Dans tes yeux

Chapitre 53

Je n'arrive pas à lui répondre. Je ne sais surtout pas quoi dire. Mentir, dire vrai, cacher, expliquer ... Je le regarde, je sens mes lèvres trembler. Je ne ressens plus l'envie de pleurer. Juste la panique me submerger. 

Moi
"Je .. Je sais pas si on doit en parler ce soir Antoine."

Antoine
"Tu m'as demandé de venir parler, je suis venu Marco. Tu ne peux pas fuir la discussion. Tu as fait une bêtise ?"

Il devient suspicieux, comme si je le trompais.

Moi
"Non ..."

Il sourit faussement.

Antoine
"C'est Jules, c'est ça ?" 

Il a l'air tellement déçu en le disant. 

Moi
"T'es malade ? C'est un collègue, je dois prendre mes distances avec l'équipe et tu sais très bien pourquoi."

Antoine
"Pour éviter que Kylian ne s'approche de toi ?"

Moi
"Tu deviens pathétique Antoine, c'est rien de tout ça."

Il rit jaune. 

Antoine 
"Ok. Dis moi ce qu'il y a dans ce cas ?"

Il se met face à moi et me dévisage. Je ressens du dégoût dans son regard. 

Moi
"Vraiment Antoine, je ne sais pas si c'est bonne idée..."

Antoine
"Je le savais. Tu sais quoi ? J'abandonne."

Il se lève, je le regarde mais je reste impuissant. 

Moi
"Ne t'en va pas .."

Il me fixe d'un air méprisant cette fois.

Antoine
"Je donne tout pour toi. La fois où tu avais disparu, parce que tu dormais dans le parc, la discussion à propos du coming-out, tout ça, ça m'a mis une claque. Je veux plus te perdre. Je veux avancer avec toi. Tu te souviens de tes propres mots ? 'Crois y aussi fort que j'y crois' ? C'était du vent, tu voulais juste me garder auprès de toi et faire ton choix après ?"

Moi
"Pas .. Pas du tout ? J'étais sincère c'est ..."

Antoine
"Tu l'étais ? Donc c'est du passé c'est ça ?"

Je dois avouer que je n'ai pas la réponse à cette question. Non, je l'aime, c'est sûr. Mais est-ce que j'arriverai à passer outre tout ça ? Le temps de réfléchir était visiblement trop long pour lui.

Antoine (en sortant)
"Débrouille toi. Tu n'as pas besoin de moi et je déteste être pris pour un con. Je suis patient Marco, on prendra le temps qu'il faudra ... je t'aime putain, mais je ne peux pas faire ça à ta place."

Il s'en va et ferme la porte derrière lui. Mon coeur me dit de lui courir après et de le rattraper. Mon cerveau, lui, empêche mes jambes de réaliser quoique ce soit. Je reste là à fixer cette porte. Et à nouveau, je me sens vide. Je n'ai pas envie de pleurer, je ne suis pas en colère. Juste vide. Sans émotion, sans pensées pour une fois. Je voulais juste le protéger à la base. Et j'ai encore une fois échoué. 

Le lendemain, 12/03/2018, 7h,

Je peine à sortir de mon lit. Je n'ai pas envie de croiser Antoine, ni même une quelconque personne. Je sais qu'il le faut, mais je n'y arrive pas. J'envoie un message à Didier pour lui dire que je ne pourrais être présent, je lui envoie mes entraînements et je sais qu'il pourra les assurer. Je me rendors et irai voir un médecin en simulant quelque chose dans la journée. J'étais un professionnel pour ça au collège, pour fuir les cours sans me faire disputer. J'en profite pour me rendormir un peu. 

Mon téléphone me réveille aux alentours de 12h, il n'arrête pas de vibrer. Une suite de notifications, sans fin. Je panique, je n'ose pas regarder et l'éteins. C'est vraiment pas le moment. Les réseaux m'angoissent, je sais que ce n'était pas un appel, et j'ai peur de retomber sur un message qui me bloquerait.

Je décide d'entamer la journée, je vais voir les médecins qui m'arrêtent pour la journée pour "surmenage", j'en profite pour voir Dider rapidement et discuter avec lui. Il insiste pour que je me repose, mais j'insiste pour valider les prochains entraînements avec lui. Il nous reste 11 jours avant le prochain match, il est censé être facile, mais je veux que nous soyons prêts. 

Cela fait 2 heures que mon téléphone est coupé. Je vais pour me poser dans ma chambre et me prélasser en attendant le dîner. J'ai besoin de ne rien faire aujourd'hui, je sens que tout est de trop. Mais la curiosité me démange, je rallume le téléphone. 

J'attends quelques minutes sans rien checker, je regarde d'abord mes SMS, rien. Je regarde sur WhatsApp, rien d'important non plus. Je regarde Instagram, et c'est là que je comprends. 

Mon compte Instagram a explosé, j'ai des centaines de DMs. Pourquoi ? Une story. Une seule. Celle d'Antoine. On y voit une photo où je les brief sur un échauffement prise par un des gars de la comm'. On me voit clairement, avec un regard passionné vers eux. J'aime beaucoup cette photo, je l'apprécie instantanément. On voit uniquement Paul, Antoine, Hugo et moi, mais le reste de l'équipe était bien présente. "Ready for 2018, thanks Coach" avec un joli coeur blanc. Il nous a tous tagué, Paul et Hugo l'ont republié, et visiblement les fans ont adoré également. 

En une photo, tout bascule. Il m'a affiché d'une certaine manière. Et bien que les autres ne l'auraient jamais vu, je sais que c'est une déclaration, à sa manière. Il se sent prêt. Et d'un coup, c'est un électrochoc. Je n'arrive pas à vivre sans lui, je l'aime. A force de le protéger, je nous pourris. Je comprends à ce moment que je le couve comme un papa poule, qui a peur qu'il grandisse trop vite. Mon coeur s'emballe à ce moment, je ne sais pas quoi faire, mais je dois marquer le coup. Je ne le laisserai pas tomber cette fois, et il doit savoir que je suis prêt à le suivre. Aujourd'hui et pour toujours. Je serai plus fort que jamais pour l'aimer et l'aider dans tous ses combats. 

Je repose la story à mon tour, ajoutant un simple "2018 sera pour nous !" et bien sûr un coeur. Je checke rapidement mes DMs, je me rends compte qu'il y a beaucoup de femmes et hommes attirés par mon physique, ou qui tentent de savoir des choses sur l'équipe, Antoine, Paul ou Hugo. Rien d'alarmant, rien de stressant. Je continue de descendre pour trouver le message d'hier, mais impossible de mettre la main dessus. Je crois que l'utilisateur l'a supprimé. Ou est-ce que j'ai rêvé ? Je ne sais pas, mais je n'y pense pas. Cette fois, je me sens heureux. Je me sens bien. Je profite de ce petit moment de bonheur pour aller me balader dans le domaine ensoleillé. J'ai encore quelque chose à mettre au clair.