Chapitre 6

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Une seconde après, la réponse de Candice s'affiche sur mon écran :

11 h 37

Comment vais-je faire sans toi ??? Les jumelles ne vont pas arrêter de me raconter leur incroyable vie et je vais encore devoir les écouter sans rien dire ! Je vais en mourir ! J'espère que ça vaut le coup que je me sacrifice pour toi, tu me revaudras ça ! Repose toi bien ! A demain !

Candice

J'éclate de rire en voyant son message mais je n'ai pas le choix, il faut que je fasse exactement ce que le professeur m'a dit. Je range mon téléphone dans mon sac et reprends ma route. J'arrive rapidement à la maison, je pousse le portail et grimpe les marches une à une, une fois sur le perron, je sors les clés et me réfugie à l'intérieur de la maison, bien au chaud. Ma mère est encore au travail et ma soeur est toujours au collège, j'ai l'après-midi devant moi !

Je me déchausse, enlève mon manteau et cours dans la cuisine me préparer un bon chocolat chaud, j'enfile ensuite mes doux chaussons pour être à l'aise et me place devant la télévision. Comment vais-je faire ce soir pour sortir à minuit ? Tout un tas de questions me trotte dans la tête et je ne trouve aucune réponse. Pour me changer les idées, je décide de monter dans ma chambre et d'écouter de la musique. J'enclenche une playlist et me laisse bercer par la douce mélodie de Shaw Mendes.

*

-C'est moi ! crie maman de la cuisine

Je sors précipitamment de ma chambre et dévale les marches pour la rejoindre. Elle porte encore sa blouse d'hôpital et range les courses. J'entre à mon tour dans la pièce et lui colle un bisou sur la joue.

-Coucou maman !

-Bonjour ma chérie, ta journée s'est bien passée ?

-A merveille !

La culpabilité me ronge, je déteste lui mentir, mais il le faut, une fois que Monsieur Ross nous aura expliqué ce qui se passe, peut-être pourrais-je lui parler. Mais pour l'instant, je dois me taire et respecter ma promesse. Je sors des boîtes de conserve du sac que je commence à ranger dans le placard.

-Oh, me dit ma mère, c'est gentil de vouloir m'aider mais je peux me débrouiller, ne veux tu pas aller chercher ta soeur plutôt ? Il commence à faire nuit et je ne voudrais pas qu'elle se retrouve toute seule à attendre.

-C'est comme si c'était fait.

Je cours dans l'entrée enfiler mes converses et sors. Effectivement, la nuit commence à envelopper la ville. Les lampadaires sont déjà allumés et les passants se pressent pour rentrer chez eux. Je me dirige vers mon garage et prends mon nouveau vélo bleu, ma grand-mère me l'a acheté pour mon anniversaire cette année. Je me souviens que je l'avais remercié gentiment même si en réalité je n'avais pas compris l'utilité de ce cadeau sur le coup. Je crois que je comprends maintenant, un vélo ça sert toujours. Je songe d'ailleurs à l'utiliser ce soir pour mon escapade nocturne, peut-être pourrais-je sortir par ma fenêtre et y aller en vélo, cela m'éviterai de marcher. J'y penserai plus tard, pour l'instant, ma sœur m'attend . Je grimpe sur le vélo et une fois bien assise sur la selle, m'engage sur la route. Je ne mets que dix minutes à rejoindre son collège, elle attend là, sous un grand arbre au tronc clair. Ses petites moufles aux mains et son bonnet bien enfoncé sur sa tête pour lutter contre le froid hivernal. Ses petits yeux gris fixent un point lointain. Je lui fais un grand signe de la main et elle m'aperçoit :

-Elona, j'ai cru que j'allais devoir rentrer à pied !

-Désolée, maman est rentrée tard du travail et je n'ai pas vu l'heure.

-Ce n'est pas grave, maintenant tu es là.

Je lui souris et elle prend place derrière moi sur le porte-bagage. Elle entoure ma taille de ses bras et pose sa tête contre mon dos.

-Prête ? je demande

-Allons-y !

Je commence à pédaler et prends la direction de la maison. Ma sœur se tient fermement à moi ce qui me rappelle qu'elle est encore si fragile et si petite. Elle parait si vulnérable dans ces moments là que je me fais la promesse de toujours veiller sur elle. Elle est ma petite sœur et je me dois de la protéger. En voyant notre maison, Lisy se décolle de moi pour sauter du vélo et courir rejoindre ma mère. Je soupire en rigolant et range mon vélo. En entrant dans la maison, je sens une délicieuse odeur de viande grillée et de pâtes. Je prends place sur une chaise à côté de Lisy et maman s'avance vers nous, un plat à la main.

-Oh, s'exclame t-elle en nous voyant, vous êtes rentrées !

Ma mère pose le plat sur la table et je constate avec joie qu'elle a fait son célèbre rôti !

-Qu'as tu fait de beau aujourd'hui à l'école ? demande ma mère à Lisy

Ma sœur enroule quelques pâtes autour de sa fourchette puis lève les yeux vers ma mère :

-Nous avons disséqué un rat et c'était vraiment horrible ! se plaint-elle

Ma mère place sa main sur sa bouche dégoûtée et je fais la grimace. Je déteste moi aussi disséquer les animaux, à quoi cela sert-il ? Ces pauvres bêtes sont tuées et données à des élèves qui souvent au lieu de les disséquer, les réduisent en morceaux. Je fais un geste de la main pour chasser cette pensée et reporte mon attention sur mon assiette.

-Vous aimez ? nous questionne ma mère

Ma sœur acquiesce avec de grands yeux et la bouche pleine, je m'apprête à répondre moi aussi quand mon téléphone bipe. Ma mère me lance un regard sévère :

-Pas de téléphone à table Elona, tu le sais.

-Désolé, je réponds avec un sourire maladroit

Nous finissons de manger et je me lève pour débarrasser, je file ensuite rapidement m'isoler dans ma chambre et ouvre mon portable :

20 h 43

Vous avez un appel manqué de Candice.

Je m'apprête à la rappeler quand on sonne à la porte.

-J'y vais, j'entends ma mère crier de la cuisine

Intriguée, je sors de ma chambre et descends les premières marches aux pas de loup, à l'entrée de la porte se tiennent deux hommes en costume. Je tends l'oreille et arrive à intercepter la conversation :

-Votre fille Elona est-elle là ? demande l'un des deux hommes

De suite je prends peur.

-Je ne sais pas si vous vous en souvenez, reprend l'homme, mais il y a un mois, vous avez passé un test pour vérifier que vous n'étiez pas porteur du virus.

-Oui, je m'en souviens, déclare ma mère confuse en haussant les sourcils

-Il se trouve que nous avons trouvé quelque chose d'anormal dans l'échantillon de votre fille, pouvons nous...

Je n'ai pas besoin d'en entendre plus, je remonte les marches et m'enferme dans ma chambre. "Ils ne vont pas tarder à venir vous chercher" avait dit monsieur Ross.

Affolée, je cours chercher un gros sac à dos, dans la précipitation j'enfouis dedans tout ce qui me semble utile : une grosse veste chaude, mon bonnet, une grande bouteille d'eau, un briquet et pleins d'autres choses. Ensuite je prends un stylo et une feuille et gribouille un mot à l'intention de ma mère :

Je pars pour quelques semaines, ne vous inquiétez pas, je serai en sécurité, je vous aime, Elona.

J'entends des pas dans l'escalier, ils s'approchent de ma chambre. Je me dépêche de cacher le mot sous ma couette, je saute par la fenêtre et cours le plus loin possible. Je peux entendre ma mère qui affolée crie aux hommes qu'elle ne sait pas où je suis et commence à pleurer. Cela me brise le cœur de partir sans aucune explication et de les abandonner ainsi mais je n'ai pas le choix, je ne peux pas les laisser m'emmener. Je dévale mon jardin, enjambe la clôture et pars en direction de l'église. Je ne sais plus ce que je dois faire à présent, je suis terrifiée. Que va t'il se passer s'ils me trouvent ? Qui sont ces gens ? En tout cas, je suis sûre d'une chose, je reviendrai, pour ma mère et pour ma petite sœur.

ImmuniséeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant