Chapitre 23 (Partie 2/2)

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Recroquevillée dans la cellule dont la hauteur n'excédait pas quatre pieds, Mia ne savait combien de temps s'était écoulé depuis sa confrontation avec le renégat. Une faible lueur provenait de l'interstice entre la porte et le sol de pierre, empêchant la cellule d'être plongée dans le noir complet. Bien qu'au début, Mia la trouvait rassurante, cette sensation disparut rapidement, car le peu de lumière lui faisait prendre conscience de l'étroitesse de sa prison. La jeune fille restait prostrée à terre, pouvant à peine se tenir assise dans l'espace exigu. Elle sentait régulièrement pointer ses crises de claustrophobie, qu'elle s'efforçait de contenir. Les premiers jours, Mia se laissait glisser dans le sommeil, se pliait au néant qui venait la saisir après ses suffocations. Mais les bracelets à ses poignets l'empêchaient de reprendre des forces. Et le renégat s'en était rendu compte. Dès qu'elle s'endormait, des crissements retentissaient contre les murs, comme si une lame rencontrait la pierre pour effectuer un son dérangeant, crispant, lancinant. Mia avait fini par ne plus l'entendre, mais un autre bruit s'était ajouté. Il résonnait continuellement. Une simple goutte d'eau qui tombait, s'écrasait au sol. Un autre moyen de torture psychique. Et il fonctionnait. Mia ne dormit pas pendant cinq jours. Quand elle somnolait, le bruit demeurait. Quand elle délirait, il l'accompagnait. Et dans ses moments d'éveil, il se mêlait à sa claustrophobie.

Dans un instant de lucidité, elle avait fouillé chaque recoin de sa cellule, à la recherche d'un objet pointu. Elle ne savait réellement comment elle l'utiliserait, mais cela détournait ses sombres pensées, lui donnait un but, aussi minime soit-il.

Ses doigts avaient parcouru les murs, aux nombreuses aspérités, avant de sentir des incrustations profondes dans la pierre, presque au niveau du sol. Elle avait suivi les entailles. Entailles qui formaient des courbes. Courbes qui se révélèrent être des lettres.

M. Une immense tristesse s'était emparée d'elle, qu'elle ne parvint pas à comprendre. Ce sentiment lui sembla étranger à elle-même, comme si la paroi l'avait gardé de longues années, puis le lui avait transmis.

Les lettres se succédèrent ensuite, chacune transperçant Mia d'une force qu'elle ne pouvait contrôler. Souffrance, désespoir, abandon...

M-A-N-A-Ë-L

Mia les avait parcourues plusieurs fois, jusqu'à ce qu'elle en fût certaine. Elles formaient un nom. Manaël. Était-ce un homme qui avait aussi subi la torture du baron, enfermé jusqu'à ce qu'il cède, l'esprit brisé, ou périsse ?

Mia ne s'expliquait pas le fort lien qu'elle avait ressenti, les émotions partagées, au fil de sa découverte. Avait-elle déjà perdu l'esprit ? Hallucinait-elle suite au manque de sommeil ? Le baron avait-il si facilement réussi à la faire sombrer ? Elle s'était recroquevillée, assaillie par une multitude de doutes, l'espoir plus bas que jamais.

Un matin, sa crise fut particulièrement violente. Les murs s'avançaient vers elle et menaçaient de l'écraser, de lui briser les os. Qu'elle ferme les yeux ou non, cette sensation ne la quittait pas, telle une ombre menaçante. Mia se mit à haleter, comme si sa poitrine était comprimée. Se redressant, elle frappa les murs de ses poings dans un tintement de chaînes. Ses mains étaient en sang, ses phalanges contusionnées, ses plaies aux poignets tiraillées, mais elle ignora la douleur sourde qui montait en elle.

Les murs devaient s'arrêter, elle ne voulait pas mourir écrasée !

Le souffle court, éreintée, elle se laissa choir à terre et s'efforça de respirer profondément afin de se calmer. Le renégat ne devait pas la briser aussi facilement. Il jouait sur ses peurs avec une facilité effrayante.

Les murs sont immobiles, se rassura-elle. Pense à autre chose, un endroit agréable.

La solution lui vint naturellement. Elle se souvint de ses leçons de contrôle avec Elihan. Elle devait se rendre dans son esprit. Alors, elle échapperait à cette réalité et à la folie qui la guettait, tapie dans l'obscurité de sa cellule. Allongée sur le sol dur et irrégulier, Mia tenta d'ignorer la souffrance qui l'assaillait et de laisser toute tension quitter son corps meurtri.

L'Héritage d'IrlondorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant