Épisode 4 - 4 L'Après Meurtre

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Kathy est au volant de la Mustang de Lionel, ce qui s'avère plutôt perturbant : il n'a guère l'habitude de se retrouver côté passager de sa propre voiture. Mais ce n'est pas comme s'il pouvait conduire.

À l'arrière se trouve le cadavre de la jeune fille, la faute d'un coffre trop petit. Ils l'ont donc simplement assise et sur la banquette et lui ont mis la ceinture de sécurité. Lionel ne la voit pas, bien sûr, mais il est certain qu'elle parait juste assoupie. Du moins tant qu'il reste un peu d'obscurité.

Il a beau ne pas pouvoir distinguer Kathy, il sait que celle-ci est tendue. Elle ne parle presque pas,  tapote régulièrement le volant et conduit plus brutalement que d'habitude. Il s'agit d'une réaction typique de quelqu'un qui n'a pas l'habitude d'enfreindre la loi et c'est exactement ce qui risque d'attirer l'attention sur eux.

Mais il ne dit rien. Il faudra qu'elle apprenne à vivre avec le crime et le danger, jusqu'à ce que cela devienne une seconde nature. Quelque part, cette partie d'innocence lui manque. Il culpabilise un peu d'avoir tué cette femme, mais uniquement parce que c'était un moment de faiblesse de sa part. Il n'arrive pas à regretter le geste en tant que tel et s'il tue si peu aujourd'hui, c'est uniquement parce que c'est plus pratique pour s'intégrer. Il n'aime pas non plus spécialement tuer : cela l'indiffère, et c'est peut-être le plus condamnable.

Kathy est toujours humaine, pour le moment. Mais on ne peut pas dire qu'il l'aide à le rester.

— On arrive, finit-elle par dire.

— Il y a du monde ?

— Non, personne.

Elle ralentit puis se gare, avant de couper le moteur. Lionel tend l'oreille, mais seule la circulation nocturne lui parvient, à quelques rues de là.

— Qu'est-ce que tu vois ? demande-t-il ?

— Nous sommes sur le pont. Les rails passent en-dessous et il y a un tunnel à cent mètres environ.

— Tu penses pouvoir la faire passer au-dessus du rebord ?

— Oui. Il y a un grillage, mais si je la lance ça devrait pas poser de problème. T'es sûr que c'est une bonne idée ?

— Certain. Il faut juste que tu vises bien les rails. Les trains vont vite ici, ils déchiquèteront le corps et l'enquête sera difficile. Mais si elle tombe à côté, ça sera plus compliquée.

— Je vais faire ce que je peux.

Elle ouvre la portière et quitte son siège, avant de faire sortir le corps inerte de la fêtarde décédée. Il imagine qu'elle la prend sur son épaule, ou dans ses bras.

Puis elle s'éloigne.

Pendant un instant aucun son. Il se demande si elle n'hésite pas, ce qui serait tout à fait dans ses droits. Il devrait être en charge de se débarrasser du corps, mais hélas il n'en est plus capable.

Le son du grillage se fait entendre d'un coup, ainsi que celui d'un corps qui s'écrase en contrebas, quasiment en silence.

— Merde, entend-t-il Kathy dire, paniquée.

Elle se rapproche alors de son côté. Il tâtonne pour trouver la manivelle de la vitre, avant de l'ouvrir.

— Qu'est-ce qui se passe ?

— Elle est tombée à moitié à côté. Il n'y a qu'une jambe sur un rail, tu penses que ça suffit ?

— Je ne sais pas. Si le train passe et l'entraîne, ça devrait aller, mais on ne peut pas en être tout à fait sûr. Le mieux serait que tu descendes.

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