Chapitre 26-2

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Le silence finit par retomber, mais c'était de ces silences dans lesquels on se sent en paix et où les regards sont parfois plus forts que des mots. Ethan et Ashley regardaient Samuel, émus.

Ce fut Ashley qui fit le premier pas après avoir jeté un bref regard à son ami.

— Samuel, on ne part pas juste pour te suivre, tu sais. On part avant tout parce que la vie ici est compliquée, surtout une fois que le conseil t'a à l'oeil ; tu peux toi-même en attester. C'est sûr, le confort de mon appartement me manquera, ainsi que les habitants du camp que j'ai appris à apprécier. Mais si vivre ici signifie être en constant danger et avoir peur pour ses proches, alors je préfère encore affronter la vie dehors et être avec ma vraie famille. Parce que tu fais partie de ma famille, Samuel, que tu le veuilles ou non.

— C'est pareil pour moi, et en plus tu le sais, ajouta Ethan en s'accoudant à la table, borné.

Samuel soupira en les scrutant, puis se tourna vers Ethan.

— Et pour ton père, alors ? Je ne peux décemment par te demander de choisir entre lui et moi ! s'exclama-t-il en crachant presque ces derniers mots.

Ethan lui lança un regard exaspéré.

— Mais je n'ai même pas à choisir. Tu crois vraiment que je préférerais rester ici pour rendre visite à mon père deux fois par mois et constater que peu importe ce que je ferais, il choisira toujours l'alcool ? Tu crois que je vous laisserais, toi et Ashley ? Elle a raison, ma vraie famille est à vos côtés, pas près de cet homme qui n'a plus jamais été le même depuis la mort de ma mère. Il s'en sortira très bien sans moi, au moins j'aurai la conscience tranquille en me disant qu'il ne risquera plus rien si je ne suis pas là.

Adriel assistait à cette discussion pour le moins intime avec un léger malaise. Il se sentait de trop et était sur le point de se lever pour les laisser tranquille, mais Aurore le regarda par-dessus son épaule et lui accorda un clin d'oeil complice. Quelques mèches s'étaient échappées de son chignon, lui donnant envie de les remettre à leur place. Elle ne semblait pas particulièrement gênée, au contraire, un mince sourire égayait son visage quand elle se tourna vers Ashley pour l'écouter parler. Très bien. Il ne devait vraiment pas être normal, dans ce cas-là, s'il était le seul à vouloir fuir cette conversation.

— Et puis, on a aussi promis à ces deux barjos qu'on resterait avec eux. Donc, de toute façon, la boucle est bouclée, glissa-t-elle sur le ton de la confession.

Aurore gloussa et Adriel sourit en coin. En l'espace de quelques heures, leur statut était passé de normal, à complètement bizarre. Il avait tenu plus longtemps que prévu, mais au moins maintenant n'avait-il plus besoin de se retenir pour faire bonne figure.

Samuel leva les yeux au ciel.

— C'est votre choix, je veux que le compreniez. Ce monde cruel dans lequel on vit exige beaucoup de nous, il est important que l'on reste bien entouré, et si cela signifie pour vous que l'on reste ensemble, alors soit. J'en suis même ravi, même si le vieil homme que je suis ne pourra pas s'empêcher de s'inquiéter encore plus pour vous. Mais ce n'est pas si mal, au moins comme ça je vous aurai à l'oeil. Et si tu veux mon avis, ils ne sont pas les seuls barjos comme tu dis, dans cette pièce. Vous rentrez très bien dans cette catégorie également. Ne fais pas cette tête surprise, Ashley, tu ne trompes personne.

Cette dernière se retrancha dans son siège en évitant le regard de tout le monde. Ethan lui murmura quelque chose dans l'oreille et elle rougit violemment. Il rit dans sa barbe et se leva prestement avant qu'elle ne le tape.

Les bras posés négligemment sur le dossier, il se recomposa un air sérieux et s'adressa à tout le petit groupe avec gravité :

— Bon, maintenant qu'on a réglé cette question épineuse, je propose qu'on s'organise pour notre départ qui se fera bien plus tôt que prévu.

La Terre des oubliésWhere stories live. Discover now