II.

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29 août 1939

Le temps s'était fait plus clair, et bien plus chaud que quelques mois auparavant. Les températures étaient agréables, parfois, on souffrait presque de la chaleur. Pour Bill, qui avait dans le sang les gênes de sa grand-mère russe, ces chaleurs estivales devenaient difficiles à supporter, en cette fin de mois d'août, comparé aux gelées et au froid perpétuel de la Russie. La journée s'était écoulée tranquillement, tout aussi vite que les autres, au même rythme, rappelant bien au monde que les jours sont comptés chez tous, et que ce décompte avait commencé depuis bien longtemps. Le brun, les cheveux fraichement coupés par sa grand-mère, arpentait les rues d'un pas rapide, le dernier journal du kiosque qu'il venait tout juste d'acheter se balançant dans sa main droite. Il n'aimait pas vraiment cette nouvelle coupe, trouvant que ça ne lui allait pas. Mais avec Tom, ils s'étaient promis de se couper les cheveux, pour essayer de passer inaperçus parmi tous ces antisémites, homophobes, ces racistes qui constituaient la société actuelle. Bill et Tom représentaient juste une minuscule minorité de la population, et en ces jours, les minorités n'ont en général rien de bien constructif à apporter à la société et au gouvernement pour qu'ils soient acceptés ou écoutés.

Bill accourait chez Tom, comme pour les bonnes nouvelles. Il semblait être plutôt heureux, comme ça. Pourtant, ses pas le trahissaient, et son anxiété se lisait sur son visage, comme s'il était suivi. Il regardait sans cesse en arrière, ayant cette amère impression d'être traqué par quelqu'un.

Il avait lu des choses. Des choses qu'il n'aurait peut-être pas dû lire. Des choses qu'il n'était pas sûr de réellement comprendre. Des choses qui allaient entraîner des conséquences. Des choses qui ne devraient pas se passer. Des choses qu'on ne peut pourtant pas contrôler.

Il devalait les rues de Paris sans vraiment savoir où il se rendait, en en oubliant même de se repérer, à tel point qu'il se perdit bien deux ou trois fois avant de finalement trouver la bonne rue, cette rue qu'il avait empruntée tant de fois pour venir voir Tom, depuis maintenant plus d'un an.

Lorsqu'il arriva dans la vieille cour aux allures de cimetière automobile qui semblait si familière à ses yeux, il se dirigea immédiatement vers l'arrière, où il savait qu'il trouverait le brun qu'il recherchait. En effet, celui-ci était bien là, le nez dans une de ces vieilles autos au moteur défaillant. Totalement concentré et ailleurs, dans un autre monde, il n'avait pas entendu le cadet entrer dans l'atelier.

Bill arriva alors comme un boulet de canon, et fonça sur le corps replié en deux de Tom, provoquant à ce dernier l'effet d'un coup de poing bien placé. La boule en fusion qu'était le brun enserra le plus vieux entre ses bras en riant, un sourire malicieux se formant sur ses petites lèvres fines.

- Bill ! Qu'est-ce que tu fais là ?, demanda Tom, tout en répondant à l'étreinte de son homme avec tendresse.

- Tu n'es pas content de me voir ?, insinua le brun, taquin.

- Bien sûr que si, nigaud. Je veux dire, c'est ton jour de congé non ? Tu n'aurais pas mieux à faire ? Je suis sûr que Macha doit t'attendre.

- Je l'ai prévenue que je ne serais pas long. Je voulais te parler. J'avais besoin de te voir. Je me suis dis qu'ici, on ne risquait rien.

- Et qu'avais-tu de si important à me dire, pour venir me voir comme ça ?, questionna le plus vieux, sa main s'aventurant a retracer les courbes du plus jeune par dessus son haut.

- Je voulais être sûr que tu m'aimes toujours, Tom.

- Je t'aime jusqu'au ciel mon ange, et ça pour toujours, tu sais., répondit alors le concerné, laissant ses lèvres aller effleurer celles de Bill, amoureusement.

Je t'attendrai.Where stories live. Discover now