Mystère de Paul

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Je tiens la main de Luna, ignorant les regards stupéfaits posés sur nous. Elle appuie la tête contre mon épaule, ses beaux cheveux ramenés en tresse. Elle a enlevé ses bandages, et elle sourit doucement en dépit de l'inquiétude qui reluit toujours dans ses grands yeux  bleus. Je me sens mal chaque fois que je croise son regard, parce que j'ai l'impression que c'est Adrian qui me fixe, en m'implorant muettement de l'aider... 

L'angoisse est un peu plus supportable depuis hier. La visite de l'avocat a clarifié certaines choses, et il est encore possible de trouver des indices qui prouveraient l'innocence du frère de Luna. Nous devons juste y arriver avant qu'il ne lâche prise. La lettre retrouvée dans sa cellule m'a donné froid dans le dos, et Luna était bouleversée. Nous devons juste y arriver... avant qu'il ne soit trop tard...

Je soupire, résistant à l'envie de me lever, de débarquer de ce foutu véhicule et de courir au commissariat pour aller vérifier si tout va bien. Ma présence ne changerait rien, de toute façon, et je n'aurais probablement pas le droit d'aller voir Adrian. Je tourne mon regard vers la fenêtre, serrant un peu plus fort la main de la fille que j'aime.

 L'hiver est arrivé, et la neige tombe aux fenêtres du bus. Le froid trace des dessins de givre sur la vitre, et au travers, je vois l'école. Comment allons-nous affronter cette journée? Il faudra bien continuer de vivre normalement, malgré l'angoisse toujours présente...

-Paul.

Je sursaute, me tirant de ma réflexion. Le bus s'est arrêté devant le portail du lycée. Les étudiants descendent, un à un, mais Luna ne bouge pas, elle reste crispée sur le banc, tenant mon bras.

-Paul, je... je n'y arriverai pas.

Je la prends dans mes bras. Elle tremble. Elle  a peur, bien sûr. Peur que le personnel enseignant vienne la questionner sur son frère, peur de devoir  raconter la vérité. Et aussi... les regards... Je ne laisserais personne l'insulter, bien sûr, mais les regards sont si rapides, sournois. Et parfois, ils blessent plus que n'importe quoi d'autre.

-Ça va aller, je suis là. Je vais rester avec toi. Mais, Luna, tu... nous devons reprendre une vie normale, tu sais que c'est ce qu'il aurait souhaité.

Elle hoche la tête. Elle sourit, tristement, et nous descendons ensemble du bus, nous dirigeant vers le lycée. Et dans la multitude de fenêtres fouettées par le vent glacial, sur la façade de l'école, je distingue celle du bureau du directeur adjoint. Luna l'a vue aussi. Une idée me vient, et je lui murmure à l'oreille:

-Est-ce que nous devrions... chercher là pour essayer de trouver des preuves?

Elle acquiesce, et nous poussons la lourde porte de l'école, un nouvel espoir nous réchauffant le cœur.




La fille sur le banc du fondWhere stories live. Discover now