Mystère de Luna

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Nous entrons dans la salle de classe, main dans la main, unis par la même affection. Nous sommes les premiers à arriver, et sur le grand tableau, quelqu'un a tracé à la craie deux papillons blancs. Je me dis que c'est un signe. Que pour toujours, nous resterons ensemble, malgré mes ailes trop fragiles qui menacent à tout moment de se briser... Lui sera là pour me supporter.

Je m'assieds près de la fenêtre. Dehors, les flocons de neige tombent et valsent dans le vent comme de la poussière d'étoile. Je me rappelle, avant, j'aimais l'hiver. Maintenant, je ne sais plus quoi penser de ce paysage glacé et vide de toute couleur. Je vois le commissariat, au loin... Trouverons-nous des indices ici, dans cet endroit où mon frère et moi venions chaque matin, nous observant à la dérobée, la souffrance du passé encore à vif dans nos regards?

Les autres lycéens entrent en chahutant, leurs rires et leurs éclats de voix résonnant entre les murs de la classe. Je sens mes jambes trembler, et Paul me serre la main un peu plus fort.

Il y a trois filles qui nous regardent en chuchotant. Et soudain, je me rends compte que je ne souffre plus de me comparer à elles. Si Paul me trouve jolie, alors pourquoi devrais-je me préoccuper de l'opinion de ceux qui ne m'aiment pas?

-Luna!

On dirait que l'espace-temps se fige. Ce n'est pas la voix de Paul.  Une fille à la peau bronzée et à l'allure athlétique se tient juste devant mon bureau.

-Tu n'es pas venue à l'école, la semaine dernière. J'espère que tu n'as pas eu de problèmes?

Elle sourit. Il n'y a aucun jugement, aucune méchanceté dans son regard. Ses yeux sont grands et très bruns, elle est forte, elle a confiance en elle. Je fais non de la tête. Elle acquiesce et retourne avec ses amies, me saluant de la main.

Et moi, je ne tremble plus.

Je sens une main me caresser les cheveux. Paul sourit lui aussi. Il m'embrasse la main, et mon cœur bat à tout rompre. Je me sens si bien. Si à ma place. Est-ce cela, cette sensation si extraordinaire, que l'on appelle l'amour? Les regards ne me blessent plus... Une fille est venue me demander si j'allais bien, et j'ai senti qu'elle s'en inquiétait réellement. Je suis capable de ressentir... des émotions absolument merveilleuses que j'avais cru disparues pour toujours.

Était-ce... moi? Mon cœur était-il si blessé que je n'arrivais plus à distinguer le bien du mal, les regards bons des mauvais? Est-ce que... mes yeux ne voyaient plus la beauté du monde, aveuglés par trop de souffrance? Pourquoi maintenant, je me sens si bien? Pourquoi ai-je l'impression de revivre?

Je ferme les yeux.

Est-ce cela que tu souhaitais pour moi, Adrian? 


La fille sur le banc du fondWhere stories live. Discover now