Épisode 1 - 5 Loser

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C'est vers les cinq heures du matin que Taylor rentre de chez Sienna, épuisée. Elle se demande encore par quel miracle elle a cette fille dans la peau. Les deux femmes ne se ressemblent pas, elles sont les opposées même, mais il y a cette alchimie difficile à définir. Elle ne se sent pas bien dans les bras de la garçonne, ni en sécurité, ni choyée. Non, au contraire elle s'y sent en danger, sa peau lui fait mal tant elle la brûle. Ce n'est pas sain. C'est fusionnel et elle ne peut s'empêcher d'en redemander.

La maison d'Andrea est typique de San Francisco. En bois, le perron surélevé donne sur un minuscule jardin qui mériterait d'être mieux entretenu. La rue offre une vue sur la baie, même si elle n'y mène pas directement. Il ne s'agit pas du plus beau quartier de la ville, même s'il est bien plus fréquentable que celui de Sienna.

Taylor entre aussi discrètement que possible, mais à peine s'est-elle débarrassée de ses talons qu'Andrea descend. La policière a l'air effrayée, ou agacée. Difficile à dire avec le peu de lumière et son teint fatigué.

— Tu étais où ? demande-t-elle.

— Dehors. Il y a un couvre-feu maintenant ?

— Je m'inquiétais, espèce d'idiote. J'ai essayé de t'appeler, tu ne répondais pas.

— Je n'ai plus de batterie. Tu t'inquiétais pour ?

— Il y a un malade qui s'en prend à des filles. Des blondes, jolies.

— Tout moi.

Taylor se mord la lèvre en voyant la réaction de sa cousine. Celle-ci n'a pu cacher une larme, qu'elle essuie d'un geste vif avant de se retourner.

— Hey hey, dit doucement Taylor en prenant Andrea dans ses bras. Désolée, je n'aurais pas dû plaisanter. Je vais bien, ok ? Et je ferai attention. Promis. Il ne m'arrivera rien.

— Ok...

— Ça va mieux ?

Andra fait signe de la tête, puis se reprend :

— Tu étais avec un mec, c'est ça ?

— Comment dire...

— Non, pas de problème. Mais tu sais, tu peux en faire venir ici. Juste tu préviens avant, parce que c'est super embarrassant si on en a un chacune en même temps. Mais t'es pas obligée d'aller chez lui. Puis quel mec c'est pour ne pas te raccompagner ? Comment il s'appelle ?

— On en parle demain, plutôt ? Là, j'ai juste envie d'aller dormir.

*

Taylor se réveille avec difficulté, gênée par le bruit incessant des enfants qui piaillent dans la rue. Sa réaction première est que l'école voisine vient de commencer, mais son portable (qu'elle a pensé à brancher par miracle) l'informe que c'est plutôt l'heure de fin.

Ensommeillée, elle déjeune devant son PC bien plus antique que ceux de Sienna. Les documents que lui a fournis son amante de la veille sont aussi complets que promis et décrivent dans le détail des crimes sordides. Le tueur, puisque à priori il s'agit d'un homme, ouvre l'abdomen de jeunes femmes encore vivantes, puis il les poignarde à la poitrine. Total psycho.

Après un café et un grand verre d'aspirine, la blogueuse se lance dans la rédaction de son billet :

San Francisco a son Jack L'Éventreur.

Mais c'est un loser...

La police a décidé de le garder sous le sceau du secret, mais sur The Bitch Hour, on préfère le scandale à la discrétion. Breaking News, nous avons donc un nouveau psychopathe en ville. Les journaux l'appelleront sûrement Jack quand ils en parleront, mais puisque visiblement je suis la seule à ouvrir ma g***** pour le moment, je m'occuperai de son surnom.

Et ce sera... roulement de tambour...

Johny la Cisaille. Moins glamour que Jack, certes. Mais voyez, le type ne trouve rien de mieux que de passer à tabac des petites blondinettes, avant de liquider son complexe de p'tit zizi avec un couteau de boucher. D'ailleurs, les nanas en question ont toutes trois grammes dans le sang au moins, monsieur chasse donc la proie facile. Aucun talent. Je vous mets les photos, pour prouver que je n'hallucine pas, mais faîtes gaffe c'est pas joli.

Donc voilà son quart heure de gloire, en exclusivité sur mon petit blog. Après ça sera fini, on l'oubliera et la vie sera comme s'il n'avait jamais existé. Johny la Cisaille, tu as bien pourri la vie de quelques familles, mais sache que tu es un loser.

J'espère que ce texte te trouvera mon Johny. En attendant mesdemoiselles, mesdames, si vous vous bourrez la tronche, rentrez pas seule.

C'était Blondie de The Bitch Hour. La section commentaires est ouverte, mais si je trouve un troll je le scalpe moi-même.

Puis vient l'heure de bosser.



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