CHAPITRE QUATRE-VINGT-DOUZE .3

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Le sous-officier fronça plusieurs fois les sourcils, cherchant ses mots.

— Faut voir, lieutenant, lâcha-t-il elliptiquement, n'osant pas trop s'avancer.

Devant l'air interrogateur de la jeune fille, il poursuivit.

— Faut voir comment vous êtes installée dans votre...kañv, il buta sur le mot, ayant presque peur de le prononcer, et comment vous pourriez l'utiliser ? marmonna-t-il.

Il redoutait quelque peu de fâcher la jeune femme. L'amie d'une déesse, surtout si elle est colonelle de votre régiment, ça ne se traitait pas à la légère.

Suwane lui fit signe de patienter et courut à son engin qu'elle rapprocha du chariot, attirant l'attention sur elle.

L'adjudant fusilla ses élèves du regard, pour les inciter à se replonger dans l'étude et la manipulation du grand fusil à pompe dont ils avaient la responsabilité, avant d'observer Suwane dans son étroit cockpit. Il semblait perplexe.

— Même avec des bras plus longs, ça ne sera pas facile.

L'armurier fit signe à son aide de lui apporter un modèle en pierre de l'arme, du même genre qu'elle avait manipulé à la prépa TAP. Suwane se rendit compte qu'il disait la vérité. Non seulement elle avait les bras trop courts pour manœuvrer l'arme, mais en plus celle-ci était vraiment trop lourde et trop encombrante.

— Il faudrait que vous puissiez l'utiliser depuis l'intérieur. Je ne vois pas d'autre solution.

Suwane opina, elle était parvenue à la même conclusion. Cela demandait de modifier le cockpit et surtout la disposition des carreaux de verre.

Elle était assise bien au milieu de son appareil et se déplacer un peu plus sur la droite ou la gauche n'était pas impossible, mais sans doute malcommode. Suwane remercia l'adjudant et lui demanda la permission d'emprunter le modèle en pierre pour quelques essais.

Sur un signe de son supérieur, l'aide lui démonta l'arme en deux parties qu'il installa derrière son siège. La jeune femme retourna à la maison forte en un petit vol de quelques minutes. Elle y arriva peu avant le retour d'Adacie avec ses deux kañvs et sa dizaine d'élèves pilotes.

Les deux amies passèrent quelques instants ensemble, le temps que les bouteilles d'énergie soient changées sur les deux appareils et que le second groupe ne s'envole pour de nouveaux exercices de pilotage et de navigation. Suwane assura qu'elle faisait attention à sa cheville et raconta en quelques phrases qu'elle faisait seulement quelques petits essais sur son kañv.

Elle partagea une bière et un bol de brouet avec Adacie, qui repartit au plus vite. Tranit était avec ses groupes d'assaut et allait sans doute passer deux ou trois jours avec eux, avant de pouvoir revenir à la maison-forte, aussi Suwane savait qu'elle avait l'après-midi pour elle seule, avant que Géhémias ne l'appelle pour faire des essais sur les appareils de transport.

Suwane réfléchit à ce qu'elle voulait faire. Il ne devait y avoir rien de bien difficile. Elle voulait juste posséder une arme et combattre si nécessaire. Elle décida de pratiquer une fente dans la verrière du cockpit, comme les chars de combats avaient fait pour installer les FLAPACA.

La jeune fille en avait vu deux modèles d'assez près quelques jours plus tôt. Elle vit qu'une petite ouverture un peu sur sa gauche au même niveau que son épaule permettrait de manipuler l'arme.

Les chevaliers volants et leurs écuyers devaient s'habituer à manipuler leurs armes des deux mains. Harpon, hallebarde, arbalète, lance ou javelot, il fallait être capable de les utiliser de n'importe quelle façon.

Suwane s'y était souvent entraînée. Ce n'était pas si difficile que ça. Mais le FLAPACA devrait tout de même être fixée sur un pied, comme sur les goélands, pour ne pas perdre de temps à mettre l'arme en joue.

Elle devrait toujours être prête à servir. Suwane se fit apporter un système de fixation par la garde d'astreinte, tandis qu'elle parvenait à emprunter à Géhémias un artisan qui remodela la verrière selon ses besoins.

Vers quinze heures, Suwane fixait le modèle en pierre sur le trépied. L'immense canon d'une toise de long sortait du cockpit par la fente aménagée. Suwane fit un petit vol et s'aperçut que cela ne changeait rien au vol du kañv.

Malheureusement, malgré la facilité apportée par le système de fixation, la manipulation de l'arme était malaisée. Trop lourde en fait. Suwane se demandait comment cela serait avec un vrai modèle pour réarmer la pompe ou réapprovisionner l'arme en plein vol.

Elle poussa un petit soupir de déception, mais revint se poser près du chariot armurerie, où des écuyers s'entraînaient encore. L'adjudant était avec Alwine qui nettoyait l'arme avec laquelle elle s'était entraînée.

Ils vinrent tous deux observer l'appareil de Suwane. Le sous-officier opinait du chef, comprenant ce que la jeune écuyère voulait faire, mais se tourna vers elle, légèrement sceptique.

— Est-ce que vous avez besoin d'une arme pivotante lieutenant ? C'est comme sur un oiseau ?

— Non, écrivit Suwane sur son cahier en le faisant lire par Alwine. Je ne pense pas.

— Alors c'est encore plus facile, expliqua-t-il. Deux pieds fixes pour que le fusil soit toujours bien dans l'axe de visée et vous bougez votre engin pour aligner votre cible et tirer. Ça sera bien plus pratique de la sorte.

Suwane parla du poids et de la force nécessaire pour manipuler l'arme d'un seul bras, mais l'adjudant balaya tout cela d'un revers de la main en souriant, bien plus confiant qu'un peu plus tôt.

— Le mieux c'est d'essayer !

* * *

Merci pour votre lecture. Si vous avez aimé, m'offrir un petit vote serait fort sympa.

Vixii


PS : Ceci est l'avant dernier segment du chapitre. Le suivant sera là dimanche. Ensuite, il restera les 5 ou 6 segments du chapitre 092, le dernier de cette partie. J'espère pouvoir les sortir à un rythme un peu plus rapide (1 par jour ?) avant de faire une petite interruption de quelques semaines : des examens partiels en pagaille à préparer... puis à corriger et une relecture un peu plus attentive du volume 5 de Tranit , chose que j'ai négligée depuis quelques mois alors que j'ai des problèmes de calendrier dans mon déroulement.

Les larmes de Tranit - 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant