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 Le dernier cours de la matinée et de la journée, nous ne l'avons pas en commun, c'est d'ailleurs l'un des rares à être comme ça. Au début, je dois reconnaître que ça me fait un peu bizarre, pourtant, ce n'est pas nouveau, c'est juste mentalement où ça me pose des problèmes, ça fait quand même quatorze semaines que c'est comme ça et ce n'est qu'aujourd'hui que je suis dérangée par cette disposition, si ça, ce n'est pas de l'idiotie profonde.

En avoir conscience ne m'empêche pas le moins du monde à le rejoindre à la sortie de sa salle à la fin des cours. Je sais bien que je pourrai aisément partir et rentrer chez moi, surtout que Fauve m'attend déjà depuis plus d'une heure, ayant fini plus tôt. Mais non, je tiens à mon petit détour pour le voir avant d'y aller et discuter jusqu'à la voiture. Je me fais pitié. J'en suis fière, c'est déjà ça.

— Qu'est-ce que tu fais là ? s'étonne Elijah ne s'imaginait vraisemblablement pas à ce que je prenne la peine de l'attendre avant de partir, mais il semble agréablement surpris.

— J'étais venue de dire à demain en face... Et je voulais aussi te prévenir que j'ai promis à ma sœur de passer du temps avec elle, alors on ne pourra pas se voir cet après-midi. Bon à demain.

Moi par contre, je suis gênée, il est agréablement surpris, mais je suis affreusement gênée, je ne sais pas ce qu'il m'a pris de l'attendre à la fin de son cours, c'était complètement idiot. Je reconnais que dans les comédies romantiques ça rend bien, mais à quel moment le décor de bluette pour adolescents me correspond, soyons réalistes. Là, l'intérêt est quand même très minime, il ne va pas non plus me raccompagner jusque chez moi, le parking n'est qu'à cinq cents mètres. J'ai tellement honte de moi, que je me tire, je le laisse comme ça, en plan, encore. J'entends Elijah rire derrière moi et je ne peux même pas lui en vouloir, j'ai moi-même très envie de me foutre de ma gueule. C'est la dernière fois que je tente quelque chose parce que ça rend bien à l'écran ou sur le papier, la prochaine fois, si je fais quelque chose, je le fais sans l'influence extérieure.

Honnêtement, je n'aurai absolument rien contre me dégonfler, le problème, c'est que dans ma grande bonté, j'ai envoyé un SMS à Elijah, juste au cas où il serait encore réveillé. Sauf que cet idiot est encore réactif à minuit vingt. Je n'aurais quand même pas pu prédire. Surtout que notre premier cours est à huit heures demain matin. Alors maintenant, si je me dégonfle, ça va se voir, puisqu'il est prévenu. Quelle intelligence remarquable et ça se dit intelligence artificielle la plus puissante du monde, bah il y a du boulot avant d'être au niveau des humains.

Je me plains beaucoup, mais en vrai, je suis plutôt contente d'y aller, juste, après réflexion, j'aurais préféré qu'il ne s'en rende jamais compte, ça, il aurait fallu y penser avant. J'arrive donc peu avant minuit devant la maison des Stone et, comme j'aurai pu m'en douter, la seule lumière qui est encore allumée, c'est celle de la chambre d'Elijah. Ce n'est sûrement pas le seul jeune de notre âge à être encore réveillé à cette heure-là, mais il aurait quand même plus faire des efforts pour s'endormir aussi tôt que ses sœurs. Arrêtant de perdre inutilement du temps, de toute manière, je me doute bien que je peux mettre une heure à arriver, maintenant, il sera forcément encore debout, j'escalade la façade de la maison pour accéder tout de suite à sa chambre. Ce n'est sûrement pas la manière la plus polie pour s'introduire dans une maison, mais j'ai fait bien pire, au moins, cette fois-ci, j'y suis à peu près invitée et de toute manière, je ne sais pas si c'est beaucoup mieux de sonner à la porte à minuit passé. Je me vois très mal passer devant ses sœurs.

Je pourrais très bien ouvrir la fenêtre toute de seule, mais il est là, alors autant qu'il le fasse. Surtout qu'il est juste à côté de l'ouverture, il est en train de réviser à son bureau, même si je devine bien qu'il fait surtout ça pour s'occuper en attendant et qu'il n'est plus du tout dans son travail, ça se voit très bien avec son regard qui se perd dans le vide. Vu qu'il ne fait pas attention à l'extérieur, je toque, le faisant sursauter au passage, mais au moins, il me remarque et se lève pour m'ouvrir.

RONII (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant