Chapitre 1

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L'attente à Nice me semble interminable. J'ai le cœur qui bat à cent à l'heure, je loupe une respiration sur trois et je fais les cents pas dès que je me lève de mon siège inconfortable. J'ai entendu ma mère soupirer plus d'une fois contre moi. Elle ne supporte pas vraiment me voir dans cet état. Surtout quand je ne sais pas me tenir une seconde. Elle dit que ça l'angoisse encore plus.

La savoir stresser me stresse encore et encore. Elle qui a toujours eu l'habitude des avions, comment peut-elle être encore aussi anxieuse même à son âge ? Quarante-six ans. Ce n'est plus vraiment tout jeune. Vous allez me trouver horrible de dire une chose pareil, mais je vous assure, elle le dit elle-même. Je crois qu'elle a du mal à croire qu'elle n'a plus vingt ans et elle le vit plutôt très mal. Elle compte les années qu'il lui reste jusqu'à la cinquantaine comme s'il ne s'agissait que de quelques mois.

La voix informatisé de l'aéroport résonne à nouveau contre mes tympans et mon cœur s'emballe à nouveau. La dame annonce le numéro du vol et sa destination, et je respire à nouveau calmement. Je souffle sous le sourire amusé de ma mère qui se moque sans scrupule de mon état et je finis par me lever pour aller me chercher un café.

Je resserre les pans de ma veste instinctivement en traversant un courant d'air. Il est encore très tôt dehors. Je crois même que le soleil n'est pas encore levé. Et nous ne sommes qu'en février. La température ne doit pas dépasser les dix degré. Un frisson me parcours en y pensant et il me tarde de tenir ma boisson chaude entre mes mains glacée.

Le seul distributeur de café ouvert est un Starbucks, et ce n'est pas pour me déplaire. Je salive déjà sans avoir pris la commande. Plus jeune, je faisais une fixation sur la marque. Aller savoir pourquoi. La seule et unique fois où je me suis rendue à Paris, j'ai photographié toutes les boutiques de l'enseigne que je croisais sans exceptions. Les plus proche de ma ville sont à Monaco, et plus jeune, c'était une expédition pour y aller.

J'arpente la carte des yeux rapidement en plissant des yeux. Faut dire que je suis loin, et c'est écrit en minuscule. J'abandonne la mission en me résignant rapidement et observe l'endroit où commence la queue. Elle est longue, certes, mais ça à l'air de charbonner derrière le comptoir, alors je me glisse derrière une femme aux cheveux rouge dont une partie est complètement rasé.

L'attente est plus longue que ce que je m'étais imaginée. J'imagine déjà la tête de ma mère si nous venions à louper notre avion à cause de mon stupide café. Je lance un coup d'œil sur ma montre et la boule dans mon estomac s'agrandit. L'avion est supposé décoller dans une vingtaines de minutes, mais l'embarquement des passagers n'a même pas encore débuté. J'avance d'un pas en gardant l'œil sur ma montre et je sursaute en percutant quelque chose de dur.

- Putain mais, me hurle un garçon pas très commode, fais gaffe bigleuse.

Mon cœur bat fort et j'ai l'air d'être perdue. J'observe le liquide brûlant glisser sur ma main et grimace légèrement. Ça réchauffe, mais c'est plutôt douloureux. Je tente un regard d'excuse vers l'homme qui me toise avec dédain. Il doit avoir mon âge. Ou peut-être est-il un peu plus âgé, mais pas d'énormément. Il tient son café brûlant du bout des doigts, et tire sa lourde valise derrière lui de l'autre main. Il a un costard et tient son ordinateur portable en équilibre contre sa taille.

Je bafouille des excuses sous son air désapprobateur. Il a l'air excédé, et je trouve ça pitoyable. Il marmonne quelques choses dans ses dents que je ne prends pas la peine d'écouter et je l'observe s'éloigner. Il est aigris. Peut-être à cause de la fatigue, à en croire les énormes cernes qu'il a sous les yeux. Ou peut-être à cause de son anxiété, à en croire l'énorme tension qui obstrue ses cervicales jusqu'à ses omoplates. Je le vois même sous le tissue de son costard parfaitement ajusté.

Tears Of Risk  |  Charles Leclerc Where stories live. Discover now