Réconfort de Luna

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J'ai d'abord entendu ses pas sur le plancher usé de ma chambre. Il marchait lentement, comme par peur de m'effrayer. Je l'ai deviné avant même qu'il n'entre, entendant sa voix de l'autre côté de la porte. Il a persuadé les policiers de partir, et a enlevé la serrure.

Il hésite. Je sens sa présence, près de mon lit, la tête sous les couvertures. J'entends son souffle, chaque froissement de tissus provoqués par ses mouvements.  Il se rapproche encore. S'assoie à mes côtés. Je me crispe, attendant fiévreusement. Je ne veux plus avoir peur de vivre. Mais malgré moi, je crains de le blesser, s'il revoit mon visage après tout ce temps. Qu'il se sente coupable, encore. Je ne veux pas lui faire de mal. Mais j'ai besoin qu'il soit là.

Je me décide à bouger. Je ne parle pas, c'est encore trop tôt pour rompre le silence. Je me rapproche de lui, doucement, dissimulée sous les draps. Les barrières des années sont encore là, tangibles, nous séparant.

Puis tout se brise, l'éloignement, la tension, parce qu'il pose une main sur mon dos, ses longs doigts tremblant caressant mes cheveux. Le poids sur mon cœur se relâche. Sa paume est si chaude. Je me rappelle des souvenirs fugaces, ces moments où il me berçait, quand je n'étais encore qu'une enfant et que notre père ne rentrait pas pour la  nuit. Je me rappelle la sensation de ses doigts sur mes joues de petite fille. Les chansons qu'il fredonnaient pour m'endormir. L'affection douce qui étincelait dans ses yeux adolescents. Le parfum qui émanait de ses cheveux. Son amour protecteur de grand frère.

Et puis, la vision devient floue. La douleur se mêle au bonheur, je revoie des flammes qui brûlent, l'horreur dans son regard. Ces larmes qui sillonnaient ses joues enfumées de cendre. Les brûlures atroces sur mon visage, les hurlements, la culpabilité poignante dans ses yeux révulsés.

Un jour, je vais raconter mon histoire.

Mais pour l'instant, je me redresse d'un bond dans le lit, et je me serre contre la poitrine d' Adrian jusqu'à ce que les sanglots cessent de me secouer. Jusqu'à ce qu'il enroule ses bras forts autour de moi, et que je sente son odeur imprégner mes vêtements, comme au temps de mon enfance.




La fille sur le banc du fondWhere stories live. Discover now