet pas d'agir davantage. Il ne peut qu'assister à cette scène surréaliste.

Des secondes interminables passent. Je ne tiens pas à appuyer sur la détente. Pas temps que Nicolas ne soit dans une ambulance. Je veux le faire réagir. Je veux gagner du temps. Je veux le sauver quitte à me tuer. Je suis capable de tout. Sauf de ne rien faire.

Alors au bout d'un moment, mon bourreau avance prudemment vers moi. Nos regards toujours encré. Je sais qu'il essaie de lire en moi. Comme avant. Sauf qu'aujourd'hui, à force de travail sur moi, plus rien ne transperce, ne fuite et ne montre mon état intérieur. Je suis un coffre fort. Et il n'a plus les clefs.

Une fois à quelques centimètres de moi, mon arme bien appuyé sur ma tempe et sans trembler, la tension monte encore d'un cran. Il en sort alors un téléphone et compose deux chiffres. Il le met à son oreille et me regarde à nouveau . Je peux entendre l'interlocuteur parler.

- Il faudrait venir de suite sur le tarmac de l'aéroport privé sud à la sortie de Paris. Un homme est blessé.

La personne n'a pas le temps de répondre qu'il raccroche déjà.

- Satisfaite mon amour? Est ce qu'on peut enfin se barrer d'ici ?

Mon cœur va exploser et mon âme se perd à nouveau. Je sauve l'homme que j'aime alors que personne n'est là pour moi. Encore une fois, je perds la bataille. Tout ça pour en arriver là...

Le deuxième avion commence à faire gronder son moteur. Il se tient prêt à décoller. Ces hommes partent un à un vers l'engin. Seulement quatre d'entre eux restent à l'appui. Deux pour Nicolas. Et deux derrière moi.

Lorsque j'entends au loin le son du samu mon cœur rate un battement.

- N'y pense même pas. J'ai fait ma part du marché, alors fais le tient?

Il parle entre ses dents serrés. Au bord de la crise de nerf, il est prêt à en finir à sa manière car le temps est compté pour nous tous. Alors à contre coeur je le laisse prendre mon arme qu'il donne à un de ses hommes. Lentement il prend fermement mon bras.

Et lentement mes yeux voient une dernière fois l'homme que je connais à peine.

Lentement dans ces quelques micro secondes je lui montre à quel point je suis désolé, à quel point je suis attaché à lui et à quel point sa rencontre m'a fait du bien.

Pendant cette courte parenthèse de deux ans, j'ai eut cette occasion tant rêvé de vivre une vie ordinaire, ennuyeuse et presque sans danger, sans peur.

Mon corps me délaisse peu à peu. J'arrive difficilement à marcher. Je le sens me maintenir avec force. Une fois passer à côté de Nicolas, mes larmes me trahissent et coulent toutes seules.

Plus que quelques mètres avant le retour à la violence, à l'enfermement et à l'inconnu. Car je n'ai aucune idée de ce qu'il prévoit pour me punir.

Une chose est sûr, il n'a pas prit tous ces risques pour rien. Et je vais en payer le prix fort.

Lorsque je gravis les marches pour entrer dans le jet, le samu arrive sur le tarmac.

Et au moment où la porte se ferme derrière moi... j'entends Nicolas hurler mon nom... celui d Élia.

POUR NOS MENSONGESDove le storie prendono vita. Scoprilo ora