Chapitre 24 -Tristesse et Désir

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Dans le chapitre précédent :

« Il veut que vous partiez. Ils vous donnent un cheval avec des provisions ainsi que des gardes pour vous escorter jusqu'à un royaume voisin où sont tous les survivants de votre seigneurie. J'ai essayé de lui parler, mais il ne veut rien entendre. Je suis désolé.

– Vous pouvez refuser de partir non ? demanda Claire.

– Je ne pense pas que le Roi soit du même avis. Il vous fera partir.

– Mais pourquoi ? demandai-je, abasourdie.

– Votre visage doit le hanter en ce moment.

– Dis-moi où il est, je vais le voir, annonçai-je en me levant.

– Je ne sais pas si...

– Amédé, tout de suite ! »

Il s'exécuta avec un soupir, mais je savais qu'il préférait me savoir ici plutôt que loin du château. J'étais en sécurité derrière ses remparts. Dans ce château.

***

Je marchai rapidement en direction de sa chambre. Amédé m'accompagnait pour éviter que je ne me perde. Mais contrairement à ce qu'il pensait, j'arrivais de mieux en mieux à me repérer à travers les couloirs. Je sentais une sorte d'odeur distincte, mais familière. Comme si le fil d'Ariane me conduisait vers mon mari.

Après plusieurs minutes de marche, je ne ressentis plus la présence d'Amédé, mais je continuai mon chemin. Celui-ci semblait m'avoir lâché en cours de route et je ne m'étais encore jamais aventurée dans cette partie du château. Tout était en mauvais état. Les murs s'effritaient et des trous entiers le perçaient. Le sol poussiéreux me donnait envie d'éternuer et ses toiles d'araignées me donnaient des frissons. J'avais l'impression d'être dans une autre maison complètement dénuée d'émotions chaleureuses et pourtant, c'était le même immense château.

J'essayai de respirer le moins possible pour éviter de suffoquer dans cet air morbide. Mais les différentes senteurs me prenaient tout de même d'assaut comme de vils serpents prenant plaisir à m'entourer pour m'effrayer. Je calmai les battements de mon coeur en dégageant plus loin une porte déjà entrouverte. Elle s'ouvrit avec un vieux grincement digne d'un film d'horreur.

Et je ne m'attendais pas à cette scène. Adonis se tenait devant une fenêtre où les rayons lunaires l'éclairaient. Son allure majestueuse ne l'était plus autant. Ses épaules affaissées et sa tête regardant le sol lui donnaient un air dépité. Triste. Je pouvais presque sentir son désespoir dans ce tableau dont il me faisait part.

« Tu ne devrais pas être ici. Je t'ai ordonné de partir. »

Sa voix basse ne me faisait pas peur. Au contraire, je ne dis rien et m'approchai de lui à petits pas comme si j'allais l'effrayer. J'avais l'impression d'être devenue le prédateur et lui la proie. Et cette vision des choses me fit mal. Je ne voulais pas qu'il se sente si faible, même si montrer cet état devait être un grand coup à son ego, je ne voulais pas le voir triste tout simplement. C'était étrange de se sentir ainsi, mais je mettais cet effet sur le compte de ce lien magique qui nous unissait. Peut-être même que dans les autres mondes, j'avais cette même attirance envers mon amant ?

Parfois je voulais me souvenir. Je voulais garder en mémoire tous les voyages que j'avais pu faire dans les autres mondes, mais les Moires avaient été claires là-dessus. Les Changeurs de Destins n'auraient pas connaissance des autres mondes. Cela pour éviter à notre cerveau de stocker des émotions susceptibles de nous éloigner de nos missions que ce soit émotionnellement ou physiquement.

Les Changeurs de Destins - Le Royaume d'HéliaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant